Jeff, quand les gens disent de toi que tu es le Neil
Young australien, est-ce une bonne comparaison, à ton sens ?
Oui, je n'ai jamais entendu cela - mais c'est OK pour moi

J'aime beaucoup la musique de Neil Young. Plus spécifiquement, quand
il joue de façon complètement folle de la guitare électrique
en faisant ressortir beaucoup de bruits différents.
J'estime que les comparaisons dépendent toujours de ce que les gens
écoutent. Une personne dira que la musique que je fais lui rappelle
Neil Young, une autre citera Bob Dylan. On y trouvera des éléments
de Blues, de Folk ou un côté Rock'n'roll. Comme il s'agit un
peu d'un mélange de tout cela, les gens trouveront systématiquement
des comparaisons. Je n'ai pas de problème avec cela. Chacun peut
comparer ma musique à quelque chose qu'il connaît.
C'est toujours difficile de décrire quelque chose
Peux-tu revenir sur ton apprentissage de la musique
et sur tes débuts ?
J'ai commencé la musique par la clarinette qui a été
mon premier instrument. J'ai commencé alors que j'étais
très jeune. C'était assez formel et cérébral.
Cependant je travaillais, aussi, l'improvisation grâce au professeur
que j'avais et qui cassait les règles établies.
J'avais une structure de formation assez particulière qui me rendait
joyeux. Elle me permettait d'improviser et de faire des jams (rires).
A la même époque, j'écoutais des choses telles que
Led Zeppelin, Bob Dylan, Ry Cooder etc
La clarinette n'était pas l'instrument rêvé pour jouer
comme Jimmy Page (rires) !
J'en suis venu naturellement à la guitare, d'autant plus que ma
sur en jouait un peu. Cela m'a permis de découvrir cet instrument.
Dans une période, assez brève, j'ai décidé
d'arrêter l'apprentissage de la clarinette et d'apprendre, par moi-même,
la guitare.
Dans ton style musical, la scène australienne
est-elle très prolifique ?
Oui, il y a de nombreux musiciens qui sont formidables en Australie !
La scène musicale y est très dense. La communauté
de musiciens y est importante. Plus particulièrement depuis une
dizaine d'années, on assiste à une exposition, de plus en
plus, croissante de cette scène. Ceci est surtout vrai parmi les
gens qui font des musiques orientées vers le Blues, les sons "
Roots " en général et le Folk.
Avant les années 1998-99, ce milieu là était considéré
comme étant beaucoup plus " underground ". Puis le mouvement
s'est largement amplifié et les médias s'y sont intéressés.
Il y a, aujourd'hui, beaucoup de gens qui jouent. Il n'est pas rare de
retrouver de bons amis sur les Festivals ou dans le circuit
C'est une bonne scène qui est une vraie communauté, c'est
cool !!!
Tu as inspiré John Butler, quelles sont
tes relations avec lui ?
J'ai rencontré John, pour la première fois, alors que je
jouais dans l'ouest de l'Australie en 1996...
Je devais, à cette période, avoir 3 ou 4 disques à
mon actif. Je crois que je l'ai rencontré juste après mon
concert, il avait dû rester pour me voir
Dans les 5 ou 6 dernières années suivantes, son succès
international est devenu phénoménal. Il n'a plus besoin
de faire mes premières parties maintenant (rires) !
C'est un très bon instrumentiste et un ami formidable. Je l'aime
vraiment !
Pour toi, les songwriters ont-ils une mission
de nos jours ?
La mission des songwriters ? Je n'en ai aucune idée !
J'écoute les choses qui se passent autour de moi. Je projette ma
propre histoire dessus, comme chacun pourrait le faire. J'essaye d'y apporter
des associations d'idées ...
J'ai ma propre vision de l'écriture mais je ne pense pas avoir
une mission particulière que mes textes permettraient d'accomplir.
Je raconte simplement, avec passion, des histoires aux gens. Le but est
de les faire voyager dans leur esprit, avec ces chansons...
Elles reflètent ce qui se passe, ici et maintenant, et transportent
les auditeurs dans mon propre monde et leur permettent d'imaginer ce monde.
Un peu dans la lignée des vieux enregistrements de Blues, comme
ceux de Skip James, que j'écoutais et que je jouais à mes
débuts. Il me transportait ailleurs. De la même façon,
je peux imaginer d'où Elvis Presley venait, dans les années
50, alors que je vis en Australie, de l'autre côté de la
planète...
Nous pouvons nous projeter et imaginer les choses de cette façon...
As-tu des sujets de prédilection ?
Non ! En fait, j'essaye plutôt d'écrire sans avoir de sujets
prémédités. Au lieu de prendre un journal en me disant
: "OK, quelqu'un a été viré : je pourrais
en faire une chanson "...
Je me contente d'attendre que l'inspiration me vienne. C'est un peu comme
si on me tapait sur l'épaule pour me dire "Hey, écris
ceci..."
