Nda : Né de la rencontre entre la chanteuse-joueuse de ukulélé Justine Blue et l’harmoniciste Harold Wolters, Just In Blues Band se développe depuis 2013 dans la région montpelliéraine. Après avoir connu diverses configurations, le groupe s’attache aujourd’hui à la formule trio en compagnie du guitariste Enzo Taguet. Un EP de présentation, « Toxine », bénéficiant de l’expérience du producteur et musicien anglais Neil Conti (connu pour ses collaborations avec de nombreux artistes tels que David Bowie ou Mick Jagger) a mis en exergue la valeur de ces précieuses personnalités. Aujourd’hui, riche d’un 1er Prix raflé lors de l’édition 2017 du Tremplin Blues sur Seine, le combo s’apprête à transformer l’essai avec un attendu premier album. En attendant, il s’évertue à défendre sa musique sur les routes…au contact d’un public qui ne peut être que séduit par la voix et la grâce émanant d’une jeune femme décidemment bien entourée. Des éléments qui ne pouvaient qu’attiser ma curiosité et me pousser à enregistrer l’entretien que voici.
Quels sont vos parcours musicaux respectifs, en amont de la fondation du groupe Just In Blues Band ? 
Harold Wolters : Pour ma part, j’étais clarinettiste et j’ai été membre de nombreux groupes différents. Puis, j’ai arrêté la musique pendant quelques années afin de me consacrer à d’autres projets. En effet, je suis devenu musicothérapeute... C’est en rencontrant Justine que je suis redevenu musicien. Aujourd’hui, cela fait 4 ans que nous travaillons ensemble. A la base, j’évoluais dans un milieu rock et rock progressif. Actuellement, en plus du blues, je fais du reggae et je travaille avec un groupe qui se produit dans un registre d’électro hang. Il s’agit, dans ce cas précis, d’un registre plus « galactique » et aérien…
Justine Blue : J’ai effectué un grand parcours d’autodidacte, en chantant depuis l’âge de 12 ans en solo…dans mon coin. Je m’exerçais quotidiennement avant de m’installer à Montpellier, afin d’y suivre des études en biologie. C’est dans les rues de cette ville, lors de soirées, que j’ai pu commencer à côtoyer des musiciens locaux. Ces derniers étaient, principalement, des amateurs de jazz. Puis j’ai rencontré un monsieur qui faisait du ukulélé et de l’harmonica dans la rue. Je suis, naturellement, allé à son contact. C’est lui qui m’a conduite au blues... Pendant 3 ans, il m’a accueillie au sein de son trio qui était très changeant (s’agrémentant, parfois, d’un bassiste ou d’un saxophoniste). C’est de cette manière, en jouant dans la rue, que j’ai le plus appris. Je me suis, aussi, perfectionnée en me rendant à des jams en compagnie de tous les copains montpelliérain. Je me suis donc, dans un premier temps, consacrée à un blues joué au ukulélé. Mon registre s’est étoffé tout au long de ces 6 années. C’est en rencontrant Harold que l’aventure du Just In Blues Band a démarré.
Enzo Taguet : Je viens d’une école classique, puisque j’étais élève au Conservatoire à Montpellier. J’y étudiais la guitare classique (un instrument non amplifié équipé de cordes en nylon). Au fil de ma scolarité, je me suis fait des amis dont les parents appréciaient le jazz. Ces derniers m’ont sensibilisé à de nouvelles choses. J’ai donc commencé à électrifier ma guitare et j’ai poursuivi mes études (à Toulouse) en musico-jazz. J’y ai rencontré pas mal de gens, avec lesquels j’ai monté divers petits groupes dans une veine jazz-fusion. Je suis revenu sur Montpellier il y a 3 ans où j’ai eu l’opportunité d’assister à un concert du Just In Blues Band dans un bistrot. J’en suis, littéralement, tombé amoureux. Nous nous sommes recroisés, puis j’ai eu la possibilité de l’intégrer alors qu’il se produisait en formule quintet. J’étais, alors, bassiste avant que le combo se transforme en trio et que j’en devienne le guitariste.
