
Didier, tu es un saxophoniste très demandé
dans le milieu du Blues et du Rock'n'Roll en France, comment l'amour de
cet instrument t'est-il venu?
Au risque de te décevoir, il n'y a jamais eu d'amour du saxophone
car j'ai commencé à pratiquer cet instrument par accident.
Je voulais faire du piano et comme il n'y avait plus de place en classe
de piano, je me suis retrouvé en classe de saxophone. J'avais davantage
l'amour de la musique et de la scène que de cet instrument.
Je ne sais pas si je suis très demandé, en tout cas j'aime
sincèrement le Blues et le Rock'n'Roll. Comme il y a peu de saxophonistes
spécialisés dans ce genre en France, à l'inverse
des guitaristes, on me voit souvent
Je ne suis pas un saxophoniste dans l'âme puisque mes premiers
coups de cur musicaux ont été des guitaristes comme
Jimi Hendrix, Johnny Winter, Muddy Waters.
C'est peut être pour cela que je fait maintenant du Rock'n'Roll
et du Blues.
A force de pratiquer, certains saxophonistes sont-ils
devenus tes mentors ?
Non, la première fois que j'ai entendu un saxophoniste qui m'a
frappé c'était dans un magasin de disques, dans le rayon
Rock.
Je suis tombé sur le morceau " Urgent " du groupe
Foreigner dont le son de sax était monstrueux. Le musicien
en question était Junior Walker qui était un grand
saxophoniste de la firme Motown. C'est là que je me suis rendu
compte qu'avec un sax on pouvait passer par-dessus des guitares saturées.
C'est un challenge que j'ai pu relevé lorsque j'accompagnais le
groupe TRUST. Tout cela c'est grâce à Junior Walker
Quels ont été tes premiers engagements
en tant que professionnel et dans quel style te produisais-tu alors ?
En fait mon but premier n'a jamais été de devenir professionnel.
Ce qui m'éclate, c'est la scène et la préparation
d'un spectacle. Le jeu des hasards et des rencontres a fait le reste.
Lorsque j'ai rencontré le batteur Jeannot Cirillo il y
a plus de 20 ans, c'était pour faire une audition pour Jesse
Garon qui, à l'époque, venait de faire un gros succès.
Je ne sais plus avec qui j'ai commencé à faire du Blues
mais tout s'est enchaîné
Tout ce qu'il faut, c'est aimer le Blues et le Rock'n'Roll qui seront
toujours - avec la musique Soul et le Rythm and Blues - les fils conducteurs
de ma carrière.
Aujourd'hui, outre tes multiples collaborations,
tu es à la tête de plusieurs groupes ; Marty & the Gang,
le Mardi Brass Band. Peux-tu me parler de ces différentes formations
?
Je crois que ces différents groupes sont issus d'envies différentes.
J'en parlais un jour avec Charlélie Couture qui disait à
Antoine Tomé que j'accompagnais alors : " Pourquoi
ne rassembles-tu pas tous ces personnages pour n'en faire qu'un ? ".
J'ai besoin d'investir toutes mes facettes dans des personnages différents.
Par exemple j'ai un groupe, aussi avec Jeannot, qui se nomme les Zoozoos
avec lequel ont fait les cons et nous jouons sur le fil du rasoir.
Moi, faire le con sur scène, c'est un truc dont j'ai besoin.
Si ne n'avais pas ce groupe, je ferai, peut être, le con avec Marty
& the Gang ou avec Mardi Brass Band et ce serait peut être
moins bien venu. Ces groupes, ce sont comme des outils de communication.
La première fois que je t'ai vu, tu accompagnais
Screamin' Jay Hawkins, peux-tu me parler de cette période ?
C'était une expérience qui restera à tout jamais
importante car c'est quelqu'un qui a marqué l'histoire du Blues.
