Quelle a été votre première sensation musicale ?
Quand j'étais enfant, le rock'n roll n'avait pas encore émergé.
La bonne musique n'était pas si répandue à cette
époque. Alors j'écoutais du jazz de temps à autres
au sein de ma famille. Fats Waller, Louis Amstrong et c'était tout.
La scène musicale anglaise n'était vraiment pas développée.
Je suis ensuite parti remplir mon temps de service dans les forces aériennes
britanniques basées en Allemagne.
C'est là que j'ai entendu les prémices du rock'n roll sur
les ondes d'une radio américaine basées en Allemagne.
J'écoutais Little Richard, Fats Domino et Elvis entre autres. Immédiatement,
j'ai été soufflé ! Puis je me suis acheté
une guitare et le reste appartient à l'histoire, je suppose !
Pourquoi avoir choisi la guitare basse ?
Je faisais partie d'un groupe qui incluait trois guitares et aucune basse.
Lorsque j'ai entendu un autre groupe qui disposait d'un bassiste, je me
suis dit : voilà le son que nous devons avoir. Doo, Doo, Doo,
Doo, Doo
J'ai donc demandé au premier guitariste : "Veux-tu
jouer de la basse ? Non ? Et toi ? Non ? Merde alors,
c'est moi qui devrait tenir la basse !" Etant le leader du groupe,
il fallait bien que quelqu'un s'y colle. C'est arrivé par accident.
Ce soir vous avez rendu hommage à Lonnie Donegan.
Quelle a été son influence sur la musique anglaise ?
J'ai entendu Lonnie Donegan en Allemagne, en même temps que le rock'n
roll. Il est directement responsable de la formation de chacun des groupes
anglais dans les années 60. Dans les groupes, tout le monde a commencé
par jouer du skiffle. Par exemple, comme les Beatles quand ils étaient
encore les Quarrymen lorsque Paul McCartney a rencontré John. Mick
Jagger jouait dans un groupe de skiffle avant les Stones. Moi aussi, j'avais
mon groupe en Allemagne. Les Who jouaient du skiffle, et les Kings. Absolument
tout le monde a débuté en jouant du skiffle.
Pour la simple raison qu'un batteur était superflu : on frappait
en rythme la caisse de la guitare. Le chanteur n'était pas plus
nécessaire car on chantait tous en chur. Comme nous
l'avons fait cette nuit. C'était très facile à apprendre :
trois accords et place à la musique !
Lonnie a donc influencé chacun des grands musiciens des années
60 comme Eric Clapton, Jimmy Page et Jeff Beck. On a tous commencé
par le skiffle. Une énorme influence sur tous les anglais.
Je crois qu'il n'est pas très connu par ici, n'est-ce pas ?
Il n'est pas bien connu en France, effectivement.
Vous voyez, il a également influencé Van Morrisson et bien
d'autres artistes. Nous avons donc tous une pensée affectueuse
pour Lonnie Donegan. Beaucoup ont joué avec lui en diverses occasions.
Nous le connaissions bien. J'étais triste quand il est mort, c'est
pourquoi nous lui avons rendu hommage.
Votre prochain album ne va-t-il pas tarder à
paraître ?
Il existe bien un album studio en préparation. Nous avons essayé
de le terminer avant la tournée mais cela n'était pas possible.
La maison de disque avait besoin de deux mois pour en faire la promotion.
Dans le temps, cela prenait une semaine avant la sortie. Maintenant il
faut le diffuser pendant un mois sur les ondes. Je ne comprends plus rien.
Je dois me faire vieux.
Il n'est donc pas encore terminer mais il sera achevé pour l'automne,
peut-être en septembre. Un album studio, avec des musiques formidables.
Par contre, nous avons déjà un album pirate, notre propre
" bootleg " édité par les Bootleg Kings "
(pas les Rythmn Kings). Il est tiré de concerts " live "
de l'an dernier. Je le trouve plutôt bon, en fait. Nous en sortons
un par an, chaque fois pour les concerts de l'année passée.
Avec ce groupe, cela fait cinq ans que je joue en Europe. Jamais les promoteurs
français ne nous ont invités à jouer en France. Nous
sommes allés en Scandinavie, en Autriche, en Suisse, en Italie,
en Espagne, en Allemagne, en Hollande, en Belgique. Partout ailleurs qu'en
France ! C'est uniquement cette année que nous avons été
invités par des tourneurs français. A présent, nous
faisons beaucoup de concerts en France et j'en suis heureux. Je suis très
HEUREUX * comme vous diriez.
La formation des Rythm Kings vient de changer,
notamment Chris et Andy.
Oui, nous avons changé, mais pas tant que cela. Depuis cinq ans,
notre formation n'a quasiment pas varié. Peter Frampton était
avec nous durant une année. Il a été remplacé
par ce merveilleux guitariste de jazz qu'est Martin Taylor. Mais Martin
est actuellement très occupé de son côté. Georgie
Fame a joué à l'orgue pendant quatre années. Maintenant
Georgie Fame veut se tourner vers le jazz, ce qu'il ne peut faire en restant
avec nous. J'ai donc du le remplacer par Chris Stainton.
Différents changements de formules interviennent quand même.
Gary Brooker a fait partie du groupe durant quatre ans, mais il travaille
plus avec Procol Harum à présent. J'ai du trouver ce lunatique
qu'est Mark Sanchez. Il est fantastique. Beverly est avec nous depuis
le début, les cuivres n'ont pas non plus changé.
Larry Taylor, Berverly et moi faisons partie du groupe dès l'origine.
