ILL River
L'émission "blues" de radio RDL Colmar animée par Jean-Luc et David BAERST

Nda : Après quelques années consacrées au duo CTBAB (en compagnie du chanteur-guitariste Aurélien Boilleau), Cary T. Brown signe son retour discographique avec « A Tale To Tell ». Un disque qui marque ses débuts avec un groupe dont il est à l’origine, ILL River. Avec ce dernier, l’artiste originaire du Kentucky, revient à une musique davantage orientée vers les sonorités américaines. Suivi dans cette aventure par 5 musiciens de haut vol, il ne compte pas s’arrêter en si bon chemin et envisage déjà une suite à cette aventure.66

Cary, tu es notre invité afin de nous parler d’un nouveau groupe…ILL River. Pourquoi as-tu décidé de revenir à une telle configuration, après t’être produit en formule duo pendant quelques années ?
Cela ne résulte pas d’un choix personnel. En fait, c’est le projet qui est venu à moi et une volonté de jouer en groupe s’est naturellement imposée. Peu à peu, nous avons constitué une équipe et, dès le début de l’année 2016, l’écriture s’est révélée être très facile. Il s’agit d’un travail que j’ai partagé avec le guitariste Stéphane Bonacci. Je me suis alors aperçu qu’une nouvelle forme de liberté s’offrait à moi. J’ai été, littéralement, happé par la musique que ce dernier me proposait. Je venais avec mes textes (ou simplement une petite idée de départ) et lui y apposait des riffs de guitare. De cette forme de spontanéité a découlé une évidence…celle de jouer ensemble. De plus, je souhaitais « m’élargir » et sortir de cette facilité, qui est de jouer dans des petits lieux. Je voulais pouvoir me « reposer » sur un coussin de musiciens…

Tu parles de liberté… Musicalement parlant, te sentais-tu « enfermé » dans cette formule duo ?
Je dirais plutôt que j’étais trop en sécurité. Il me fallait sortir de cet espace de confort alors que j’aurais, tranquillement, pu terminer ma carrière de musicien en me contentant des petits clubs. J’adore les endroits confinés mais je ne rechigne pas sur le fait de me produire sur une grande scène avec des lights, de la fumée et plein de gens devant moi (rires). Dans ce sens, ce projet est très excitant…

La chanson d’ouverture de l’album (« Smile for the picture »), évoque cette obligation de faire « bonne mine »…
Oui, cette « façade » que nous nous devons d’afficher alors que ça ne va pas. Nous devons faire abstraction de certaines choses…

Y compris dans nos vies professionnelles. En tant qu’artiste, tu te dois d’afficher ton célèbre sourire, y compris lorsque la vie te rattrape…
(rires) C’est clair ! Je vais te raconter une anecdote marquante de ma vie. Lorsque j’étais en « highschool », vers l’âge de 17 ou 18 ans, il y avait constamment des sondages qui concernaient les élèves (le plus sportif, le plus aventureux etc.). Moi j’ai décroché le pompon…
En effet, j’ai été considéré comme celui qui se plaint le plus (rires). J’évoquais toujours ce qui n’allait pas (rires). D’ailleurs, j’avoue avoir une grande gueule...
Je ne veux pas être considéré comme un « Calimero » mais, même si tout va super ben dans ma vie professionnelle, ça ne va jamais assez bien (rires) !

De quelle manière as-tu connu Stéphane Bonacci, peux-tu me parler de lui ?
C’est au milieu de l’année 2015 que j’ai fait appel à lui. Un accordéoniste interprétait des lignes mélodiques sur l’un de mes précédents projets. Un jour, il n’a pas pu être présent et mon bassiste de l’époque m’a suggéré de travailler avec Stéphane, puisqu’il est multi-instrumentiste. Je lui ai donc téléphoné afin de lui proposer d’être accordéoniste pour nous. Il a été d’accord mais s’est, rapidement, rendu compte que toutes ces lignes mélodiques pouvaient être jouées à la guitare. C’est ainsi qu’il a intégré le groupe, en tant que guitariste. Le concept ILL River s’est, à ce moment-là, orienté vers le rock américain car je me suis, rapidement, aperçu de son talent dans le domaine. C’est quelqu’un qui est débordant d’idées et d’énergie. De plus, il est très pointilleux… Son leitmotiv est « maison sérieuse, travail soigné ».
Sa manière de construire les chansons me correspond, j’apprécie particulièrement sa façon de structurer ses compositions.

