Gaspard Royant
L'émission "blues" de radio RDL Colmar animée par Jean-Luc et David BAERST

Nda : Après « 10 Hits Wonder », l’onde de choc Gaspard Royant continue de se répandre…Pour notre plus grand plaisir, son deuxième album « Have You Met Gaspard Royant ? » ne fait même, aujourd’hui, qu’amplifier ce phénomène. Il faut dire que notre homme est soutenu dans ses efforts par le mythique producteur Edwyn Collins…ainsi que par une maison de disques, non moins légendaire, Sony Music. De quoi donner des ailes à cet aussi élégant que talentueux artiste qui, accompagné par ses fidèles musiciens (Laurent Blot aux guitares, Pierre Durand à la batterie, Julien Zanetti à la basse et Léo Cotten aux claviers), n’a de cesse de rendre hommage à la musique de ses aînés…tout en lui octroyant une véritable cure de jouvence.D’ailleurs, le fait que Gaspard Royant n’hésite pas à reprendre sur scène le « (Your love keeps lifting me) Higher & Higher » du trop tôt disparu Jackie Wilson n’est, peut-être, pas complètement anodin. En effet, riche d’un cercle de fans de plus en plus large, il se pourrait bien que sa carrière prenne enfin la tournure qu’elle mérite et le conduise haut, très haut…

Gaspard, après avoir collaboré avec Liam Watson, c’est en compagnie d’Edwyn Collins que tu as réalisé ton nouvel album « Have You Met Gaspard Royant ? ». Comment s’est établie la connexion entre vous deux ?66
J’ai très vite su que je voulais bosser avec Edwyn. Je ne le connaissais pas mais, grâce à la maison de disques avec laquelle j’ai signé (qui fait preuve d’aplomb lorsqu’il s’agit de contacter un producteur) j’ai été mis en relation avec lui. Je lui ai fait écouter mes démos et il a, tout de suite, accroché à ce que je faisais. Il a vu les références vers lesquelles je tendais et nous nous sommes rendu compte que nous avions de nombreux disques de chevet en commun. Du coup, tout s’est fait très simplement…

En France, nous le connaissons principalement pour être l’auteur du tube « A girl like you ». Cependant, sa carrière a débuté dès 1976 (en plein démarrage du mouvement punk anglais) avec le groupe Orange Juice. Connaissais-tu sa carrière en amont de son parcours en solo ?
Comme tous les gens de ma génération, je l’ai découvert avec « A girl like you ». M’étant, alors, intéressé de près à sa carrière je me suis rapidement plongé dans ce qu’il faisait avant cela. Le groupe Orange Juice a, vraiment, signé des chansons formidables. Edwyn possède une carrière incroyable, il a eu des hauts et des bas. Il a été au top à 20 ans avec Orange Juice, puis a connu une traversée du désert avant de cartonner dans le monde entier avec « A girl like you ». Par la suite, il s’est lancé avec réussite dans la production avant d’être victime d’une attaque cérébrale qui l’a fortement diminué. Aujourd’hui, il continue de faire de la musique et il demeure quelqu’un de très impressionnant. Lorsqu’on le rencontre et qu’on repense à sa vie, on se rend compte que ce mec est un héros. Contre vents et marées, il n’a jamais arrêté. C’est admirable !

Est-il toujours à la tête de son propre label Postcard Records (fondé par Alan Horne en 1979) ?
Il avait participé à la fondation de ce label, devenu culte, alors qu’il n’avait que 22 ans. Malheureusement, Postcard Records a capoté. Cependant, Edwyn en a remonté un nouveau qui s’appelle AED. C’est quelqu’un qui a toujours besoin de faire quelque chose. Qu’il s’agisse de produire des albums, de faire de la musique ou monter des labels. C’est un vrai indépendant, qui aime tous les aspects de son métier. C’est un peu ce que j’avais fait avec mon premier album « 10 Hits Wonder », que j’avais produit et sorti tout seul. C’était donc très intéressant d’échanger avec lui, car nous possédons cette même expérience du « do it yourself ».