En plus il m'a marqué à titre personnel parce que c'était
un mec différent des autres. À la fois complètement
barré et toujours dans son film, mais aussi profondément
humain. Nous avons toujours eu d'excellents rapports.
Il ne supportait pas que les musiciens ne soient pas traités comme
lui, mis à part le cachet (rires). C'était un show-man fabuleux
toujours ravivé par la scène, même à la fin
de sa vie. Il était capable de toutes les facéties. Pour
moi il reste un modèle au niveau du spectacle.
Au même titre que mon père, qui est la première personne
que j'ai vu sur scène. Il faisait des bals publics en tant que
chanteur-animateur. La première fois que je l'ai vu en représentation
il portait une perruque, des talons aiguilles et chantait des conneries.
Entre lui et Screamin' Jay Hawkins, j'avais des raisons d'être fasciné
par le spectacle.

Quelles sont les collaborations qui t'ont le plus
marqué ?
Incontestablement c'est Screamin' Jay' Hawkins, puis Lionel
Richie puisque j'étais le seul blanc-bec au milieu d'une horde
d'excellents musiciens. Je pense aussi à une chanteuse de Blues
qui se nome Zoom, peu connue en Europe, avec laquelle nous faisons
des standard du Rythm and Blues.
Un soir elle a dit au public qu'elle était venue jouer en Europe
pour pouvoir payer des chaussures à sa petite fille. Sur ce elle
a chanté un Blues qui m'a vraiment déchiré, comme
je n'avais jamais entendu auparavant.
Ce sont les premières personnes qui me viennent à l'esprit
mais il y en a d'autres.
Combien de cd's as-tu à ton actif avec
tes propres groupes ?
Je ne sais pas exactement
Une bonne dizaine et je vais continuer à produire le plus de choses
possibles.
Avec le Mardi Brass Band, tu diriges 30 musiciens.
Je pense que tu as dû t'inspirer des formations de la Nouvelle-Orléans
pour cela. As-tu eu l'occasion de te rendre sur place et de te frotter
aux musiciens locaux ?
Oui, j'ai déjà eu l'occasion de rencontrer des louisianais
à Paris comme Coco Robicheaux qui - en me voyant avec Marty &
the Gang - croyais être chez lui.
Il faut dire que nous sommes quasiment les seuls à jouer ce style
de musique en France. Nous avons aussi fait la première partie
de Marva Wright à la Cigale et reçu les félicitations
de ses musiciens.
Quand je suis allé à la Nouvelle-Orléans, c'était
plus en tant que touriste branché musique que pour prendre des
contacts.
Cependant j'y ai vu des vieux Brass Bands qui m'ont donné l'envie
d'en former un à mon tour. Cela remonte à près de
5 ans.
Quels sont tes projets actuels ?
J'en ai trop comme me l'a dit un pote. Avoir des idées c'est facile,
pour les faire aboutir c'est beaucoup plus difficile.
J'essaye d'y aller " molo ", faisant le plus réalisable
en priorité. J'enregistre actuellement avec les Zoozoos, nous écrivons
aussi ensemble pour le prochain album de Marty & the Gang. Quant au
Brass Band, il y a plein de projets puisque je voudrais qu'il fasse la
musique de l'origine des Brass Bands de la Nouvelle-Orléans jusqu'à
nos jours.
Ceci représente une période très large et rend ce
projet ambitieux. D'autant plus que je me suis rendu compte que je voulais
ajouter une part pédagogique à cela, en apprenant des choses
aux spectateurs.
J'ai aussi une formation qui s'appelle les Rolling Dominos qui fait la
musique de Fats Domino, toujours liée à New-Orleans.
Avec ce dernier groupe nous allons sortir un DVD.
A titre personnel, mes projets sont de vieillir le moins vite possible
et d'essayer d'éclater tous les spectateurs qui me feront le plaisir
de venir assister à l'une de nos prestations.
Remerciements : A Jeannot Cirillo pour
m'avoir mis en contact avec Didier.
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