Nda : La seule directive de Flore M et de ses collaborateurs est de prendre du plaisir dans ce qu’ils font…et de faire les choses du mieux possible ! Un noble précepte qui, jour après jour, semble être particulièrement bien respecté…
Après un riche cursus musical (au sein de diverses formations), débuté au sein d’une chorale de gospel, la jeune chanteuse s’est lancée dans une carrière en solo en brandissant fièrement la bannière du blues & soul spirituals. Un registre qui lui est propre et qui définit parfaitement une musique influencée par des artistes tels que Ray Charles, Chaka Khan et (surtout) Sharon Jones.
Entourée d’une équipe soudée et de talentueux musiciens, la jeune femme a sorti un premier CD live « This Is Who I M » constitué de 8 titres. Un disque que la chanteuse a ardemment défendu dans l’émission Route 66 le 13 mai 2015. Elle y a, bien sûr, également répondu à de nombreuses questions, dont voici un florilège…
Flore, tu es issue du milieu du gospel. Peux-tu, cependant, me parler plus précisément de tes débuts dans le monde de la musique ?
J’ai débuté, dans le milieu du gospel, en intégrant la première chorale spécialisée dans le genre en Alsace. Elle se nomme High Rock Gospel Singers et elle est basée à Hautepierre, le quartier strasbourgeois où j’ai grandi. J’avais alors 13 ans et je chantais déjà, pour le plaisir, depuis un certain temps. C’est un coup du hasard qui m’a fait intégrer cet ensemble car, un soir, mes frères avaient oublié leurs clés à la maison et j’ai eu pour mission de leur ramener. Je ne savais pas, exactement où ils étaient, mais j’avais repéré qu’ils étaient régulièrement absents le vendredi soir. Curieuse de nature, je posais beaucoup de questions mais personne ne voulait me répondre. Je suis donc allé les retrouver à l’église où j’ai rencontré Frédéric Setodzo.
Là, j’ai entendu mes frères interpréter « Oh happy day » au sein de la chorale. Il leur manquait un soliste et, une personne que je connaissais, m’a aperçue au fond de l’église et m’a proposée de faire un test à ce poste…en argumentant que j’étais cool et que je chantais bien. Nous étions en pleine période « Sister Act, Acte 2 » (film de Bill Duke datant de 1993, avec notamment Whoopie Goldberg et Lauryn Hill, nda) et, du coup, j’ai interprété cette chanson à la manière du film. L’effet a été immédiat et on m’a demandé de rester (rires) !
En amont de ta pratique du gospel, cette musique était-elle déjà présente dans ton environnement familial (puisque tes frères étaient déjà membres de la chorale) ?
Oui, cela faisait quelques mois que j’avais constaté que mes frères n’étaient pas là le vendredi soir. En faisant la vaisselle, je les entendais interpréter des chansons que je ne connaissais pas (comme « Down by the riverside »). Il faut dire, qu’à l’époque, j’étais davantage plongée dans la musique de TLC ou de Destiny’s Child. Le gospel n’était pas encore mon école…
Le « coup de foudre » a-t-il été immédiat, t’es-tu lancé à fond dans l’apprentissage des racines des musiques afro-américaines ou as-tu continué à explorer d’autres registres musicaux ?
Le gospel, par l’intermédiaire de cette chorale, m’a permis de découvrir ma voix. Avant, je chantais pour moi ou avec des copines. Nous traduisions des chansons que nous aimions et nous nous éclations ainsi. J’ai toujours admiré les chanteuses à voix (Whitney Houston, Mariah Carey…) et je voulais faire la même chose qu’elles. Je travaille, par exemple, toujours afin d’obtenir le même nombre d’octaves que Mariah Carey (rires) ! Lorsque j’ai intégré la chorale, je n’ai pas cherché à en savoir davantage sur le gospel. J’ai préféré laisser cette musique venir à moi… Je me suis autorisée à grandir dans cette chorale sans chercher à maitriser quoique ce soit. Parallèlement à cela, je portais toujours les salopettes de mon grand frère et des baskets.
