Bror Gunnar Jansson
L'émission "blues" de radio RDL Colmar animée par Jean-Luc et David BAERST

Nda : La machine médiatique s’emballe, à juste titre, au sujet du formidable one-man-band Bror Gunnar Jansson. Après un premier album éponyme paru en 2012 (gratifié d’un tirage original, en vinyle, limité à 100 exemplaires devenus des pièces de collection) et un EP de 4 titres qui a vu le jour au début de l’année 2014 (exclusivement en vinyle et tiré, cette fois-ci, à 49 exemplaires !), le suédois a sorti le disque « Moan Snake Moan » qui fait déjà date. Son blues poisseux, aux relents de rock garage, y semble tout droit sorti d’un univers fantasmagorique où il est visiblement plus facile de croiser Miss Annie Jones Elliot (célèbre femme à barbe américaine de la fin du XIXème siècle) que l’incarnation d’une Barbarella à la sauce Jane Fonda. Un coup de maitre dont Les Inrocks, Libération et consorts se font les choux gras, alors que Canal+ le propulse album de la semaine. C’est à l’issu d’un concert matinal (commencé à 10h15 dans le cadre du Cognac Blues Passions!) que le jeune homme a répondu, avec gentillesse et une certaine timidité, à mes questions. Une belle manière de débuter une journée dont nous passerons, finalement, la majeure partie ensemble.

Bror, afin de débuter cet entretien, peux-tu te présenter… toi et ta musique ?
Mon nom est donc Bror Gunnar Jansson et je vis à Gothenburg en Suède. Je joue une musique qui s’apparente à divers courants musicaux issus du mouvement folk, notamment le blues et la country music de l’ancien temps. J’ai débuté en prenant le pseudonyme de Gugges Enmanna (homme seul en suédois, nda) mais je suis, rapidement, revenu à mon vrai patronyme.66

De quelle manière en es-tu venu à la musique ?
Je considère que je n’en suis qu’à mon troisième mois en ce qui concerne mon éducation musicale (rires). En effet, je n’ai arrêté mes études que très récemment afin de me consacrer pleinement à ma carrière. En fait, entre la musique et moi, c’est une longue histoire. J’étais à l’Université, à Gothenburg, et appartenait à une section musicale. J’ai donc fait de nombreuses années d’étude musicales…

Comment le blues est-il entré dans ta vie ?
C’était aux alentours de mes 10 ou 12 ans. Mon père m’avait fait écouter divers disques de blues. Il s’agissait d’enregistrements de Muddy Waters, Howlin’ Wolf, Sonny Boy Williamson et ce genre de choses. Je suis, immédiatement, tombé amoureux de ces sons. Je me souviens très bien de la première chanson que j’ai entendue, qui était « I can’t be satisfied » de Muddy Waters. Elle m’a tout de suite touché et j’en suis devenu fou. C’est vraiment une bonne chanson !

Peux-tu me présenter la scène blues suédoise ?
Les formes de blues que tu peux entendre en suède sont, typiquement, les plus fréquentes. C’est-à-dire celui à 12 mesures et le rock-blues inspiré d’artistes tels que Stevie Ray Vaughan. Ces registres squattent la plus grande partie de la scène suédoise. Le reste est occupé par des musiciens qui font quelque chose de plus cool et qui reviennent aux origines. Souvent, ces derniers s’inspirent des artistes des années 1920 et 1930, mais aussi de choses plus récentes.

Peux-tu me parler du groupe Serve You Right To Suffer dont, je crois, tu es toujours un membre ?
Mon père joue également dans ce groupe, il y est bassiste. Il a longtemps insisté pour que je l’intègre à mon tour, ce que j’ai accepté de faire au bout de quelques années. En dehors de moi, tous les membres sont des amis de longue date de mon père. Ils jouent ensemble depuis les années 1960. Je les connais donc depuis ma plus tendre enfance. C’est vraiment un groupe très cool, juste moi et ces vieux types (rires) !

De quelle manière l’idée de devenir un one-man-band est-elle venue à toi ?
J’avais déjà appartenu à des groupes dans le passé. Je jouais alors du saxophone. Puis, j’ai souhaité arrêter d’en pratiquer mais je n’avais pas de nouveau combo pour m’accueillir en tant que guitariste. Tout le monde me souhaitait en tant que saxophoniste. J’ai donc commencé à jouer tout seul, en m’inspirant d’enregistrements de bluesmen tels que Mississippi Fred McDowell. C’est en écoutant ses disques des années 1960 que je me suis dit que je pourrais également essayer de reproduire ce schéma, c’est-à-dire jouer en solo. Dans un premier, j’étais uniquement un chanteur-guitariste et je me servais d’une planche en bois sur laquelle je frappais du pied. Puis, au fur et à mesure, j’ai ajouté d’autres instruments à ma panoplie.

