Nda : S’il s’est fait connaitre sous le pseudonyme de Carol’s Cousin, c’est sous son vrai nom que Dom Ferrer nous revient en 2016…avec un troisième album. Un disque enregistré aux Etats-Unis, avec ses amis musiciens de Tulsa. Tous ont donné le meilleur d’eux-mêmes afin que « We Ride Free » se distingue par son authenticité et par sa fidélité à la musique « laid-back » de l’Oklahoma. Un genre peu connu dans l’hexagone et que Dom Ferrer, en véritable défricheur, souhaite faire découvrir à un maximum de gens dans notre pays. Une initiative, ô combien louable, que Route 66 s’est toujours fait un plaisir de relayer. En voici une nouvelle fois la preuve via l’entretien qui suit, réalisé lors d’une nouvelle venue de Dom dans l’émission.
Dom, combien de temps s’est-il écoulé entre ton premier voyage à Tulsa et le deuxième, marqué par l’enregistrement de ton album « We Ride Free » ?
Le laps de temps qui sépare ces deux pérégrinations et d’exactement un an. Il me tardait de prendre mes marques dans le studio et de retrouver les musiciens. Une fois sur place, tout est allé très vite…j’irais même jusqu’à dire que ce trip s’est déroulé de manière idyllique.
Avais-tu conçu les chansons bien en amont des sessions ?
J’avais déjà écrit un ou deux morceaux, sur place, lors de mon précédent voyage. C’est en rentrant de ce dernier que j’ai, chez moi, réellement débuté le travail d’écriture. Ces chansons sont empruntes du ressenti que j’ai eu à Tulsa et sur le temps que j’y ai passé. En retournant aux Etats-Unis, à l’automne 2015, mes morceaux étaient donc déjà écrits. Ces derniers reflètent, principalement, de mon premier voyage…
Ces chansons sont, en quelque sorte, un carnet de voyage…
Oui, c’est cela à 100% ! Cependant, ma vie ne se résume pas à ce qui s’est passé l’an dernier. Il y a donc, forcément, certaines choses que j’ai rajoutées. Ce voyage a été un révélateur…
En revenant à Tulsa…t’y es-tu, en quelque sorte, senti comme chez toi. As-tu eu l’impression de retrouver un endroit où tu avais laissé une partie de toi ?
Je ne sais pas si j’avais une partie de moi là-bas mais je me suis, rapidement, rendu compte que j’y ai retrouvé des endroits qui me convenaient parfaitement. Parfois même, j’avais l’impression que c’est moi qui convenais à ces endroits… Je me sens, vraiment, très bien à Tulsa…bien mieux que dans certains endroits qui, pourtant, me sont plus familiers.
Avant de prendre l’antenne, tu me disais que Tulsa est le prochain Austin ou le prochain Nashville…une vraie capitale de la musique américaine. Une capitale musicale éloignée du business et dont l’état d’esprit demeure complètement indépendant…
Ce sont les gens « d’ailleurs » qui disent que Tulsa deviendra, peut-être, le prochain Nashville. Par contre, les habitants de la ville disent simplement que Tulsa est, tout bêtement, le prochain Tulsa. Ils ne veulent surtout pas devenir autre chose que ce qu’ils sont. Je suis arrivé avec mon projet et, malgré le fait de n’être qu’un « petit français », je me suis rendu compte que ces personnes étaient hyper enthousiastes et curieuses vis-à-vis de moi. Elles ont, immédiatement, été prêtes à m’apporter leur soutien et leur collaboration.
Qu’est-ce qui est, selon toi, différent chez les musiciens de Tulsa ?
Tulsa est une ville mais s’apparente, en fait, davantage à un village. Tout le monde se connait très bien et tout le monde écoute tout le monde. Il y a un vrai partage et une envie de participer aux travaux des autres musiciens. On y trouve une ouverture d’esprit (et un intérêt porté à ce que font les confrères) qui est assez inédite. C’est ce qui fait la différence…
Le titre de ton album, « We Ride Free », est très symbolique. Qu’as-tu cherché à exprimer à travers ces trois petits mots ?
Quelque-soit le but que l’on se fixe, il faut aller au bout du bout. Cela ne se limite pas à la route ou à ce genre de choses. Quand on a un rêve, il faut se donner les moyens de le réaliser. C’est encore aux Etats-Unis que ce genre de choses se passe. Contrairement à ici, dire cela aux USA n’a rien de grossier. C’est un vrai état d’esprit qui va de l’avant. Il ne faut jamais abandonner, il faut y aller !
Les musiciens qui jouent sur ton album constituent une véritable « dream team ». Cette dernière gravite autour du label Horton Records. Nous l’avions déjà évoquée lors de ta dernière venue (sous le nom de Carol’s Cousin, nda) mais pourrais-tu revenir sur cette maison de disques, créée par Brian Horton, qui fait énormément pour la scène locale ?
C’est une véritable énigme… En effet, Horton Records est un label qui non seulement est indépendant mais qui, en plus, est à but non lucratif. Cela semble, surtout aux USA, complètement hallucinant. Brian Horton est un passionné de musique. Sur la même soirée, on peut le voir sur dix concerts différents. Il se bat pour garder la flamme du « new Tulsa sound » allumée. Il ne veut pas que l’on limite la musique de Tulsa à J.J Cale ou Leon Russell. Pour lui, le « new Tulsa sound » est toujours vivant et il se bat au quotidien pour que son état d’esprit subsiste. Ce gars se décarcasse pour cela…c’est un vrai personnage, un mec super !
