Bad Juice
L'émission "blues" de radio RDL Colmar animée par Jean-Luc et David BAERST

Nda : Son vintage, look en adéquation, album dont la teneur des textes est largement orientée en dessous de la ceinture…le groupe Bad Juice a, décidément, tout pour plaire !
Afin de célébrer la sortie de « Ding-A-Dong » (Les Disques De La Face Cachée/Hell Prod), l’émission Route 66 se devait de revêtir ses plus beaux atours dans le but de recevoir les frères Thomas & David Schmidt. Ce fut chose faite le mercredi 9 novembre 2016, pour un show durant lequel le duo a dévoilé toute l’étendue de sa culture musicale…et de son humour. Voici quelques morceaux choisis, extraits du dialogue établi avec ces attachants baroudeurs de la scène rock strasbourgeoise.

Afin de débuter cet entretien, pouvez-vous évoquer la manière dont la musique est entrée dans vos vies ?
David Schmidt : Nous avons été, très tôt, marqués par la musique…dans la mesure où nous avons bénéficié de la passion que notre père vouait à cet art (blues, rock, folk). Nous avons, ainsi, découvert des artistes tels que Bob Dylan, Leonard Cohen ou Crosby, Stills & Nash. Par la suite, il nous a semblé évident, non seulement, d’en écouter mais aussi d’en faire. Avec Thomas, nous jouons ensemble depuis que nous sommes gamins. Je me suis mis à la batterie et lui à la guitare.66

Vos premiers groupes étaient-ils, également, basés sur des expériences communes ?
Thomas Schmidt : Nous avons toujours joué ensemble ! Notre premier groupe sérieux s’appelait Tommyknockers. Avec ce dernier, nous sommes partis au Printemps de Bourges en 1998. J’étais déjà à la guitare et David en était, bien sûr, le batteur. Cependant, nous ne chantions pas encore. Depuis, nous n’avons pas arrêté de jouer ensemble.
David Schmidt : Nos premières expériences musicales communes se sont, en fait, déroulées dans ma chambre à coucher. Régulièrement, nos voisins venaient gueuler (rires) !
Thomas Schmidt : En effet, nous avions une passion pour le groupe Queen dont nous passions toujours un live à fond.
David Schmidt : Cela ne plaisait pas de trop à la vieille du 3ème qui n’appréciait pas beaucoup les basses (rires) ! Par la suite, nous avons décidé de sortir de nos chambres et avons intégré diverses formations. Il y a dix ans, nous avons formé The Swamp avec deux autres musiciens. Quand ce groupe a ralenti son activité, nous avons décidé de continuer en duo en faisant ce que nous préférons. A la fondation de Bad Juice, nos obsessions du moment étaient Bo Diddley et Buddy Holly. Nous voulions jouer du rock’n’roll originel ainsi que du blues…

Vous avez été, très tôt, marqués par les musiques qu’écoutait votre père. S’agissait-il de vos premières influences ou y êtes-vous revenu plus tard…après avoir développé des goûts plus personnels ?
David Schmidt : Au départ, comme tous bons adolescents, nous avons eu des goûts qui se sont développés en réaction à la musique qu’écoutait notre père (rires) ! Thomas s’est orienté vers le metal et moi vers des groupes que mon père détestait (comme les Who ou Led Zeppelin). Puis nous sommes revenus à des choses qu’il écoutait. C’est, par exemple, grâce à sa discothèque que nous avons découvert Robert Johnson. Il aime aussi le rock des années 1950, pour lequel nous nous sommes passionnés. Au final, comme de bons enfants émancipés après l’adolescence, nous avons admis qu’il avait un bout goût concernant certaines choses (rires) !

Pouvez-vous revenir sur le groupe The Swamp, qui a sévit durant de nombreuses années ?
David Schmidt : Sévit…c’est le mot, oui (rires) ! Nous étions quatre et j’estime, en toute modestie, que nous avons réalisé des choses assez excellentes. Nous avons donné pas mal de concerts et sorti trois albums, dont deux enregistrés à New-York. A cette occasion, nous nous sommes même produits dans cette ville. Nous enregistrions dans le studio de Matt Verta-Ray qui est le compère de Jon Spencer au sein du groupe Heavy Trash. C’était des superbes expériences mais il se trouve que, pour des raisons logistiques, nous n’avons plus eu la possibilité de répéter ensemble de manière régulière. De ce fait, Thomas et moi avons décidé de partir sur un autre projet.