J’étais, un peu, un garçon manqué et j’avais un mode « ghetto » qui me faisait imiter les nanas de TLC. A cette époque, c’est ce qui me parlait le plus…le r & b, le hip hop. Ceci parce que c’était, aussi, ce que mes grands-frères écoutaient. De son côté, ma mère se délectait des vinyles de Jean-Jacques Goldman et de Michael Jackson…c’était encore une autre école. Tout cela s’est donc mélangé et mes premiers textes étaient très imprégnés de soul et de r & b. Le gospel est venu au fur et à mesure…
Entre cette « période gospel » et le début de ta carrière en solo, tu as connu quelques expériences de groupes. Peux-tu revenir sur ces derniers ?
En effet, il s’est passé pas mal de choses entre le gospel et le début de Flor M. Environ deux ans après avoir intégré la chorale, j’ai commencé à écrire mes premières chansons. Je me suis, à ce moment-là, surprise à signer des gospels mais j’ai aussi écrit des choses beaucoup plus urbaines. Nous étions un petit groupe de trois copines qui n’a, malheureusement, pas duré très longtemps. J’ai donc remis les chansons dans les cahiers et j’ai réintégré la chorale.
C’est là que j’ai rencontré mes quatre meilleures amies, que je considère comme mes sœurs de cœur… d’où le nom de The Five Sisters. Ensemble, nous avons eu envie d’aller plus loin. D’ailleurs, la règle dans les chorales actuelles de gospel est d’être ouvert à tous. Je trouvais cela génial car ça permettait de rencontrer beaucoup de monde. Par contre lorsque l’on veut aller plus loin musicalement et que l’on souhaite davantage de rigueur (que l’on va plus vite que les autres dans l’apprentissage des chants et des voix), ça peut parfois paraitre frustrant.
Du coup, avec les filles, nous nous sommes mises à part et avons commencé à faire du street gospel. C’est-à-dire reprendre des gospels traditionnels et les mixer à la sauce du ghetto. Il faut dire que nous étions toutes originaires de quartier difficiles (rires). Nous répétions tous les dimanches, au minimum, pendant 4 heures afin de mettre en place un répertoire. Fruit du hasard, au même moment, nous enregistrions le deuxième album des High Rock Gospel Singers. Il manquait une chanson et Frédéric Setodzo nous a demandé de palier à la chose en interprétant l’un de nos titres. Nous avons alors enregistré un morceau en décalage total avec ce que cet ensemble avait l’habitude de produire. Il a adoré et nous a poussées à continuer dans ce sens avec notre groupe. C’est ce que nous avons fait !
Les Five Sisters sont nées ainsi et nous avons travaillé dur pour y arriver. Nous avons beaucoup tourné et eu la chance de faire des premières parties, pour Craig Adams par exemple. Nous avons pu échanger avec toutes ces personnes, puis nous avons participé à un télé crochet (X factor sur M6, nda)… Nous avons continué notre route puis, toutes les 5, avons rencontré Sum Voice il y a pratiquement 6 ans. Cela a été une véritable révélation. Je me souviens qu’en répétitions, Michel Latour (fondateur et arrangeur du groupe et actuel collaborateur de Flore, nda) nous a expliqué ce qu’était le fait de trouver la tonalité d’un morceau. Croyez-le ou non, cela a été une révélation pour nous car nous n’avions jamais fait de solfège. Cette expérience nous a donc permis de redresser certaines imperfections, d’entendre les défauts de nos arrangements et de gagner en professionnalisme. C’était génial, une très très bonne école !
Puisque tu parles d’école, celle du gospel a-t-elle aussi été riche en enseignements…de par sa rigueur par exemple ?
