Nda : Elevé au rang de géant du blues, alors qu’il était encore adolescent, Jonny Lang mène depuis 1995 une carrière d’une rare régularité. Cette dernière permet à chacun de ses nouveaux albums de s’immiscer parmi les 50 meilleures ventes de disques aux Etats-Unis. Malgré ce succès populaire, des collaborations prestigieuses (aux côtés de Buddy Guy, Ron Wood, John Mayall, Willie Nelson, Herbie Hancock, Steven Tyler etc…), des tournées incessantes et une apparition remarquée au cinéma (dans le film de John Landis « Blues Brothers 2000 »), le jeune homme fait toujours preuve d’une grande humilité. Agé de 32 ans, il renoue avec les concerts européens, dans le but de présenter au vieux continent son 6ème album solo « Fight For My Soul ». C’est à l’issue du soundcheck d’un show, qu’il donnera quelques heures plus tard dans le cadre du Nancy Jazz Pulsations, que l’artiste a accepté de répondre en toute décontraction à quelques-unes de mes questions…
Jonny, peux-tu me présenter les musiciens qui t’accompagnent sur cette actuelle tournée ?
Oui, il y a Akil Thompson aux guitares, Dwan Hill aux claviers, Barry Alexander à la batterie et Jim Anton à la basse (ces musiciens tournent avec Jonny depuis 2008, nda).
J’aimerais évoquer tes débuts de musicien. Pourrais-tu, en particulier, revenir sur ta rencontre avec le guitariste Ted Larsen qui t’a prodigué tes premières leçons ?
J’ai toujours adoré la musique et j’ai grandi en écoutant les vieux disques de soul music qui appartenaient à mes parents. J’ai également toujours aimé chanter même si l’idée de pratiquer un instrument ne m’était, alors, encore jamais venue à l’esprit. Le déclic a eu lieu lorsque mon père m’a emmené voir un concert.
En effet, certains de ses amis jouaient dans un groupe qui se produisait sur scène ce soir-là. C’était le premier concert auquel j’avais la chance d’assister et il s’agissait de celui d’un ensemble de blues (The Bad Medecine Blues, nda). J’ai adoré et je me suis dit « oh mon Dieu, je n’arriverai jamais à jouer comme ces personnes ! ». Heureusement le guitariste du combo, Ted Larsen, a accepté de me donner mes premières leçons et m’a aidé à devenir guitariste. Je devais alors avoir 12 ans.
Tu l’as ensuite rejoint, en tant que chanteur-guitariste, au sein de son groupe qui pour l’occasion a été rebaptisé Kid Jonny Lang & The Big Band. As-tu travaillé ta voix de manière spécifique pour cela ?
Non pas particulièrement. J’ai grandi en chantant et en essayant de singer mes chanteurs préférés lorsque j’écoutais leurs disques. Je n’ai jamais vraiment appris à chanter dans une chorale (rires) !
Durant ton adolescence, je crois que tu étais un grand fan du mouvement grunge. Cette musique a-t-elle eu un impact sur le style que tu as développé ?
Oh oui et, d’ailleurs, je continue de l’adorer ! J’écoute beaucoup Nirvana, Pearl Jam, Jane’s Addiction et tous les groupes de cette mouvance. Ils ont traversé les époques et continuent de m’inspirer. Je me souviens avoir montré un disque de grunge lors de ma première leçon de guitare. J’avais dit que je voulais apprendre à jouer comme cela. Ted s’est alors écrié « Oh, non… peut être plus tard si tu y tiens vraiment » (rires) ! Il m’a alors fait écouter la musique d’Albert King. Ce dernier a été la première personnalité du blues que j’ai découverte grâce à mes cours de guitare.
Le succès est arrivé très vite pour toi. Cela a-t-il été facile à gérer compte tenu de ton jeune âge ?
Oui, cela n’a pas été si compliqué que cela. Je dirais même que cette période a été « fun ». Je n’ai jamais vraiment ressenti une quelconque pression...
As-tu, toutefois, été surpris par l’intérêt que de nombreux géants du blues t’ont porté dès tes débuts ?