La musique de The Swamp était-elle fondamentalement différente de celle de Bad Juice ?
Thomas Schmidt : Pas vraiment, surtout sur les deux premiers albums pour lesquels j’ai signé la plupart des compositions. Il y a donc une continuité… The Swamp sonnait un peu plus garage. C’était un peu plus violent que ce que nous faisons actuellement…
David Schmidt : Avec The Swamp, nous avons arrêté sur un album qui était représentatif des influences de nos quatre personnalités. On y trouvait du rockabilly, du blues et une musique inspirée par les Cramps. Après ce disque, nous n’arrivions pas à nous décider sur la direction musicale que nous devions prendre (plus noise ou plus blues ou plus rockabilly). Bad Juice est la continuité de The Swamp, dans le sens où le dernier groupe cité aurait pu emprunter ce chemin. Finalement nous avons pris cette voie à deux… Il y a donc une espèce de filiation que l’on peut clairement ressentir…

Quand l’aventure Bad Juice a-t-elle, réellement, débuté ?
David Schmidt : Il y a, presque, trois ans (début 2014)…Nous avons commencé à répéter pour rigoler, en jouant du blues. L’association Genepi (qui regroupe des étudiants bénévoles intervenant en prison et dans les structures de la protection judiciaire de la jeunesse, sensibilisant la société civile aux problématiques carcérales et intervenant dans le débat public autour des politiques pénales) nous a proposé de faire un concert en prison (c’était à la prison centrale d’Ensisheim, en compagnie de Thomas Schoeffler Jr). C’était le tout premier gig de Bad Juice…Cela nous a forcé à « sortir du bois ». Nos deux 45 tours ont été réalisés dans la foulée (pour une sortie en 2015). Logiquement, nous avons enregistré un album cette année…

Vous évoquez souvent le blues. Dans ce domaine, quels sont les artistes qui vous touchent le plus ?
Thomas Schmidt : J’aime bien John Lee Hooker, mais il y a une artiste qui m’a vraiment fait replonger dans le blues. Il s’agit de Jessie Mae Hemphill… Je craque pour ce type de musique, qui est hypnotique et très tendue.
David Schmidt : Un jour, nous avons vu en concert T. Model Ford qui nous a beaucoup marqués. Souvent, nous essayons de retrouver un peu de ce que nous avons ressenti durant ce moment. Je conserve un souvenir impérissable de cette prestation…
Thomas Schmidt : Nous nous intéressons, aussi, depuis longtemps à toute cette panoplie de vieux bluesmen des années 1930 (Son House etc.).

Avant d’enregistrer l’album « Ding-A-Dong », vous avez enregistré deux E.P. Pouvez-vous revenir sur ces deux 45 tours ?
David Schmidt : Ils sont issus de notre idée du génie commercial. Nous nous sommes dit que peu de personnes possèdent encore des platines pour vinyles et écoutent des 45 tours. De plus, ces disques sont chers à fabriquer donc…allons-y (rires) ! Nous avons une réelle passion pour le vinyle, d’ailleurs notre album sort en format 33 tours (avec le CD inclus). Nous en écoutons beaucoup et le fait de sortir des 45 tours nous faisait marrer. Notre idée de départ était de ne sortir que des 45 tours. Puis, nous nous sommes rendu compte qu’il s’agissait là d’un suicide économique (rires). De ce fait, nous avons poursuivi avec un album…

Vous vous définissez comme étant un « hillbilly urban blues two men band ». Certes…mais de quoi s’agit-il exactement ?
David Schmidt : Hillbilly blues veut, littéralement, dire blues de pecnot. Chose qui traduit le rock’n’roll… Cette musique étant un mélange de blues et de country music signée par des rednecks américains. Nous souhaitions créer une appellation originale, susceptible d’éveiller la curiosité des gens. Comme nous vivons en ville nous y avons ajouté le terme « urban »…

Vous disiez que vos influences garage rejaillissaient davantage avec votre précédent groupe, The Swamp. A titre personnel, je les trouve toujours très présentent…
Thomas Schmidt : Oui, les chiens ne font pas des chats. Donc, nous continuons à nous produire dans cette lignée. Nous ne pourrons jamais nous défaire de ce côté garage.
David Schmidt : Nous aimons cela, c’est un peu le côté moderne de notre musique (rires).
Thomas Schmidt : Lorsqu’on s’intéresse aux origines du rock’n’roll, on peut trouver des compilations regroupant des groupes américains de garage complètement inconnus. Ces derniers produisent un excellent rock’n’roll, avec un côté déglingué qui fait défaut à la musique actuelle. On trouve beaucoup de compilations de ce type, inspirées par les discothèques des Cramps ou des New York Dolls.
David Schmidt : Il y a, également, la série « Nasty Rockabilly » dont chaque pochette est une photo porno. On y voit une nana faire quelque chose à l’organe d’un type ou dévoiler autre chose…Ces pochettes sont épouvantables mais, en même temps, je les adore. De plus, les morceaux sont déments… Du pur rockabilly joué par des groupes inconnus… Nous recherchons ce son et cette identité…