Quels sont les différents musiciens qui ont participé aux sessions de « We Ride Free » ?
Ceux qui ont participé à toutes les sessions sont :
- Jesse Aycock (qui est l’icône hippie de Tulsa, il joue avec de nombreux grands artistes tels que Malcom Holcombe et mène une carrière sous son propre nom) aux guitares et à la pedal steel guitar. Il a apporté toute sa finesse, et une espèce de distinction, aux enregistrements. Je suis très fier de l’avoir eu à mes côté durant l’enregistrement du disque. Il a fait en sorte que le résultat ait vraiment de la gueule, il n’y a ni esbroufe ni frime… C’est juste la note qu’il faut et quand il faut, il n’en rajoute pas. S’il y a quelqu’un de « laid back », c’est vraiment lui (rires) !
- A la batterie il y a Paddy Ryan, qui joue avec une multitude d’artistes aux Etats-Unis. Il suffit d’écouter l’album pour se rendre compte qu’il ne s’agit pas du batteur lambda.Il est complètement immergé dans son monde, il est bruitiste et batteur en même temps.
-A la basse, j’ai bénéficié du talent de Shawn Stroope. Il vit en Louisiane et a, notamment, accompagné Dave Matthews. Je suis fan de ce dernier, donc je me suis senti tout petit à ses côtés (rires) !
Tous ces musiciens étaient très gentils à mon égard et se sont rendus particulièrement disponibles pour moi. A l’hôtel, puisque nous n’avions pas de gros moyens, nous avons tous dormi dans la même chambre durant les sessions. Nous avons partagé les mêmes beuveries, ce sont des mecs vraiment supers (rires) !
Quelques invités de marque t’ont, également, prêté main forte…
Le disque n’a pas été enregistré à Tulsa mais à Little Rock dans l’Arkansas (avec des musiciens de Tulsa). Un soir, après une session, nous sommes allés voir d’autres musiciens de Tulsa (Kyle Reid, Paul Benjaman, Beau Roberson, Jacob Tovar…) qui donnaient un concert à Little Rock. A la fin de leur set, nous leur avons demandé de passer dans le studio où nous nous apprêtions à retourner afin de continuer à travailler. Ils sont venus et nous avons décidé de graver un morceau tous ensemble (en l’occurrence, le titre « All fake »). Il était deux heures du matin et nous étions tous dans un état bien avancé (rires). Ce titre est une improvisation et il est littéralement imprégné du véritable son de Tulsa. Il est chargé de générosité…
Combien de temps es-tu resté aux Etats-Unis durant ce nouveau périple ?
Je suis resté, au total, un peu plus de trois semaines sur place. En ce qui concerne l’enregistrement en lui-même, nous avons passé cinq jours complets en studio avec les musiciens. Puis, deux jours ont été nécessaires pour les finalisations (mixage etc.).
As-tu donné quelques concerts durant le temps restant ?
J’ai même joué régulièrement sur place. Il faut dire que je sortais systématiquement avec Jacob Tovar. Dès que nous rentrions dans un club l’un de nous jouait ou accompagnait l’autre. Lorsqu’un groupe se produisait déjà sur place, nous étions rapidement invités sur scène.
C’est quelque-chose de, finalement, très habituel là-bas…
Oui, mais cela nécessite d’être rapidement « adaptable ». Je suis novice dans le système et le fait de jouer de but en blanc n’est pas une habitude pour moi. Les musiciens locaux étaient donc très compréhensifs, car ils jouaient plus avec moi que l’inverse (rires).
Finalement, retrouve-t-on beaucoup de sons différents dans ce new Tulsa sound ou est-ce à chaque fois la même musique ?
Je trainais dans des clubs qui restent concentrés sur le même style musical. Par contre, un soir, j’ai été invité à une soirée gumbo (plat typique de Louisiane, nda) durant laquelle j’ai rencontré autant de jazzmen que de musiciens qui se produisent dans des registres différents (comme le reggae).
Penses-tu avoir trouvé une vraie famille musicale à Tulsa ?
Je ne sais pas mais, en tout cas, dès cet automne, des musiciens de Tulsa vont venir effectuer une tournée française à mes côtés. Il y a donc un vrai échange qui se fait. Nos liens sont forts et il faut que nous fassions le maximum pour les entretenir. J’espère tourner aux Etats-Unis en 2017. Cette série de concerts devrait être montée par Brian Horton…
Tu étais déjà venu deux fois dans l’émission, sous le nom de Carol’s Cousin. Peut-on dire que tu es un autre homme aujourd’hui ?
Oui, ce n’est pas faux. Les américains étaient surpris du fait que j’utilise un pseudonyme anglo-saxon. D’un seul coup, grâce à eux, il m’a semblé évident de remettre en avant mon véritable patronyme. Je l’avais oublié mais, aujourd’hui, je m’en rappelle bien… Je ne voulais plus me « cacher » derrière un pseudo…
Puis-je te laisser le mot de la fin ?
Oui, je voulais ajouter que j’ai trouvé d’excellents musiciens français. Je me suis donc constitué le groupe idéal pour rendre justice à la musique de Tulsa dans notre pays. Il ne nous reste plus qu’à trouver de nombreuses dates. Si mes amis de l’Oklahoma arrivent à se produire 7 jours sur 7, c’est beaucoup plus compliqué pour nous, dans notre pays…
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