Oui et d’ailleurs, au fil des ans, j’ai pu rencontrer la plupart de mes plus grands héros en ce qui concerne la guitare. J’ai même souvent eu l’occasion de jouer à leurs côtés…C’est vraiment incroyable de pouvoir les rencontrer et, d’en plus, pouvoir donner des shows avec eux. C’est comme un genre de mention qui viendrait agrémenter ton diplôme et qui te permet, de surcroit, de rencontrer encore d’autres personnes. C’est vraiment cool…
Parmi toutes ces rencontres et toutes ces collaborations. Quelles sont celles qui t’ont le plus marqué ?
C’est difficile à dire, tant il y a eu de grands moments… Je garde d’excellents souvenirs de mes rencontres et de mes joutes musicales avec Buddy Guy. C’est l’un des plus grands honneurs qu’il m’est été donné de vivre tout au long de mon parcours. Bien sûr, en tant que guitariste, j’ai pu l’observer et beaucoup apprendre en le voyant évoluer.
De plus, c’est une personne avec laquelle je suis devenu ami au fil des ans. J’ai donné beaucoup de concerts avec d’autres gens et, au bout d’un moment, c’est un peu comme si une nouvelle famille se constituait autour de toi. Plus tu es sur la route, plus elle est extensible…
Ton approche est-elle la même lorsque tu accompagnes un artiste tel que Buddy Guy, que tu participes à une tournée en hommage à Jimi Hendrix ou que tu te produis sous ton propre nom ?
En principe, avec Buddy, nous jouons à tour de rôle. Il est accompagné par son groupe et moi par le mien. La tournée en hommage à Jimi Hendrix (« Experience Hendrix Tour », nda) était vraiment très plaisante même si c’est une chose différente. Tu sais, ces concerts étaient souvent basés sur l’improvisation et on ne savait jamais à l’avance ce qui allait se passer. Il y avait beaucoup d’intervenants différents et ce n’étaient pas les mêmes d’un concert à l’autre. De toute façon, quelle que soit la situation, tout n’est que plaisir en musique.
En 2013, tu signes un retour discographique remarqué avec l’album « Fight For My Soul ». Pourquoi as-tu choisi ce titre, a-t-il une signification particulière pour toi ?
C’est le nom de l’une des chansons du disque et je pense qu’il décrit bien le sentiment général qui se dégage de ce dernier. Les morceaux qui le constituent sont, probablement, les plus personnels qu’il m’est été donné d’enregistrer. Ils sont le reflet de ce qu’il est arrivé de plus fort dans ma vie. Pour cela aussi, je pense que « Fight For My Soul » est un bon titre…
C’est donc un disque assez autobiographique…
Oui, il l’est beaucoup… même si ce n’est pas toujours sous une forme littérale. Cela peut être, en effet, présenté sous un aspect métaphorique par exemple… Sinon, oui, ce disque est très autobiographique…
Le contenu de l’album a-t-il été élaboré bien en amont de ton entrée au studio ou, au contraire, as-tu également écrit et composé « sur le vif » au moment des sessions ?
Oui, beaucoup des chansons étaient finalisées au moment de commencer l’enregistrement du disque. Certaines idées, en particulier pour les textes, ont germées il y a plusieurs années et d’autres plus récemment. L’écriture s’est donc faite sur plusieurs périodes et dans un laps de temps relativement long.
C’est un disque que tu as quasiment produit seul, pourquoi as-tu fait ce choix ?
C’est une décision qui date d’il y a quelques années en fait. J’avais dit à ma maison de disques, A&M, que je souhaitais davantage m’investir dans mes disques, en ce qui concerne la production. Tu sais, c’est quelque chose que je ressentais. Quelque chose qu’il me semblait nécessaire de faire pour beaucoup de raisons différentes. Aujourd’hui je suis content de l’avoir réalisé même si cela a nécessité un long apprentissage et beaucoup d’argent (rires). Après avoir terminé l’album, j’ai réussi à le faire distribuer et à trouver un partenariat avec Mascot Records pour l’Europe et Concord Records pour les USA.
Quels sont les sujets que tu souhaitais principalement évoquer dans ce disque ?
Ils sont assez différents mais principalement axés sur des choses qui me sont proches ou qui sont importantes à mes yeux. Des choses que j’aime ou que j’aime moins… Simplement la vie, cet album est sur la vie !