De temps à autre, nous invitons quelqu'un d'autre. C'est très
chouette ! Cela ressemble plus à un ensemble de jazz. C'est
très sain de changer de temps en temps. Chacun joue à son
meilleur niveau.
Est-il
difficile de réunir un groupe composé de tant de personnalités ?
S'ils ne sympathisent pas avec les autres musiciens, ils sont virés.
Tout simplement parce que nous sommes un groupe de fans et d'amis. Nous
jouons uniquement pour l'amour de faire de la bonne musique. Il n'y a
pas énormément d'argent à récolter dans un
groupe de dix membres. Entre les frais de voyage et l'hôtel, il
ne reste pas grand chose. Donc tout le monde participe pour le plaisir
de jouer ensemble. C'est bien la raison pour laquelle nous nous plaisons
à le faire. Personne ne parle d'argent, uniquement de musique.
C'est aussi plus agréable de s'adresser ainsi à un public
qui est venu pour se détendre, quand nous aussi sommes là
pour nous amuser.
Vous vous adressez à tous les types de publics
comme dans ce festival très diversifié ?
Nous avons du faire une quinzaine de festivals en France durant cette
tournée. Auparavant, nous étions au festival de Nice il
y a de ça deux ans : c'était fantastique. Nous somme
allés à Cognac également la même année.
Voilà pour nos concerts en France avant cette année.
J'apprécie donc énormément le fait de pouvoir nous
produire plus actuellement. Hier nous étions à l'Olympia
de Paris. Excellent, un public magnifique et un accueil fantastique. Je
n'y avais pas joué depuis 1967 avec les Stones. J'ai adoré
y revenir. Les lieux sont très différents à présent.
Tout a changé mais c'est toujours l'Olympia.
Vous avez toujours été la mémoire
des Stones. Vous continuez à rassembler vos archives ?
Ah non ! Pas pour les Stones, c'est pour moi-même. Les Stones
ne collectionnent rien. Ils ne gardent pas d'archives. Cela ne les intéresse
pas. Je l'ai toujours fait pour moi et pour l'histoire. Ce qui m'a été
très utile pour mon nouvel ouvrage " Rolling With
the Stones ". Je n'aurais pas pu l'écrire sans mes
collections.
Vous avez écrit plusieurs livres ?
Depuis que j'ai quitté " le groupe ", je dispose
de plus de temps libre. Par exemple pour pratiquer la photographie, l'archéologie,
la charité. Je fais de la musique avec les Rythm Kings et partir
en tournée avec eux. Je m'occupe aussi de Bootlegs Records. Je
me suis lancé tant dans l'écriture que dans la restauration.
J'ai une nouvelle famille avec trois petites-filles. Il y a tellement
de choses que je peux tester à présent que j'ai le temps.
Tout est possible pour moi, comme pour ce groupe. Nous pouvons jouer tous
les styles de musique sans exception : du reggae, au jazz, au rock,
à la soul, au rockabilly, au boogie-woogie, au gospel
Ce groupe est absolument fantastique à ce niveau.
C'est très plaisant de pouvoir se permettre toute cette variété
de genres. Tout comme je pratique une grande variété d'activités
dans tous mes projets. Mes livres : un sur Marc Chagall, un ami à
moi ; un autre sur l'histoire du blues (" Bill Wyman's
Blues Odysee ") ; ainsi qu'un autre sur l'histoire
des Rolling Stones. Il y a aussi les DVD, les CD
Tout cela forme
une très belle période de ma vie. J'en suis très
heureux (" Happy ! " ) Je n'ai jamais été
aussi heureux de pouvoir faire ce que je veux de ma vie. Je suis toujours
très ami avec les Stones. Je les fréquente régulièrement
en société, dans les dîners, les soirées ou
dans l'une ou l'autre de nos maisons. Charlie me téléphone
régulièrement (" Salut vieux, comment ça
va ? Je voulais m'adresser à toi pendant le concert aujourd'hui
et tu n'étais pas là ! "). Charlie est
comme ça. Il est très drôle.
Comment
la musique des Rythm Kings va-t-elle évoluer ?
Je n'en sais absolument rien. Nous sommes capables de faire n'importe
quoi. Tout est possible. Des chansons modernes, du ragtime, du boogie-woogie,
de la country, entre autres. Du moment que l'on sent l'envie de le faire
et qu'on a la personne pour le chanter, on s'y lance ! Pas de limites,
pas d'auto-contrôle de notre propre style, comme pratiquent les
Stones. J'ai donné dans le genre durant les dernières quarante
années. Maintenant, je peux travailler librement. C'est tout simplement
merveilleux. Pour faire une chanson, il suffit d'avoir la basse, un piano
et une voix. Sans batterie ou rien d'autre. C'est possible. Voilà
ce qu'il y a d'excitant et c'est bien ce qui me fait plaisir.
Que voulez-vous ajouter d'autre sur votre passage
ici ?
En fait, je viens de vendre ma maison du sud de la France. Mais j'en ai
aussi acheté une autre dans la même région !
Je serais toujours là, près de Saint Paul de Vence. Nous
y passons toutes nos vacances. Mes enfants et ma femme s'y plaisent beaucoup.
Cela fait plus de trente ans que j'y vis et j'adore ce coin. J'ai essayé
d'apprendre la langue, mais tous les gens à qui je parlais dans
le sud me répondaient en anglais ! Je n'ai pas réussit
à parler français.
* " I'm very HAPPY ! " avec l'accent de Droopy !
(pour les non-connaisseurs, Bill Wyman s'auto-caricature)
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