L'émission "blues"
de radio RDL Colmar animée par Jean-Luc et David BAERST
Bugs, pourrais tu évoquer tes origines
?
Je viens du Texas mais je suis né en Californie. Je suis parti
vivre au Texas très tôt et je pense que j’y vivrai toute
ma vie…
Depuis combien de temps joues-tu de la musique
et pourquoi t’es-tu consacré à l’apprentissage
de la guitare ?
Comme beaucoup de gens de ma génération, l’amour de
la musique et de la guitare m’est venu en découvrant Elvis
Presley à la télévision. J’ai voulu faire comme
lui !
J’ai probablement commencé à vraiment jouer - c’est-à-dire
à jouer des accords et écrire des chansons - vers l’âge
de 17 ou 18 ans (Bugs est né en 1943, Nda). En tout cas cela fait
plus de 40 ans !
Quelle a été ton éducation
musicale, avais-tu un professeur ?
Non, je m’asseyais dans un coin et j’essayais de jouer de la
guitare en écoutant des disques. Je les passais parfois très
lentement…
A chaque fois que je découvrais un nouveau guitariste, je l’observais
au maximum pour saisir sa manière de jouer. Je ne sais pas lire
ou écrire la musique, j‘ai vraiment appris par moi-même…
Quand as-tu commencé à te produire
au sein d’un groupe ?
Mon premier groupe était uniquement constitué de 2 personnes;
moi et un autre gars qui était aussi guitariste…
Nous n’avions pas vraiment de nom de groupe (Bugs a, à partir
de l‘âge de 16 ans fondé The Sensors puis Mouse and
the Traps, Nda).
Nous avons joué 2 ans et avons composé 4 ou 5 chansons avant
d‘être rejoints par un batteur et un bassiste. Notre style
était proche de groupes instrumentaux tels que les Ventures. Nous
puisions aussi dans le Blues ou le répertoire de James Burton.
Sans oublier les 3 King; Albert, BB & Freddie. Ce dernier est, par
ailleurs, devenu un ami et j’ai beaucoup joué avec lui…
Nous allons, maintenant, diffuser « I
want the Mother***** », peux-tu évoquer ce titre ?
Cette chanson parle de faire la chasse à tous ceux qui proposent
de la drogue aux jeunes… ce qui cause trop souvent leur mort.
A la fin de cette chanson je réalise, qu’une fois, il y a
très longtemps j’ai été cette personne…
J’ai tenté d’écrire cette chanson de façon
objective mais comment rester calme avec un sujet pareil ? Le monde
fonctionne comme cela à présent, même si ça
me rend furieux. Les drogues sont comme la peste de nos jours : on
ne peut y échapper. Si on croit résoudre ce problème
en éliminant les dealers, c’est faux.
Tu as cité quelques noms depuis le début
de l’émission mais pourrais-tu revenir sur tes autres influences
?
On me pose souvent cette question. ..
Je dois avouer que j’aime tous les styles musicaux. J’aime l’instrument,
la guitare… pas un style de musique en particulier !
A l’époque, quand j’allais chez un disquaire, je choisissais
mes disques en fonction du guitariste qu’il y avait sur la pochette.
Sans, forcément, en connaître le contenu…
J’ai écouté les Ventures, James Burton, LesPaul, Chet
Atkins, BB King etc…
Je suis, simplement, un amoureux de la musique et de la guitare. Je n’ai
pas un style de prédilection en particulier…
Il n’y a pas de mauvaise musique, il y a juste des gens qui peuvent
mal la jouer.
Quand as-tu commencé à te produire
sous ton propre nom ?
C’est probablement vers 1975...
Je connaissais très bien Freddie King car nous étions dans
la même compagnie et partagions le même manager. Nous nous
produisions souvent sur les mêmes scènes…
Un jour il m’a arrêté et ma proposé de discuter
avec lui, dans un bureau. Il m’a, alors, conseillé de devenir
le leader de mon propre groupe et d’écrire mes propres chansons.
C’est plus facile d’être simplement le guitariste d’un
groupe et de rester un peu en retrait. Si tu es leader tu dois t’occuper
de tout. Les problèmes de transport, d’argent etc…
C’est un travail difficile mais qui t’apporte beaucoup de liberté.
Depuis que je me produis sous mon propre nom je décide de mes chansons,
d’où je vais jouer et je suis très heureux comme ça
!
Tu as eu l’occasion de te produire avec des
artistes aussi prestigieux que les Allman Brothers, Leon Russell, BB King
etc… (Bugs me coupe)
Oui mais nous n’étions jamais dans le même groupe. Il
nous est arrivé de jouer ensemble sur scène, lors de jams
sessions par exemple…
Pour prendre l’exemple de Freddie King, nous avons souvent joué
ensemble. Cependant nous jouions encore davantage au poker car nous étions
de très bons amis. A une époque sa notoriété
n’était pas au plus fort, les gens ne savaient pas qui il
était. Son label lui avait demandé de faire notre première
partie lors d’une tournée. J’avais trouvé cela
ridicule et j’ai demandé à faire sa première
partie.
Pour toi, quelle est la définition de ta
musique ?