Quelles sont, à ton sens, les plus grandes différences entre le fait de jouer en solo et le fait de jouer au sein d’un groupe ?
C’est différent bien sûr ! En tant que one-man-band, il m’est plus facile d’aborder des choses variées et de suivre la direction artistique qui m’est chère. C’est aussi une manière différente de penser, à mon sens en tout cas…

Depuis quelques semaines, tout semble s’accélérer. Le public et les médias s’intéressent de plus en plus à ta musique. En es-tu surpris par cet engouement, comment l’expliques-tu ?
Oui, j’en suis surpris (rires) ! Je pense que j’ai une certaine chance qui m’accompagne et que j’ai rencontré les bonnes personnes. Des gens qui m’ont aidé à sortir ma musique. Ils sont formidables et ont l’art de mettre en valeur un intérêt qu’ils trouvent chez les autres personnes. 66+

Quelles sont, à ton sens, les caractéristiques de ta musique, de ton deep-blues ?
 C’est une bonne question et il est difficile d’y répondre. Je suppose que le fait d’essayer de marier des univers variés en est une. Je cherche à utiliser différents personnages, qui reviennent régulièrement et pour lesquels j’écris des histoires qui sont évoquées dans mes chansons. C’est un langage assez cinématographie que j’utilise lorsque j’élabore ma musique. Je me suis, dans le passé, inspiré d’expériences qui m’étaient arrivées mais c’était assez laborieux. C’est une chose difficile pour moi… Il m’est plus facile, et je trouve plus fun, d’écrire au nom de quelqu’un d’autre. Je crois que c’est ce qui se distingue le plus dans ce que je fais…

Peux-tu me présenter ton nouvel album « Moan Snake Moan », qui vient de paraitre sur le label Normandeep Blues Records ?
Par rapport au précédent, ce nouveau disque possède un plus gros son. Davantage de personnes s’y sont impliquées. Sa production a, également, été plus élaborée. Il faut dire que mon premier album sous mon propre nom avait été capté dans les conditions du live. Là, quelques amis m’ont rejoint sur divers morceaux. Ainsi, au fil des chansons, on peut retrouver un organiste, un batteur, un trompettiste, un violoncelliste etc…Je pense que c’est un album plus généreux dans son ensemble. Ilsonne, également, de manière plus moderne que le précédent.

As-tu enregistré ce disque avec de l’ancien matériel ou l’as-tu réalisé avec des outils à la pointe de la technologie ?
Les deux ! C’est un mélange entre du vieux matériel et des outils plus contemporains. C’est un mixe entre l’ère digitale et l’ère analogique (rires) !

Qu’évoques-tu dans tes textes, souhaites-tu véhiculer des messages en particulier ?
Non, je ne cherche pas à diffuser des messages ou des choses comme cela. Tout me vient librement. Ce n’est que la traduction de mon feeling du moment.

De quels autres musiciens penses-tu être, musicalement, le plus proche ?
(longue hésitation)
Actuellement, l’un de mes artistes préférés est C.W. Stoneking. Je n’ai pas la prétention de me comparer à lui mais il constitue, au jour d’aujourd’hui, l’une de mes plus grandes influences. Sinon, on m’assimile parfois à un autre one-man-band suédois qui s’appelle Daniel Norgren. Ce dernier tourne beaucoup en Scandinavie et fait de la très bonne musique.

As-tu déjà une idée de la manière dont tu compterais faire évoluer ta musique à l’avenir ?
 J’ai déjà, dans ma tête, commencé à travailler sur mon prochain album. J’aimerais lui donner une couleur très sombre, un peu à l’image de l’ambiance que l’on retrouve dans la série télévisée Twin Peaks.Le rythme en sera lent et j’utiliserai beaucoup d’échos. Enfin, c’est ce que je souhaite pour le moment et j’ai cette image de Twin Peaks qui me revient sans cesse en tête. Ce sera, peut-être quelque chose dans ce ton…mais je n’en suis pas encore sûr (rires) !

As-tu un souhait, en particulier, pour la suite de ta carrière ?
Pas en particulier…C’est déjà tellement plaisant tout ce qui se passe actuellement. Donner des concerts et réaliser des albums et très grisant. Enregistrer un disque est probablement la chose la plus fun qu’il existe !

Quelle conclusion souhaites-tu apporter à cet entretien ?
Oh, je ne sais pas (rires). Je tiens simplement à remercier les gens qui écoutent ma musique. De plus, c’est vraiment formidable d’être en France et d’y rencontrer un tel public. Ici, les gens sont particulièrement attentifs. Quand ils connaissent mes enregistrements, ils participent aussi beaucoup à mes concerts. C’est quelque chose de très cool pour moi. D’autant plus que je n’ai pas un nom très connu, même si je commence à donner beaucoup de gigs. Ce partage avec les spectateurs est très agréable en France !

Remerciements : Nicolas Miliani (Normandeep Blues Records), David Isaac (Borderline Blues Agency), Gwenaëlle Tranchant, Lisa Bécasse et tout le service de presse du Cognac Blues Passions.

brorgunnar.bandcamp.com
www.facebook.com/brorgunnarjansson

 

 
Interviews:
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Interview réalisée au
Cognac Blues Passions
Colmar le 5 juillet 2014

Propos recueillis par
David BAERST

En exclusivité !

 

 

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