Jackson Mc Kay
L'émission "blues" de radio RDL Colmar animée par Jean-Luc et David BAERST

Comment as-tu découvert la musique country, étant alsacien de naissance ?
Je ne rappelle plus exactement comment j’ai pu découvrir cette musique. Entre 16 et 17 ans, j’allais déjà à l’école coiffé d’un chapeau et muni d’un magnétocassettes dans mon cartable. J’étais obligé d’enlever des cahiers, mais comme j’avais tout dans la tête, c’était très simple.
J’écoutais alors Don William, qui a eu une très grande influence sur moi. Pratiquement à la même époque, il y a avait Poco, si vous vous rappelez de ce précurseur du country rock.

Je crois que tu as appris à jouer de l’orgue, pour commencer ?
J’ai commencé à apprendre l’orgue à 14 ans. Ensuite, je suis devenu organiste à l’église de Cernay, la petite ville la plus proche de chez moi. J’officiais lors de la messe du samedi soir. Les « pauvres pécheurs » qui étaient dans l’église avaient la chance d’entendre un titre des Beatles chaque samedi. Une fois, je suis allé un peu trop loin. Au moment de l’offertoire , j’ai joué la mélodie du film « l’Arnaqueur ». Le morceau a fait son petit effet bien que j’ai failli être viré. Les musiques des Beatles plaisaient beaucoup, en particulier « the Fool on the Hill ». C’était très joli, en particulier la petite flûte.

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Comment s’est déroulé ton parcours musical par la suite. Es-tu passé directement à la guitare ?
J’ai débuté par le clavier, puis j’ai eu un accident de moto. Un bras était endommagé, du coup j’ai eu du mal à jouer de la main gauche au clavier. Cependant, j’avais encore assez de dextérité pour toucher une guitare ou une basse. La basse m’a attiré juste après, un instrument que j’apprends comme un fou. Je deviens bassiste professionnel.
Pour en revenir à mes influences, ma grand-mère écoutais toujours une radio BeroWechter en Suisse, qui ne passait que de la musique suisse... du jodle
il faut savoir qu'au cours de ma carrière musicale, j'ai pratiqué beaucoup de musiques de ce type (allemande, yougoslave... Plus tard, j'ai eu la chance de partir en tournée avec les 5 plus grand joueurs de folklore suisses.  c'était très proche du bluesgrass, dans l'esprit. Au départ, je pensais trouver une musique très figée. Les gars vont jouer leurs morceaux, trois quatre, en avant ! Au contraire, ils se tiraient la bourre, comme des motards. Ils partaient en solo comme des joueurs de mandoline. C'était très intéressant.

Quand as-tu eu le déclic pour la musique country ?
Cela se passait un peu après, j'avais 16-18 ans et je commençais à m'ouvrir à d'autres musiques. Venant d'un milieu très populaire et paysan, j'écoutais au départ de la musique alémanique. Je connaissais bien les Beatles et j'avais déjà les cheveux assez long. Et la musique country c'est imposée d'elle-même. Bien entendu, pour vivre je deviens très jeune un musicien professionnel. Je laisse donc ça de côté, mais heureusement, plus tard, j'ai pu revenir à mes amours de jeunesse.

Est-ce que la musique country était alors aussi établie en Alsace qu'elle l'est maintenant ?
On connaissaient tous Pierre Specker et son groupe Est. C'était le genre de country qu'on pouvait aller voir en live. Je connais maintenant des guitaristes qui officiaient avec Pierre. J'ai un très beau souvenir d'un concert de Pierre quand il a repris un titre du groupe Poco, "Rose of Cinnamon". Avec mes frangins, on a essayé de s'y mettre, mais nous n'étions pas assez agiles de  nos doigts.