Je n’aime pas les clichés pour moi c’est de la vraie
musique américaine. Car elle est basée sur des styles aussi
variés que la Country Music, le Rock’n’roll, le Jazz,
le Blues etc…
Cependant les puristes du Blues, les fans « hardcores »
ne nous considèrent pas comme un groupe de Blues car nous ne jouons
pas que ce genre musical. Par exemple tu m’as dit que tu as apprécié
le fait que j’interprète « Hello Mary Lou »
(titre de Ricky Nelson écrit par Gene Pitney en 1961/Nda) hier
soir. C’est un exemple flagrant car aucun groupe de Blues ne reprend
cette chanson. Je pense, tout de même, que nous sommes un groupe
de Blues car nous puisons dans les origines de cette musique pour tout
ce que nous faisons. Il m’arrive de jouer jusqu’à 6 endroits
différents en une semaine. Donc je m’adapte et je mets un
point d’honneur à faire en sorte que tous les spectateurs
y trouvent leur compte…
L’important est de faire passer aux gens un bon moment !
Quelle est la situation de la musique, aujourd’hui,
au Texas ?
La situation a fortement évolué depuis les années
60. Par exemple, au niveau des radios spécialisées, toutes
les stations passent les mêmes classiques du Rock à longueur
de journée, c’est-à-dire les hits des années
60 ou 70.
Il n’y a presque plus de place pour les nouvelles productions ou
pour le Blues. Tout cela est devenu un vrai business, le but est de toucher
la plus grande audience sans prendre de risques artistiques.
Ce n’est pas comme dans les années 60 où il y avait
tant de FM qui proposaient des choses différentes et qui n’hésitaient
pas à diffuser les titres les moins connus des albums, pas uniquement
les hits.
Ta chanson « The man who killed my
Daddy » a-t-elle une histoire particulière ?
Oui, ce titre évoque la disparition de mon vrai père, en
Italie, pendant le seconde Guerre Mondiale. Il était musicien c’est
donc lui qui m’a transmis cette passion. Ce n’est que très
récemment que j’ai décidé d’en savoir plus
sur la vie de cet homme. Cette chanson n’est pas un message de haine
par rapport à un mauvais homme qui aurait tué mon père.
Je ne cherche pas à porter de jugement sur cette période
du 20ème siècle durant laquelle tout le monde pouvait tuer
n’importe qui. C’est juste la guerre en elle-même qui
est mauvaise…
Le militaire qui a tué mon père était comme lui un
pauvre type…
Chaque soir, quand je joue, je me dis que cet homme ou son fils pourrait
être dans la salle…
En introduction et en conclusion de la chanson on entent mon père
qui chante (son nom était Harry Miller Fisher, Nda). Sur le livret
on voit une photo de ma guitare à côté du violon de
mon père. Il y a aussi la photo de ce triste télégramme
que ma mère a reçu le jour de la Fête des Mères
en 1944...
C’est a mes 18 ans que ma famille m’a parlé de cela pour
la première fois…
Quels sont tes projets ?
Je n’aime pas passer beaucoup de temps en studio et je ne comprends
pas les groupes qui dépensent beaucoup d’argent et restent
un an en studio. J’aime garder un aspect spontané et je ne
commence un enregistrement qu’à partir du moment où
j’ai bien toutes mes chansons en tête. En principe il me faut
1 semaine pour faire un album. J’aime enregistrer de manière
live avec mon groupe, à mes côtés, dans le studio.
Je n’ai jamais compris qu’on puisse enregistrer une partie d’un
album d’un côté puis y rajouter la basse six mois après…
La musique est faite pour être jouée ensemble !
Quoiqu’il en soit j’ai un projet qui est de faire un hommage
à tous les grands guitaristes texans en abordant leurs styles respectifs.
Ceci dit, ça peut encore changer d’ici à ce que j’arrive
à mon prochain lieu de concert (rires)…
J’aime par-dessus tout jouer en live et sentir le public auprès
de moi. Le studio est une très bonne chose mais cela n’a rien
à voir avec la scène. Je fais souvent le rapprochement avec
les acteurs qui pratiquent réellement leur métier lorsqu’ils
se produisent au théâtre. Si tu tournes dans un film, tu
peux refaire des dizaines de fois la même scène. Ce n’est
pas du tout la même approche que si tu as un public devant toi…
C’est aussi une grande responsabilité pour moi de me produire
devant des gens qui travaillent toute la semaine pour acheter un ticket
de concert afin de venir me voir et m’entendre. Je dois, de ce fait,
donner le meilleur de moi-même et faire régner une certaine
discipline dans mon groupe pour que nous soyons au mieux. C’est spécialement
vrai pour l’Europe où les spectateurs ne comprennent pas forcément
tes textes. Il faut malgré tout réussir à faire passer
l’émotion.
As-tu une conclusion à ajouter ?
Non pas particulièrement…
J’invite simplement les gens à venir assister à nos
concerts. Ils pourront, ainsi, acheter mon CD et faire de moi un homme
riche (rires).
Remerciements : Rainer « Ray »
Bodenstein (BlueBridge Network International)