Avant d’enregistrer cet entretien, nous évoquions la richesse de la scène musicale montpelliéraine des années 1990. Comment se porte-t-elle aujourd’hui et comment vous situez-vous au sein de cette dernière ?
Harold Wolters : Il s’agissait, effectivement, d’une grosse scène rock dans les années 1980-90 (avec des groupes tels que Les Naufragés, les Négresses Vertes etc.). Aujourd’hui, le jazz y a gagné en ampleur car le Conservatoire et le JAM (école régionale de Jazz et de Musiques actuelles) sont devenus des pôles attractifs pour tous les musiciens. Ils s’y retrouvent et y montent des projets. De plus, il y a une belle dynamique musicale avec des lieux (petites salles, bars…) qui offrent la possibilité de jouer régulièrement. C’est une ville étudiante et, de ce fait, le public se renouvelle sans cesse puisque 30.000 personnes y emménagent chaque année. Ces jeunes se rendent dans ces soirées et, du coup, Montpellier propose un vivier de musiciens qui viennent de la France entière et d’horizons variés. De ce fait, les rencontres y sont intéressantes et on y fait beaucoup de musique !
Le blues a-t-il toujours eu une place au sein de cette scène ?
Justine Blue : Oui, d’ailleurs nous nous produisons à Montpellier presque toutes les semaines. Il y a 3 ou 4 autres groupes qui y tournent aussi beaucoup (Pic Saint Blues, Mister Ralf Blues Band...) et une jam blues a été ouverte dans une petite ville (Sommières) située à 20 minutes de Montpellier. Ceci dit, de manière générale, c’est le reggae, l’électro et le jazz qui y ont le plus le vent en poupe…
De par vos parcours respectifs, vos influences semblent assez diversifiées. S’il elle reste très attachée aux sons roots américains, votre musique est le fruit d’un grand brassage. Au final, comment définiriez-vous votre registre ?
Justine Blue : C’est une musique « old school », influencée par ce qui se faisait dans les années 1930 jusqu’aux années 1950 (Elmore James, Sister Rosetta Tharpe…). A titre personnel, j’ai beaucoup écouté la musique des années 1940-50 et les grandes chanteuses de cette période (Sarah Vaughan, Ella Fitzgerald, Dinah Washington, Carmen McRae etc.). Puis, il ne faut pas oublier qu’il y a beaucoup de swing à Montpellier…même si c’est un registre qui est un peu moins utilisé dans notre musique. Nous y mettons, également, une bonne dose de soul.
Dans un premier temps, votre répertoire était essentiellement constitué de reprises. De plus en plus de compositions personnelles s’y greffent aujourd’hui. Pour les écrire, où puisez-vous votre inspiration et que cherchez-vous à évoquer à travers elles ?
Harold Wolters : C’est toujours Justine qui compose et qui écrit les textes. Justine Blue : Nous avons sorti l’EP « Toxine » qui est constitué de 4 compositions personnelles dont j’ai signé les grilles et les textes. Depuis qu’Enzo nous a rejoints, c’est lui qui se charge principalement des compositions. J’y ajoute les mélodies et les textes. Le fait de travailler en « mode band » est vraiment une chose très cool !
Enzo Taguet : Le processus créatif est mixte. Une ligne peut venir de quelqu’un et les accords d’un autre membre du groupe. Nous travaillons, parfois, autour d’un seul riff que nous explorons et que nous faisons évoluer. Le résultat final est souvent la résultante de résidences ou de voyages. Tout vient naturellement, nous ne forçons pas les choses. Les évènements et la vie sont nos moteurs.
Justine Blue : Nous avons envie de faire nos morceaux et, à partir de cette idée, nous tendons forcément vers de nouvelles compositions. Nous savons que ces dernières vont arriver… Nous pouvons être séduits par une multitude de sons. Qu’il s’agisse du bruit de la théière qui brûle sur la gazinière ou celui d’une voiture qui passe…
Vous avez remporté le Tremplin Blues sur Seine. Cette distinction vous a-t-elle aidés afin de lancer définitivement le groupe ?
