Bill Wyman
L'émission "blues" de radio RDL Colmar animée par Jean-Luc et David BAERST


Quelle a été votre première sensation musicale ?

Quand j'étais enfant, le rock'n roll n'avait pas encore émergé. La bonne musique n'était pas si répandue à cette époque. Alors j'écoutais du jazz de temps à autres au sein de ma famille. Fats Waller, Louis Amstrong et c'était tout. La scène musicale anglaise n'était vraiment pas développée. Je suis ensuite parti remplir mon temps de service dans les forces aériennes britanniques basées en Allemagne.

C'est là que j'ai entendu les prémices du rock'n roll sur les ondes d'une radio américaine basées en Allemagne.
J'écoutais Little Richard, Fats Domino et Elvis entre autres. Immédiatement, j'ai été soufflé ! Puis je me suis acheté une guitare et le reste appartient à l'histoire, je suppose !

Pourquoi avoir choisi la guitare basse ?
Je faisais partie d'un groupe qui incluait trois guitares et aucune basse. Lorsque j'ai entendu un autre groupe qui disposait d'un bassiste, je me suis dit : voilà le son que nous devons avoir. Doo, Doo, Doo, Doo, Doo…

J'ai donc demandé au premier guitariste : "Veux-tu jouer de la basse ? Non ? Et toi ? Non ? Merde alors, c'est moi qui devrait tenir la basse !" Etant le leader du groupe, il fallait bien que quelqu'un s'y colle. C'est arrivé par accident.

Ce soir vous avez rendu hommage à Lonnie Donegan. Quelle a été son influence sur la musique anglaise ?
J'ai entendu Lonnie Donegan en Allemagne, en même temps que le rock'n roll. Il est directement responsable de la formation de chacun des groupes anglais dans les années 60. Dans les groupes, tout le monde a commencé par jouer du skiffle. Par exemple, comme les Beatles quand ils étaient encore les Quarrymen lorsque Paul McCartney a rencontré John. Mick Jagger jouait dans un groupe de skiffle avant les Stones. Moi aussi, j'avais mon groupe en Allemagne. Les Who jouaient du skiffle, et les Kings. Absolument tout le monde a débuté en jouant du skiffle.

Pour la simple raison qu'un batteur était superflu : on frappait en rythme la caisse de la guitare. Le chanteur n'était pas plus nécessaire car on chantait tous en chœur. Comme nous l'avons fait cette nuit. C'était très facile à apprendre : trois accords et place à la musique !

Lonnie a donc influencé chacun des grands musiciens des années 60 comme Eric Clapton, Jimmy Page et Jeff Beck. On a tous commencé par le skiffle. Une énorme influence sur tous les anglais.
Je crois qu'il n'est pas très connu par ici, n'est-ce pas ?

Il n'est pas bien connu en France, effectivement.
Vous voyez, il a également influencé Van Morrisson et bien d'autres artistes. Nous avons donc tous une pensée affectueuse pour Lonnie Donegan. Beaucoup ont joué avec lui en diverses occasions. Nous le connaissions bien. J'étais triste quand il est mort, c'est pourquoi nous lui avons rendu hommage.

Votre prochain album ne va-t-il pas tarder à paraître ?
Il existe bien un album studio en préparation. Nous avons essayé de le terminer avant la tournée mais cela n'était pas possible. La maison de disque avait besoin de deux mois pour en faire la promotion. Dans le temps, cela prenait une semaine avant la sortie. Maintenant il faut le diffuser pendant un mois sur les ondes. Je ne comprends plus rien. Je dois me faire vieux.

Il n'est donc pas encore terminer mais il sera achevé pour l'automne, peut-être en septembre. Un album studio, avec des musiques formidables. Par contre, nous avons déjà un album pirate, notre propre " bootleg " édité par les Bootleg Kings " (pas les Rythmn Kings). Il est tiré de concerts " live " de l'an dernier. Je le trouve plutôt bon, en fait. Nous en sortons un par an, chaque fois pour les concerts de l'année passée.

Avec ce groupe, cela fait cinq ans que je joue en Europe. Jamais les promoteurs français ne nous ont invités à jouer en France. Nous sommes allés en Scandinavie, en Autriche, en Suisse, en Italie, en Espagne, en Allemagne, en Hollande, en Belgique. Partout ailleurs qu'en France ! C'est uniquement cette année que nous avons été invités par des tourneurs français. A présent, nous faisons beaucoup de concerts en France et j'en suis heureux. Je suis très HEUREUX * comme vous diriez.

La formation des Rythm Kings vient de changer, notamment Chris et Andy.
Oui, nous avons changé, mais pas tant que cela. Depuis cinq ans, notre formation n'a quasiment pas varié. Peter Frampton était avec nous durant une année. Il a été remplacé par ce merveilleux guitariste de jazz qu'est Martin Taylor. Mais Martin est actuellement très occupé de son côté. Georgie Fame a joué à l'orgue pendant quatre années. Maintenant Georgie Fame veut se tourner vers le jazz, ce qu'il ne peut faire en restant avec nous. J'ai donc du le remplacer par Chris Stainton.

Différents changements de formules interviennent quand même. Gary Brooker a fait partie du groupe durant quatre ans, mais il travaille plus avec Procol Harum à présent. J'ai du trouver ce lunatique qu'est Mark Sanchez. Il est fantastique. Beverly est avec nous depuis le début, les cuivres n'ont pas non plus changé. 
Larry Taylor, Berverly et moi faisons partie du groupe dès l'origine. De temps à autre, nous invitons quelqu'un d'autre. C'est très chouette ! Cela ressemble plus à un ensemble de jazz. C'est très sain de changer de temps en temps. Chacun joue à son meilleur niveau.