Tes débuts professionnels remontent à loin. Quand as-tu commencé pour de bon ?
En 1993-94, je me suis mis à la country pour de bon, après de multiples expériences. Un gars m'a demandé d'animer une soirée pour des bikers. Ca m'a mis le pied à l'étriller. L'occasion fait le larron. J'ai monté un groupe en maitrisant pas plus de six morceaux. Avec un copain qui en connaissait d'autres, on a joué tout une soirée. Avec les musiciens qui m'entourent, notre démarche a toujours été de présenter quelque chose de chouette, de valable. D'éviter de pratiquer la facilité.

Peux-tu revenir sur ta rencontre avec Bonnie Gene Taylor ?
C'est une chanteuse de musique country d'origine américaine, qui habite en Suisse. Pour l'histoire, mon accompagnateur Christian Hatstatt était également son guitariste. Petit à petit, il lui fallait soit un guitariste, soit un bassiste. Comme j'ai la chance de jouer des deux instruments, je pouvais l'accompagner selon la formation requise. Avec un peu de temps, on s'est imposés en tant que groupe. Je l'ai ensuite amenée à se produire sur des festivals en France, car elle est très talentueuse. Surtout, elle a beaucoup d'énergie sur scène. Elle est très généreuse avec le public. Ca marchait très bien. Nous avons fait de très belles tournées ensemble.
J'ai beaucoup pratiqué le "backing", c'est à dire accompagner des gens. Par exemple en Allemagne pour Jill Morris qui était Numéro 1, une chanteuse de country allemande. Egalement pour un américain appelé John Permenter, qui joue aussi en France.

Je suppose que cela t'a appris plein de choses sur le métier, en tournant avec de tels professionnels ?
On apprends à être rapide, à écouter, à pratiquer l'anglais. Musicalement, c'est très intéressant. Par exemple, avec John Permenter, qui vient d'Austin. C'est un pur texan, qui joue du violon. Il connaît parfaitement tous les morceaux traditionnels du Texas. Même si nous les connaissons aussi, notre approche est totalement différente. Ces titres appartiennent à sa culture, à sa vie. En quelque sorte, il nous raconte sa vie et nous apprenons énormément par son intermédiaire.

Je crois que tu portes aussi un certain intérêt pour la country australienne. Peux-tu nous parler de cette scène ?
La musique country australienne, entre autres, est ce qui m'a poussé à jouer de la country sur scène. Elle est jouée différemment, le son est très particulier et le groove aussi, en général. C'est plus doux, un peu rock et blues, je dirais. Les textes ont souvent un rapport direct avec les gens, le pays, les problèmes qu'ils peuvent avoir. Bien entendu, ils n'oublient pas les histoires d'amour ! C'est ce qui m'a beaucoup plu dans cette musique, parce qu'elle me parlait. Au départ, je m'en suis inspiré et je l'ai pratiquée sur scène.

Es-tu surpris ou déçu du décalage entre la façon dont les médias perçoivent la country et sa réalité ?
C'est typiquement français, ou européen, d'avoir des stéréotypes, parce qu'ils ne connaissent pas bien ce phénomène. Pour autant, je ne peux pas être déçu, parce que les grands médias commencent seulement à s'y intéresser. Ils se rendent compte que cette musique est fédératrice, elle n'agresse personne, elle s'adresse à des jeunes, à des gens de notre âge et à des gens plus âgés. Tout le monde peut y prendre plaisir et y trouver son compte. On y trouve un peu de rock, un peu de blues, un peu de folk...
Aujourd'hui, de plus en plus de jeunes musiciens s'y mettent. Ils apportent leurs influences. Ca devient un grand mélange, qui reste très plaisant.
Maintenant, pour élargir, je dois dire que cela fait pas mal d'années que l'on tourne dans tous les endroits possibles. Jamais on n'a vu des gens se battre. L'atmosphère est invariablement bon enfant. C'est très agréable de rencontrer que des gens contents autour de nous.