Harold Wolters : Oui et si nous sommes là aujourd’hui, c’est aussi grâce à ce tremplin. Le fait d’avoir été la révélation 2017 a permis au groupe de trouver une tourneuse et, de ce fait, de multiplier les apparitions sur de beaux festivals (Tracteur Blues, Jazz à Vienne…). Ceci dit, il ne faut jamais lâcher l’affaire. Quand on aime ce que l’on fait, il faut y croire. C’est notre cas, d’autant plus que Justine est dotée d’une forte volonté de concrétiser ses souhaits. Son envie d’avancer nous aide beaucoup. Nous n’en sommes qu’au début de l’aventure…après 4 années passées à forger notre son, notre groupe et notre place sur la scène musicale de Montpellier. Nous sortons, maintenant, de la région Occitanie afin de nous produire dans toute la France. Ceci une chose très positive pour nous ! Le fait de donner cette musique à de nouvelles personnes et d’aller au contact d’autres populations est une chose très importante à nos yeux.
Après ce premier EP, « Toxine », vous vous apprêtez à sortir un nouvel album. En quoi sera-t-il différent de votre précédente production ?
Enzo Taguet : La première chose qui le rendra différent est le fait que le noyau du groupe est, aujourd’hui, devenu un trio. Auparavant, c’est 5 personnes qui arrangeaient les morceaux ensemble… Nous inviterons d’autres musiciens sur ce disque et, de ce fait, il sera esthétiquement différent. Il y aura plus de diversités en termes d’instrumentations et nous fignolerons davantage nos arrangements.
Cette formule de trio vous semble-t-elle définitive ou pourriez-vous encore faire évoluer la configuration de votre groupe ?
Harold Wolters : Depuis 4 ans, avec Justine, nous avons joué en duo, en trio, en quintet (à deux reprises à chaque fois) et nous sommes à nouveau en trio. Notre configuration est donc très variable. De plus, c’est Justine qui est la base principale du groupe. C’est pour cette raison, d’ailleurs, que nous nous appelons Just In Blues Band. Elle est notre élément fondateur et central. Son envie est, je le sais, d’avoir des musiciens. Il n’est, de ce fait, pas impossible qu’une section de cuivres s’adjoigne à nous dans le futur. Il pourrait très bien y avoir, aussi, un batteur. On ne sait pas comment cela pourrait se passer. Les envies, c’est comme dans la vie…ça arrivera si ça doit arriver.
Justine Blue : Oui, si nous pouvons avoir la possibilité de jouer avec un batteur, des chœurs ou des cuivres…cela pourrait être cool ! Cependant, j’apprécie particulièrement cette formule ergonomique du trio. Elle nous permet de nous produire dans toute la France. Il nous suffit d’une voiture pour pouvoir nous éclater !
Enzo Taguet : Cela nous permet également de développer une atmosphère intimiste. Si notre musique est amplifiée, nous n’utilisons ni batterie ni basse. Ce n’est pas du « loud ». Avec un harmonica, une voix versatile et une petite guitare nous amenons une chose intéressante. C’est de cette manière que je le vis…même si j’aime aussi lorsqu’il y a une grosse « pulse » derrière.
Quels sont vos espoirs en ce qui concerne l’avenir de Just In Blues Band ?
Harold Wolters : Nous espérons, tout simplement, réussir ! Notre but est de continuer à avancer et de faire le plus de concerts possible. C’est là que nous sommes le mieux… C’est lorsque nous sommes sur scène et que nous jouons notre musique. Cela fait 30 ans que j’en fais et je continue à prendre mon pied lorsque je suis devant un public. Comme tout le monde, je paie des impôts et il faut que je bouffe. Nous sommes musiciens et, à ce titre, nous sommes là pour dire des choses et donner des émotions à des moments donnés. J’espère que nous pourrons continuer cela le plus longtemps possible…
Souhaitez-vous ajouter une dernière chose à cet entretien ?
Justine Blue : En ce qui me concerne, l’espoir serait de continuer à bouger hors des frontières de Montpellier…voire de celle de l’hexagone. Le tout avec un aussi bon accueil qu’à Munster aujourd’hui. Cela change des bars de notre région d’origine (rires) ! Je nous souhaite tout simplement du bon son, de la bonne créa et de belles rencontres…
Remerciements : Jean-Pierre Vignola
www.justinbluesband.com
https://fr-fr.facebook.com/justinbluesband
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