Est-il difficile de réunir un groupe composé de tant de personnalités ?
S'ils ne sympathisent pas avec les autres musiciens, ils sont virés. Tout simplement parce que nous sommes un groupe de fans et d'amis. Nous jouons uniquement pour l'amour de faire de la bonne musique. Il n'y a pas énormément d'argent à récolter dans un groupe de dix membres. Entre les frais de voyage et l'hôtel, il ne reste pas grand chose. Donc tout le monde participe pour le plaisir de jouer ensemble. C'est bien la raison pour laquelle nous nous plaisons à le faire. Personne ne parle d'argent, uniquement de musique. C'est aussi plus agréable de s'adresser ainsi à un public qui est venu pour se détendre, quand nous aussi sommes là pour nous amuser.

Vous vous adressez à tous les types de publics comme dans ce festival très diversifié ?
Nous avons du faire une quinzaine de festivals en France durant cette tournée. Auparavant, nous étions au festival de Nice il y a de ça deux ans : c'était fantastique. Nous somme allés à Cognac également la même année. Voilà pour nos concerts en France avant cette année.
J'apprécie donc énormément le fait de pouvoir nous produire plus actuellement. Hier nous étions à l'Olympia de Paris. Excellent, un public magnifique et un accueil fantastique. Je n'y avais pas joué depuis 1967 avec les Stones. J'ai adoré y revenir. Les lieux sont très différents à présent. Tout a changé mais c'est toujours l'Olympia.

Vous avez toujours été la mémoire des Stones. Vous continuez à rassembler vos archives ?
Ah non ! Pas pour les Stones, c'est pour moi-même. Les Stones ne collectionnent rien. Ils ne gardent pas d'archives. Cela ne les intéresse pas. Je l'ai toujours fait pour moi et pour l'histoire. Ce qui m'a été très utile pour mon nouvel ouvrage " Rolling With the Stones ". Je n'aurais pas pu l'écrire sans mes collections.


Vous avez écrit plusieurs livres ?
Depuis que j'ai quitté " le groupe ", je dispose de plus de temps libre. Par exemple pour pratiquer la photographie, l'archéologie, la charité. Je fais de la musique avec les Rythm Kings et partir en tournée avec eux. Je m'occupe aussi de Bootlegs Records. Je me suis lancé tant dans l'écriture que dans la restauration.
J'ai une nouvelle famille avec trois petites-filles. Il y a tellement de choses que je peux tester à présent que j'ai le temps. Tout est possible pour moi, comme pour ce groupe. Nous pouvons jouer tous les styles de musique sans exception : du reggae, au jazz, au rock, à la soul, au rockabilly, au boogie-woogie, au gospel …
Ce groupe est absolument fantastique à ce niveau.

C'est très plaisant de pouvoir se permettre toute cette variété de genres. Tout comme je pratique une grande variété d'activités dans tous mes projets. Mes livres : un sur Marc Chagall, un ami à moi ; un autre sur l'histoire du blues (" Bill Wyman's Blues Odysee ") ; ainsi qu'un autre sur l'histoire des Rolling Stones. Il y a aussi les DVD, les CD… Tout cela forme une très belle période de ma vie. J'en suis très heureux (" Happy ! " ) Je n'ai jamais été aussi heureux de pouvoir faire ce que je veux de ma vie. Je suis toujours très ami avec les Stones. Je les fréquente régulièrement en société, dans les dîners, les soirées ou dans l'une ou l'autre de nos maisons. Charlie me téléphone régulièrement (" Salut vieux, comment ça va ? Je voulais m'adresser à toi pendant le concert aujourd'hui et tu n'étais pas là ! "). Charlie est comme ça. Il est très drôle.

Comment la musique des Rythm Kings va-t-elle évoluer ?
Je n'en sais absolument rien. Nous sommes capables de faire n'importe quoi. Tout est possible. Des chansons modernes, du ragtime, du boogie-woogie, de la country, entre autres. Du moment que l'on sent l'envie de le faire et qu'on a la personne pour le chanter, on s'y lance ! Pas de limites, pas d'auto-contrôle de notre propre style, comme pratiquent les Stones. J'ai donné dans le genre durant les dernières quarante années. Maintenant, je peux travailler librement. C'est tout simplement merveilleux. Pour faire une chanson, il suffit d'avoir la basse, un piano et une voix. Sans batterie ou rien d'autre. C'est possible. Voilà ce qu'il y a d'excitant et c'est bien ce qui me fait plaisir.

Que voulez-vous ajouter d'autre sur votre passage ici ?
En fait, je viens de vendre ma maison du sud de la France. Mais j'en ai aussi acheté une autre dans la même région ! Je serais toujours là, près de Saint Paul de Vence. Nous y passons toutes nos vacances. Mes enfants et ma femme s'y plaisent beaucoup. Cela fait plus de trente ans que j'y vis et j'adore ce coin. J'ai essayé d'apprendre la langue, mais tous les gens à qui je parlais dans le sud me répondaient en anglais ! Je n'ai pas réussit à parler français.

* " I'm very HAPPY ! " avec l'accent de Droopy ! (pour les non-connaisseurs, Bill Wyman s'auto-caricature)

 
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Les liens :

le 28 juin 2003 au festival
Décibulles de Neuve-Eglise

Propos recueillis
en exclusivité par
David BAERST et Jean-Luc

 

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