Oui, elle m’a appris énormément de choses… A savoir découvrir ma voix, chanter avec le ventre et propulser. D’ailleurs, j’apprends actuellement à chanter avec un micro ce qui est un changement radical quand on a, comme moi, chanté pendant 15 ans dans de grandes églises sans micro. Donc, aujourd’hui, j’apprends que mon micro est mon ami…donc il ne faut pas l’agresser (rires) ! Le gospel m’a aussi appris à m’autogérer et à faire grandir en moi une certaine forme de spiritualité. Ceci-dit la rigueur est venue avec les Five Sisters, car il y avait là une véritable volonté d’aller plus loin. On peut faire toutes les écoles que l’on veut, si on n’a ni la volonté ni l’envie d’aller plus loin et d’atteindre un objectif on ne peut arriver à rien.
Depuis quelques temps, tu t’es davantage investie dans la soul music. Qu’est-ce qui t’a amenée à aborder ce registre ?
Je me pose souvent la question et, en même temps, pas souvent. Cela n’a pas été un choix réfléchi. Au moment de lancer le concept Flore M et de me positionner sur le devant de la scène (ce qui a constitué un long parcours psychologique, car j’avais toujours connu le « confort » d’une chorale), j’ai souhaité présenter mes chansons et montrer ce qu’il y a vraiment au fond de moi. C’est alors, sans questionnement particulier, que la soul music s’est imposée d’elle-même…même si ma voix sonne toujours très gospel. En la personne de Patrick Faller, j’ai la chance d’être accompagnée par un formidable guitariste de blues. L’ensemble a engendré le blues & soul spirituals de Flore M…c’est la vie qui en est la cause. Donc, quand tu me demandes ce qui m’a poussée à faire cette musique, j’ai envie de te répondre que c’est la musique qui est venue à moi. Je n’ai fait que l’accepter…
Avec les Five Sisters, nous avions décidé de faire « tomber les masques » et c’est avec elles que j’ai réellement commencé à me lâcher et à donner davantage de moi-même (en termes d’émotion par exemple). Un travail qui s’amplifie encore aujourd’hui grâce à l’appui de mes collaborateurs. C’est l’acception de ce que je ressens, de ce que je suis… Parfois c’est difficile car on a l’impression d’être « à poil » devant le public…qui voit ainsi l’intérieur de nos cœurs et de nos corps. Quand tu es sur scène, que tu interprètes tes mots, tes arrangements, tes émotions…tu n’as pas d’autre choix que de tout donner aux gens qui sont en face de toi, de chanter comme si tu allais mourir demain.
Tu as édité, en 2014, un premier album. Ce dernier a été enregistré en public, pourquoi ce choix ?
J’aime bien penser « en dehors des cases »… Je voulais que ce premier disque soit un live, même si beaucoup de gens mon déconseillé la chose…me disant que cela ne se fait pas car il faut ci ou il faut ça. Moi je n’aime pas les « il faut » et je n’aime surtout pas comme me dise des « normalement ». Qu’est-ce qui est normal ? Ce qui est normal pour quelqu’un ne l’est pas forcément pour l’autre. De plus, un projet en développement nécessite un investissement financier qu’on ne peut pas toujours se permettre. Enregistrer en live a donc été le moyen de donner un bon concert (avec un groupe au grand complet) et d’en sortir avec un support à présenter. C’est une carte de visite qui représente tout le travail réalisé en amont… et qui reflète, de manière infime, ce vers quoi le projet Flore M tend.
Quels sont les thèmes que tu souhaites faire passer à ton public ?
Le premier thème qui a animé le projet était l’envie d’être qui on est…qu’importe les obstacles, ce que les gens pensent ou peuvent dire de toi. Accepter qui on est, l’être vraiment et aimer cela…Je suis quelqu’un qui aime et qui aime aimer. J’apprécie le fait de donner du bonheur aux gens et de chanter pour eux. Si mes mots et mon expérience (le fait d’avoir accepté le fait d’être chanteuse et non plus une conseillère clientèle) aident les gens à s’accepter tels qu’ils sont… je pense que c’est gagné. Si tu es bien dans tes pompes, tu es forcément bien avec les autres. Par contre, si tu n’es pas bien dans tes pompes, un seul regard de travers peut te faire « péter un plomb » (rires) ! Donc, soyons tous bien dans nos pompes et vivons, du mieux possible, ensemble !
Remerciements : Sandra Sarteaux
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