Puisque tu reviens à un registre très americana, ne souhaiterais-tu pas l’employer comme accordéoniste afin d’aborder des morceaux dans une veine cajun ?
Stéphane est, avant tout, un guitariste…c’est une évidence !
Cette histoire d’accordéon est, davantage, un clin d’œil. Ceci-dit, le fait d’incorporer des éléments cajun dans notre répertoire n’est pas une mauvaise idée. Stéphane n’a pas peur des tempos lents et il ne recherche pas l’énergie dans la vitesse. C’est très agréable car il instaure une véritable assise, ce que l’on appelle le groove. Avec le batteur que nous avons la chance d’avoir, cela se traduit par un pur bonheur musical.

Profitons-en afin de présenter les autres musiciens qui te suivent dans ce projet…
Ce groupe s’est formé naturellement, sans que je pioche à droite ou à gauche.
Notre batteur est Jérôme Spieldenner. C’est l’un des plus talentueux de la scène française actuelle et l’un des meilleurs que j’ai eu l’occasion de voir. Beaucoup d’autres batteurs estiment qu’il est le plus doué. Il se met toujours au service de la chanson et il fait littéralement chanter sa batterie. C’est incroyable… Il me fait parfois penser à John Bonham, tout en faisant preuve d’une grande finesse. Le matériel n’a pas d’importance pour lui, d’ailleurs il n’est pas rare de le voir se produire avec une cymbale cassée. De plus, il est toujours présent pour l’apéro (rires) !
A la basse, nous retrouvons Jérôme Wolf qui est une véritable surprise pour moi. Je ne m’attendais pas à un tel talent, même si je savais que j’avais à faire à une valeur sûre lorsqu’il a intégré l’équipe. Lui aussi comprend ce qu’est le groove et possède un son très riche. Il enfonce les clous là où il faut ! Aux claviers, nous avons le maitre Manu Boch qui manie comme peu de gens son imposant orgue Hammond. C’est lui qui fait planer une sorte de sérénité sur tout le groupe. Il est d’une discrétion absolue et nous enveloppe de nappes magiques. C’est une chose très impressionnante à ressentir sur scène. Ce qu’il fait est très vivant.
A la guitare, il y a Aurel King, dont je connaissais déjà l’exceptionnel talent. En février 2017, lors de notre dernière résidence, il m’a scotché. Ses capacités sont énormes et, en plus, il possède une culture musicale hors-norme. Les sons américains n’ont aucun secret pour lui et son vocabulaire guitaristique est énorme. Nous nous entendons tous très bien car nous nous sommes retrouvés autour de cette culture de la musique américaine que nous avons en commun.
Sur scène, je suis rentré dans un discours qui correspond complètement à tout ce que j’ai connu depuis que je fais de la musique. C’est génial…

C’est ce qui est paradoxal. Tu te retrouves avec une configuration de groupe comme tu en as rarement connue et, pourtant, tu es vraiment devenu toi-même…
Oui, absolument ! Je me sens vraiment bien sur scène avec ces artistes. Je ne joue plus beaucoup de guitare et je touche un peu l’harmonica afin de faire « joli ». Je suis entouré de mecs bienveillants et je peux me consacrer à ma priorité qui est d’interpréter une jolie chanson…avec sincérité et clarté. Cela n’a pas de prix…

Penses-tu avoir, avec ce disque, obtenu le son dont tu rêvais depuis des années ?
Tu sais, on se cherche toujours dans ce métier. Nous n’avons pas encore obtenu la perfection avec ce disque. Par contre, le résultat me correspond vraiment et j’ai envie de creuser ce son. Certains aspects vont être modifiés mais la base musicale correspond vraiment à ce que je souhaitais au départ.