Le titre d’ouverture de l’album, l’instrumental « Kol Nidrei », n’est pas sans rappeler les bandes originales des films de Quentin Tarantino. Est-ce un clin d’œil à son œuvre ou, davantage, un hommage à Dick Dale et à la musique surf ?
Thomas Schmidt : Cet instrumental est, au départ, inspiré par un morceau de la liturgie juive. Au moment du Grand Pardon, l’office commence avec cet air. C’est une mélodie fantastique…Nous avons décidé de la reprendre à notre sauce en ayant, en tête, l’idée d’un passage « western » inspiré de l’œuvre d’Enio Morricone.

Ce fameux morceau, « Misirlou », de Dick Dale est à la base un air traditionnel grec… Votre « Kol Nidrei » a donc connu le même parcours…
David Schmidt : Oui, il existe aussi une version de « Hava Nagila » (chanson folklorique en hébreu, également réarrangée par Dick Dale, nda) en surf. Comme quoi, ce registre s’y prête bien (rires) !

Je crois que vous avez des choses à dire, concernant le morceau « Ding-A-Dong » qui a donné son nom à l’album…
David Schmidt : C’est un morceau marrant car il raconte l’histoire d’un type qui rencontre, enfin, l’amour après une longue quête. En effet, il tombe sur une femme qui lui fait des trucs absolument extraordinaires. L’attrait et la particularité de cette nana tient au fait qu’elle est dotée d’un pénis. Un « ding-a-dong », un truc qui pend… Comme l’album parle pas mal de choses triviales, on s’est dit que ce serait le titre idéal pour le disque. Ce « ding-a-dong » n’est donc pas le son d’une cloche !

Et c’est, probablement, une petite référence à Chuck Berry et à son hit de 1972, « Ding-a-ling » (originellement écrit et enregistré par Dave Bartholomew en 1952) qui évoque le même sujet…
David Schmidt : C’est exactement ça (rires) !

D’une chanson à l’autre, vous passez très facilement du français à l’anglais. Quels sont les critères qui vous poussent à choisir une langue plutôt qu’une autre ?
David Schmidt : Pour ma part, j’essaye d’écrire en français. Cependant, nous avons une règle… Lorsqu’un morceau revoie à un style musical américain (rockabilly, blues…), on essaye de le faire en anglais. De ce fait, notre album est majoritairement écrit dans cette langue.

Quel a été le processus de création de l’album et comment s’est déroulé l’enregistrement ?
Thomas Schmidt : Nous écrivons régulièrement des morceaux. De ce fait, nous n’avions pas à en élaborer spécialement pour l’album. Nous avons simplement eu à terminer les arrangements afin d’être prêts pour l’enregistrement.
David Schmidt : Il ne nous manquait, en fait, qu’un morceau lent. La chanson « The sound of her wings » est donc née spécialement pour l’album…
Nous avons enregistré à Montebelluna (près de Venise) en Italie, au studio Outside Inside. C’est un endroit très prisé par le label Voodoo Rhythm Records, sur lequel sont signés des artistes que nous respectons énormément (The Monsters, Reverend Beat-Man, The Juke Joint Pimps…). Nous aimons beaucoup le son qui s’en dégage…
Nous nous sommes donc mis en relation avec Matt Bordin et avons réservé son studio pendant une semaine. Finalement, nous sommes partis au bout de quatre jours car tout était bouclé (et Matt Bordin ne tient pas à faire plus d’une ou deux prises de chaque morceau, afin de ne pas en perdre la spontanéité). C’était très « old school » (rires) !
Thomas Schmidt : Nous ne sommes pas des adeptes de la « prise parfaite ». Dans les vieux disques que nous aimons écouter, il y a toujours des « pains ». Je trouve que cela donne de la vie, on se rend compte que ce sont des vrais êtres humains qui jouent. Cela apprend l’humilité… Si toute la prise est excellente mais que, à un endroit, nous ne sommes pas au top, c’est tant pis.

Souhaitez-vous ajouter quelque chose, afin de conclure votre venue dans l’émission Route 66 ?
David Schmidt : Ce moment était très sympa, merci de nous avoir accueillis et d’avoir évoqué notre œuvre (rires). Merci, également, pour la bière…c’est élégant (rires) !

Remerciements : Elsa Constantopoulos

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Interview réalisée au
studio RDL Colmar
le 9 novembre 2016

Propos recueillis par
David BAERST

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Emission spéciale Route66 avec Bad Juice

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