Après ton premier album, on te considérait comme un héritier de l’école Motown. Sur « Have You Met Gaspard Royant ? » tu affirmes davantage ton goût prononcé pour la musique anglaise. Avais-tu défini le côté artistique de ce disque en amont de ta rencontre avec Edwyn Collins ou est-ce avec lui que vous avez mis au point ces arrangements qui sonnent très « northern soul » ?
Ce sont les morceaux qui appelaient cette ambiance musicale. Ces dernières années, j’ai beaucoup écouté de northern soul et de chansons très rythmées. C’est probablement pour cela que mes nouveaux titres, en ce qui concerne leurs arrangements, exigeaient des cuivres ou des cordes. Avec Edwyn, en réécoutant les démos, nous avons eu les mêmes idées. Nous disant que tel titre devait sonner Dexy’s Midnight Runners ou qu’un autre devait davantage être mis à la sauce Motown. Nous sommes, directement, allés dans la même direction…

Edwyn Collins a-t-il été très impliqué dans le travail qui a suivi l’écriture des titres ?
Mes morceaux étaient bien avancés et ce que j’espérais trouver via notre collaboration est un son. Je souhaitais qu’il soit chaud et riche mais, en même temps, agressif et rentre-dedans. Edwyn possède toutes les références pour maitriser cela, c’était donc très agréable de travailler avec lui dans ce sens. De plus, son équipe de musiciens et son arrangeur sont excellents. Nous avons bossé avec les cuivres des Dexy’s Midnight Runners ainsi qu’avec l’ensemble de cordes de Belle & Sebastian. Tous ces gens sont ses potes… J’ai, ainsi, profité de son propre savoir-faire mais également de toutes ses connexions !

T’es-tu inspiré de groupes anglais avant d’écrire les morceaux ?
Oui… En fait, je suis un petit blanc français, originaire de Haute-Savoie, qui décide de faire de la musique soul ou rock américaine des années 1960. Je suis donc dans le même cas que de nombreux anglais, enfants de prolos du nord de l’Angleterre. Eux aussi, blancs comme des linges, se sont mis à faire de la soul américaine. Ce sont ces gens-là qui m’ont inspiré dans ce projet car, à la base, nous étions confrontés aux mêmes problèmes. Je pense, par exemple, à des groupes tels que les Dexy’s Midnight Runners, les Jam, Orange Juice etc.
Bref, tous ces combos inspirés par les musiques noires américaines et qui ont décidé d’en faire quelque chose d’autre. Il était très intéressant de s’en inspirer…66

Où l’enregistrement s’est-il, exactement, déroulé ?
Avec le groupe qui m’accompagne sur scène, nous avons enregistré dans le sud de la France (vers Carpentras). Puis, nous sommes allés à Londres pour les arrangements de cuivres, de cordes et pour enregistrer les choristes (de superbes chanteuses de gospel). Nous avons terminé tout au nord de l’Ecosse, dans le village d’Edwyn Collins. Il s’y est fait construire un studio. C’est là-bas que nous avons mixé l’album et que nous en avons enregistré une partie…

Tu as, donc, pu tout superviser…y compris l’adjonction des cordes et des cuivres…
Oui, ce disque est mon bébé. Il n’y a pas une minute durant laquelle je n’étais pas présent…

Tu as signé cet album avec une major, Sony Music. Est-ce les gens de cette compagnie qui sont venus à toi après la sortie de ton premier disque ?
Oui, j’avais réalisé mon premier album avec des bouts de ficelle mais nous avons pu beaucoup tourner (France et Europe) après sa sortie. De ce fait, notre renommée a commencé à grandir et quelques maisons de disques ont commencé à s’intéresser à notre projet. Sony a été la plus engageante d’entre-elles…la plus convaincante et probablement la plus convaincue !
Pour ce deuxième album, je tenais à travailler avec une maison de disques car j’envisageais d’avoir des arrangements et de collaborer avec un producteur. Cela coute de l’argent et je n’aurais pas pu m’offrir ce luxe tout seul. Le fait de travailler avec une telle structure était, pour moi, une suite logique. De plus, je constate que 90% des disques que je possède (et considère comme des chefs d’œuvres) ont été édités par des grosses majors. Cela démontre un certain savoir-faire, qui ne peut être que bénéfique !

On dit souvent que le fait de passer de l’autoproduction (ou d’un label indépendant) à une grosse maison de disques et synonyme de perte de liberté artistique. Plus que jamais, infirmes-tu la chose aujourd’hui ?
Je ne sais pas, tu en penses quoi toi ?

Je n’ai, vraiment, pas l’impression que tu as subi un dictat particulier…
En effet, on m’a laissé carte-blanche. Bien sûr, je suis conscient du fait que si je ne vends mon album qu’à deux exemplaires…ce ne sera pas le cas pour le prochain (rires). C’est la règle du jeu et je l’accepte. Jusqu’ici, tout va bien !