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Que penses-tu de la pratique de la "line dance" ? Certains artistes de country sont frustrés, lors de festivals, de voir se former des groupes de danseurs qui n'étaient pas attentifs à leur musique.
Sans les critiquer, il faut faire un choix, en tant qu'artiste. Je préfère jouer lors de concerts, mais il m'arrive plusieurs fois dans l'année, de me produire dans des soirées typiquement "line dance". Dans ce cas, j'adapte mon répertoire, parce que les gens viennent plutôt pour la danse. Ils sont quand même à l'affut et écoutent les nouveautés. Dans un premier temps, ils sont surpris car ils ne connaissent pas les morceaux. S'ils trouvent que le tempo est dansant, ils se mettent à danser !
Je découvre un monde de gens très sympa, même si leur but n'est pas forcement d'écouter la musique. Comme ils s'intéressent à la danse, je leur donne de la musique à danser. Très souvent, ils sont reconnaissants et viennent me dire : "Tu vois, là tu m'a fais découvrir une autre façon de faire !" J'en suis très heureux et pourvu que cela dure !

Dans un registre totalement différent, un autre type de country existe sans être médiatisé en France. Représentée par Steve Earle, elle est plus engagée politiquement. Penses-tu que la country a pour but de véhiculer des messages politiques ?
Au départ, non, je ne pense pas. Elle raconte la vie des gens et ce qu'ils ressentent. Il m'est arrivé d'avoir besoin d'émettre des avis sur scène. Je trouve intéressant de le faire en petit comité. Dernièrement, nous avons eu une série de représentations dans des médiathèques en Alsace. On se rends compte que les gens qu'y viennent sont différents (ils se déplacent en semaine, ils viennent tard, etc). A partir de là, je me suis permis de donner deux, trois avis.
Est-ce que je vais le faire dans le futur, devant un plus grand auditoire, je ne sais pas... Faudra se laisser surprendre !
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On citait James Taylor et Jackson Browne au nombre de tes influences. Pourrais-tu nous parler de tes textes ? Tu écris dans quelques conditions (tard, la nuit) ?
Je suis quelqu'un qui ne vis pas du tout la nuit. C'est assez terrible, surtout maintenant. Dans mon dernier cauchemar vécu, un agent m'appelait de Nouvelle Zélande pour me dire : "Ah, c'est sûr, on va s'éclater ! Toutes ces nuits passées ensemble..." Cette année, j'ai eu la même expérience en Australie avec un gars qui pensait pouvoir répéter à une heure du matin... Et mi qui ne demandait qu'à  retrouver mon lit ! Je ne suis pas du tout un oiseau de nuit.
Pour en revenir aux textes, j'aime raconter la vie des gens, ce que je vois autour de moi... et puis voilà !

Dans l'élaboration de cet album, une personne a été indispensable : Lorraine Duisit. Peux-tu me parler de la façon dont vous avez travaillé ensemble ?

Le travail de création de cet album s'est étalé sur quatre ans. J'avais écris plein de titres dont  j'ai mis une grande partie de côté parce que trop simples. Le hasard a voulu que je rencontre un ami proche de Lorraine. En discutant de tout et de rien, il me parle de cette femme et de son groupe mondialement connu. Il m'a tellement vanté ses qualités d'écriture que je suis entré en contact avec elle.
C'est une grande parolière : à chaque fois, elle a vu juste. Elle sait aller au fonds des choses. Comme elle habite en Virginie et que je suis à Uffholtz, en Alsace, je n'ai pas pu aller chez elle tous les jours. Pourtant, je pouvais lui dire exactement ce que je ressentais au téléphone, ce qui s'était passé et pourquoi. Ensuite, elle faisait le texte comme si elle avait été à ma place.
En particulier dans le cas d'une chanson de l'album s'appelle "At the windows" : elle m'a bluffé !

 

 

 
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Les liens :

myspace.com/jacksonmackay

magnetoguitars.com

Interview réalisée
au studio de radio RDL
le 9 décembre 2009

Propos recueillis par
David BAERST
et Jean-Luc

En exclusivité !

 

 

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