En tout cas, tu retrouves tes racines…
Yes ! C’est une liberté retrouvée. Une liberté dans le chant et dans la simplicité. C’est aussi le retour d’une sincérité que j’avais perdue depuis quelques années. Je me pose beaucoup de questions aussi. J’estime que je n’étais pas honnête avec moi-même durant une certaine période. Je prends aussi conscience que j’avance en âge, je suis plus proche de la fin que du début. Je me suis donc regardé dans le miroir pour savoir qui j’étais. Cela m’a ouvert les yeux…

Si ce disque m’évoque, en certains aspects, des titres mid-tempo de Bob Seger…je te verrais bien creuser davantage le sillon. Pourquoi pas en t’inspirant de gens tels que les frères Robinsons (ex Black Crowes) qui savent dépoussiérer les musiques traditionnelles américaines. S’agit-il d’artistes dont tu suis la carrière ?
Je les connais effectivement…
C’est drôle, car tu n’es pas la première personne à me faire cette réflexion. Je sais ce que j’aimerais réaliser, mais je ne sais pas encore comment l’univers musical va s’ouvrir pour moi.C’est une chose fantastique car je sais que, maintenant, j’ai des collaborateurs qui se mettent à mon service afin que je puisse me concentrer sur ma façon de chanter. Ce luxe change tout…je vais pouvoir me laisser aller !

Qu’est-ce qui est le plus compliqué pour toi, depuis que tu as délaissé la formule duo pour fonder un groupe de 6 musiciens ?
Trouver des concerts bien sûr ! Pour des raisons techniques (scènes pas assez grandes) mais aussi pour des raisons financières. C’est pour cela que nous jouons un peu moins, mais je ne baisse pas les bras pour autant. Je crois beaucoup en ce projet et je n’ai pas envie de m’adapter aux propositions qui me seront faites de réduire le line-up et de donner des concerts en formation réduite. Je veux que les spectateurs voient sur scène ce qu’ils peuvent écouter sur l’album.

Et, qu’y a-t-il de plus simple par rapport au duo ?
Chanter… Me planter devant un micro et exprimer le fond de mes chansons. Je n’ai plus besoin de « surjouer » quoique ce soit. Je ne fais que chanter et c’est super agréable !Parfois, je me demande ce que je fais sur scène avec autant de talents à mes côtés. Je me pince lorsque je vois ces musiciens, c’est magique !Je me considère comme le point le plus faible du groupe… J’ai beaucoup de gratitude vis-à-vis d’eux…

En termes d’écriture, c’est toi et Stéphane qui vous êtes partagé le travail sur cet album…
Oui… Je tiens à dire que notre prochain album est déjà en route. Sa sortie est programmée pour avril 2018. Les autres musiciens du groupe sont très occupés, car ils ont tous des projets au sein d’autres formations. Nous ne pouvons donc pas nous permettre de nous retrouver chaque semaine afin de répéter ou de travailler sur des compositions. C’est, de ce fait, principalement Stéphane et moi qui écrivons les chansons. J’espère, malgré tout, que nous pourrons organiser des sessions d’écriture en commun pour ce prochain disque. Dernièrement, j’ai présenté une nouvelle chanson au groupe. Un titre en 4/4 qui s’est, finalement, transformé en 6/8. Du statut de « marche », ce morceau est devenu une « valse ». Des idées fusent donc de tous les côtés. Chacun est très impliqué.

Etiez-vous très entourés durant l’enregistrement ?
Nous étions accompagnés par uningénieur du son qui compte parmi les plus réputés. Une personnalité sincère et directe... Il s’agit de Jean-Marc Hauser qui a travaillé avec Laurent Voulzy et qui a, même, obtenu une Victoire de la Musique pour son travail avec ce dernier. Il s’est aussi illustré auprès d’Eddy Mitchell, Hubert-Félix Thiéfaine, Véronique Sanson etc.
Il a apporté des prises de son exceptionnelles à notre projet. Quand on écoute notre disque sur du bon matériel, on a l’impression que le groupe joue dans le salon.
C’est Stéphane Bonacci qui a souhaité mixer l’album afin de conserver son aspect organique. Jean-Marc Hauser s’est, aussi, chargé des prises de son qui se sont déroulées aux Downtown Studios de Strasbourg…

Pourquoi la pochette du disque dévoile-telle une pie sur fond de Monument Valley ?
Je trouve que c’est un animal mystérieux, costaud et malin. Il y a un couple de pies qui réside en face de ma maison et je l’observe, parfois, avec mes jumelles. C’est un oiseau joyeux et débrouillard…Une image qui correspond parfaitement au groupe ILL River…

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Interview réalisée au
Studio RDL - Colmar
le 29 mars 2017

Propos recueillis par
David BAERST

En exclusivité !

 

 

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