Depuis quelques semaines, j’entends beaucoup le mot crooner qui revient lorsque l’on parle de toi dans les médias. A titre personnel, cela me surprend un petit peu…Est-ce quelque chose qui te flatte ou qui, au contraire, ne t’était jamais venu à l’idée auparavant ?
Cela ne me dérange pas. Avec cet album, l’idée est de toucher un public plus large. L’audience de notre premier disque était déjà, un peu, acquise à la cause et était constituée de connaisseurs.Le fait de gagner en notoriété passe, évidement, par des raccourcis et par des formules. Le mot crooner ne me dérange pas, car j’adore les crooners des années 1950 et 1960. De plus, mon look sur les photos peut facilement rappeler ce type d’interprètes. Donc, si cela peut permettre aux gens d’écouter l’album et qu’ils se rendent compte que notre palette est un peu plus large, tant mieux ! Au final, cette appellation ne me dérange pas plus que cela…
Tant qu’on ne parle pas du « rastaman Gaspard Royant », je pense que l’on n’est pas trop loin de la vérité (rires) !

Tu as, quoiqu’il en soit, conservé la même charte graphique. Ton nouveau disque a même gardé le système de numérotation (en l’occurrence GR-006) que tu avais mis en place sur tes précédents disques…
Oui, depuis le début je numérote tous mes disques en considérant que tout cela fait partie intégrante d’une suite. Au final, lorsque l’on regardera l’œuvre en entier…il y a une espèce de logique qui apparaitra. J’ai eu la chance de commencer en autoproduisant mon premier album et, du coup, j’ai exercé tous les métiers. J’ai appris à être graphiste, directeur artistique…et, du coup, j’ai dû réfléchir à tous ces aspects. Maintenant que je les maitrise un petit peu, je n’ai pas envie de les lâcher. Je fais en sorte de conserver une espèce de cohérence…

Le fait d’appartenir à une telle major est-il plus « confortable » ou est-ce davantage un facteur de stress, lié à une exposition beaucoup plus importante ?
C’est les deux… C’est un confort évidement car, du coup, je me retrouve avec 15 personnes qui travaillent pour moi et je bénéficie moyens financiers plus importants. C’est aussi une pression car ces 15 personnes, il faut les motiver et être avec elles. Il est aussi nécessaire de s’assurer que, lorsqu’elles parlent en mon nom, elles fassent les choses bien. Tout est démultiplié. C’est très intéressant et, de toute façon, je n’avais pas envie de refaire le premier album. Je voulais passer à la vitesse supérieure et faire des choses que je n’avais jamais faites. J’ai envie d’avancer et de progresser… Si l’expérience maison de disques n’est pas concluante, il n’y a pas de problème…je retournerai à ma petite autoproduction et je continuerai à sortir des albums…tout me va. Quand on est fan des Beatles ou des Beach Boys (et de tous ces groupes qui devaient transiger avec de « grosses machines ») on a envie de connaitre une telle expérience.

Sur ce disque, quels sont les sujets que tu souhaitais traiter en particulier…quelle est la « Gaspard Royant touch » en termes de textes ?
Plusieurs personnes m’ont dit qu’il y avait trop de chansons d’amour (rires). Il est vrai que ce disque tourne beaucoup autour des relations humaines (en particulier dans un couple). De la rencontre entre deux individualités, de la manière dont il faut s’y prendre pour que ça marche, comment être sûr qu’il s’agit de la bonne personne… Ce sont les questions qui traversent tout l’album. J’essaye de visiter les différents sentiments que cela peut générer. L’élaboration de ce disque a été un formidable laboratoire de sentiments, qui m’a fait sauter de la haine à l’amour, en passant par l’admiration ou la détestation de soi. J’espère l’avoir traité avec un minimum d’ironie…

D’ailleurs on trouve souvent de la dérision, voire de l’autodérision, au sein de tes textes…
Oui, par exemple il y a une chanson titrée « Solo artist of the year » qui évoque l’ambition, tout en tournant la chose au ridicule. Etre chanteur c’est grand mais, en même temps, ce n’est pas grand-chose…

Je souhaite que ce titre soit prémonitoire mais, en attendant que cela se réalise, as-tu une conclusion à ajouter à cet entretien ?
J’étais ravi de passer ce petit moment… Achetez mon disque qui est super ! Faites-vous votre propre opinion. S’il vous plait, conseillez-le à vos amis… Puis, venez nous voir en concert car, avec le groupe qui m’accompagne, je crois qu’on est plutôt bons sur scène. J’espère toutes et tous vous voir sur la route. A bientôt !

Remerciements : Coline Casalegno (Sony Music), Anne-Sophie Henninger (La Laiterie)

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Interview réalisée à
La Laiterie - Strasbourg
le 21 avril 2016

Propos recueillis par
David BAERST

En exclusivité !

 

 

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