Musicalement parlant, quelle direction souhaitais-tu donner à cet album ?
Je ne sais pas vraiment…Peut-être quelque chose qui navigue entre la soul music, le rock… Je ne pourrais pas le classer dans un genre en particulier, tant il y a de styles qui s’y croisent.
Revendiques-tu aussi une part plus importante du gospel dans ta musique ?
Oui, d’ailleurs le gospel représente une grande part de mes influences musicales. De ce fait c’est quelque chose qui revient de temps en temps dans mes chansons.
Tu es enfin de retour en France. Es-tu surpris de constater que personne n’a oublié le nom de Jonny Lang ici ?
Oui, j’en suis surpris ! C’est incroyable… lors de mon premier concert français de l’année, à Paris, la salle affichait complet. J’en suis très reconnaissant vis-à-vis du public de ce pays. Je suis vraiment désolé de ne pas être revenu plus tôt mais cela va changer maintenant. Je pense, en
effet, que je me produirai en Europe tous les ans dorénavant… voire deux à trois fois par année…
Quelle direction souhaiterais-tu donner à ta musique dans l’avenir ?
Je n’en ai pas la moindre idée… C’était, d’ailleurs, également le cas pour mon dernier album. Je me contente d’écrire des chansons qui sont interprétées par mes musiciens et je regarde ce qui se passe alors.
Quand tu es en tournée, comme cela est actuellement le cas, travailles-tu parfois sur de nouvelles chansons ?
Oui, c’est parfois le cas ! C’est agréable pour moi d’écrire sur la route. Cela est pourtant assez difficile car il faut optimiser au maximum les rares moments de repos entre les trajets, les soundchecks, les concerts etc… Dans ces conditions il n’est, en effet, pas aisé d’être au maximum de sa créativité. Cela m’arrive pourtant parfois…
Qu’est-ce qui t’inspire le plus aujourd’hui ?
Beaucoup de choses différentes… Je crois que la plus grande part de mon inspiration est liée à ma relation avec Dieu. Elle me permet de beaucoup écrire. Sinon, tout ce qui se passe autour de moi peut me donner des idées. Les gens m’inspirent par exemple…Puis j’adore voyager, aller au contact de nouvelles personnes et me faire des amis. D’ailleurs j’espère revenir ici, encore et encore…
As-tu des amis ici en France ?
Oui, j’en ai quelques-uns… Certains sont musiciens… Il est toujours amusant de retrouver des contacts et de constater que les gens vous accueillent avec tant de gentillesse. C’est vraiment très « cool »…Il est très touchant d’être reçu de manière si adorable.
Souhaiterais-tu ajouter quelque chose à l’attention de ton public français ?
J’essaye d’intéresser mes enfants à votre culture. Ils fréquentent, d’ailleurs, une école française à Los Angeles. J’espère que je pourrai venir avec eux d’ici un an ou deux afin de leur faire connaitre ce pays. Peut-être m’aideront-ils aussi à parler cette langue que je ne maitrise absolument pas alors qu’eux la parlent déjà assez couramment. Ils pourront être mes interprètes (rires) !
Tu es né à Fargo, puis tu as vécu à Minneapolis… pourquoi as-tu décidé de te fixer à Los Angeles ? Est-ce lié aux avantages qu’offre cette ville aux musiciens ?
Oui les scènes sont très différentes entre Minneapolis et Los Angeles (rires) !De plus, mon épouse est de Los Angeles et cela a été une très bonne raison pour m’y installer ! Puis, ils n’y fait pas froid, il n’y a pas de neige l’hiver et… la Californie est beaucoup plus jolie que les autres endroits où j’ai pu vivre (rires) ! Musicalement la ville est aussi très différente, même si on y retrouve moins de musique live qu’à Minneapolis. Par contre toute l’industrie de la musique est basée à LA… c’est la vraie ville de l’industrie musicale…
Remerciements : Olivier Garnier (Replica Promotion), Greg Classen (manager de Jonny Lang), Stéphanie Collard et Caroline Hollard du service de presse du Nancy Jazz Pulsations.
www.jonnylang.com
https://fr-fr.facebook.com/JonnyLang
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