Je laisse aller mon inspiration et les chansons viennent naturellement,
c'est très pur. Si j'essaye de prévoir les choses, je peux
casser ce flux naturel qui doit rester très fort. J'aime quand
les chansons viennent d'elles-mêmes et me surprennent alors que
je n'ai pas d'idée particulière. C'est comme si tu conduisais
aux USA ou ailleurs, que tu prenais ton petit-déjeuner et que,
tout à coup, l'inspiration te venait. Je n'ai jamais idée
de ce qui peut se passer dans ma tête et je n'ai pas d'intentions
particulières concernant les chansons. 
C'est une bénédiction d'être choisi par une chanson
et de pouvoir en faire le récit.
Tu as enregistré 13 albums en dix ans.
Comment peux-tu expliquer un tel rythme de travail ?
(rires)
C'est comme si j'avais tenu mon journal intime sous forme d'albums. Je
ne sais pas. Je ne me sens pas, particulièrement, prolifique...
Je serais heureux d'arriver à faire 2 ou 3 fois plus de chansons.
J'ai toujours l'impression que j'écris laborieusement, en attendant
qu'une chanson daigne apparaître...
J'estime que de nombreux disques de ma production ont été
fait de façon très spontanée. C'est, par exemple,
le cas de certaines collaborations comme les disques réalisés
avec Bob Brozman et Chris Whitley. Même si ce sont
deux albums très différents l'un de l'autre.
Nous allions en studio, travaillions ensemble et écrivions les
chansons directement au studio. L'enregistrement de ces disques était,
à chaque fois, très rapide ...
Le fait de beaucoup enregistrer est, aussi, une chance. J'aime avoir de
nouvelles chansons afin de rendre mes concerts encore meilleurs. Je suis
moins anxieux quand je peux jouer de nouveaux titres.
Tu as, justement, la réputation d'être
un grand "showman". Le fait de te produire sur scène,
à travers le monde entier, est-il vraiment important à tes
yeux ?
J'adore jouer en live !
Cela représente une part très importante de ce métier.
Il y a un côté honnête et primitif de se retrouver
avec quelques personnes, dans une pièce, afin de les faire voyager
à travers la musique.
C'est très tribal d'être devant un public et des passer une
très bonne nuit. D'autant plus que tu ne sais jamais comment cela
va se passer et quelles seront les réactions. J'aime aussi voyager
et partir à la recherche de nouveaux publics qui ne savent pas,
véritablement, ce que tu vas faire. Les sensations sont, à
chaque fois, différentes en fonctions des énergies des publics
respectifs. D'une nuit à l'autre, tu peux modifier les structures
de tes chansons et te laisser aller à improviser... Plus particulièrement
quand je suis confronté à un nouveau public, qui n'a pas
l'habitude de m'écouter, je peux adapter la forme de mes chansons
en improvisant dans des directions imprévues.
Y'a-t-il une grande part d'improvisation durant
tes concerts ?
Je pense, surtout quand je me produits en solo, qu'il est possible de
changer la structure et les codes des chansons assez facilement. Tu peux,
aussi, varier les mélodies et même changer les textes si
tu le sens bien. La section instrumentale de la chanson peut être,
facilement, modifiée...
Peux-tu me parler de ton nouveau CD "Whatever
Makes You Happy" (Wagram) ?
"Whatever Makes You Happy" vient juste de sortir en France
mais a, déjà, été édité il y
a quelques années en Australie (en 2004, Nda). C'était sa
première chance de sortir ici...
C'est une collection d'enregistrements réalisés de façon
assez dépouillée avec, juste, 1 ou 2 instruments. Sur le
prochain disque je serai seul avec, simplement, un bassiste acoustique
sur la plupart des titres. Sur celui-ci les instruments sont très
variés. Il y a par exemple, parfois, un batteur. J'y ai travaillé
avec d'excellents musiciens, comme le bassiste, et plusieurs choristes
sur certaines chansons. Il y a, aussi, un vibraphone sur plusieurs titres...
Quels sont tes projets ?
J'ai un nouveau disque qui est prêt...
J'ai sous le coude deux séries de chansons qui sont prêtes
à enregistrer. D'un côté, il y a quelques chansons
que j'aimerais enregistrer avec un groupe et en me produisant, peut être,
à la guitare électrique. Mais je n'en dispose pas encore
suffisamment pour en faire un disque.
D'un autre côté, j'ai de quoi faire un album complet avec
des chansons dans un registre très Folk avec des textes sombres.
Ainsi donc, le prochain disque sera très minimaliste avec simplement
un bassiste qui m'accompagnera...
As-tu une conclusion à ajouter ?
Simplement que je suis très heureux d'être ici. C'est une
bonne opportunité pour découvrir de nouveaux endroits...
De toute façon, c'est un privilège de faire de la musique
!
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