Kim Wilson
L'émission "blues" de radio RDL Colmar animée par Jean-Luc et David BAERST

 

Kim, pensez-vous rejouer, un jour, avec Jimmie Vaughan (membre fondateur des Fabulous Thunderbirds qui n'est plus membre du groupe, Nda) ?
Nous avons un nouveau projet ensemble, un hommage à Jimmy Reed (" Jimmy Reed Highway " distribué par Ruf records en Europe, Nda), dont l'enregistrement est terminé. Ce sera un disque réunissant Jimmy, Omar Dykes (du groupe Omar and The Howlers, Nda) ainsi que moi-même.

Nous avons 4 dates de prévues, pour le moment. L'une au Festival de Long Beach, deux au Club Antone's à Austin et la dernière à la House of Blues de Dallas. Je ne sais pas encore si nous aurons d'autres concerts et si nous pourrons venir en Europe avec ce show…

Que devient le Club Antone's depuis la disparition de son propriétaire, Clifford Antone ?
Le Club survit…
Il n'y a, certes, plus de grands artistes qui y passent comme à ses débuts où on pouvait y voir Muddy Waters. A titre personnel, mon plus gros problème est que j'ai perdu mon ami Clifford…

Nous y faisons des choses pour célébrer sa mémoire et à chaque fois qu'ils me demanderont d'y jouer, j'irai! (C'est la sœur de Clifford, Susan, qui manage le Club actuellement avec quelques partenaires, Nda)
A chaque fois que j'y vais, j'essaye encore d'effacer mon nom des murs des toilettes (rires).

Quand est-il du prochain album des Fabulous Thunderbirds ?
Nous avons enregistré de nombreux morceaux pour le prochain disque du groupe. Il y a des titres avec Kid Ramos, avec Kirt Fletcher et d'autres avec Johnny Moeller qui rejoint parfois le groupe (c'est le frère de Jay Moeller, qui est actuellement le batteur du groupe, Nda).

Il y a, de ce fait, beaucoup de choses à trier dans tout ce matériel et cela peut prendre un moment.
J'espère, tout de même, que nous pourrons le sortir assez rapidement.

De nombreux guitaristes sont passés par le groupe, pouvons-nous considérer les Fabulous Thunderbirds comme une "école de guitaristes" ?
Ce serait plutôt une porte tournante par où on sort et on rentre (rires)!
Aujourd'hui nous avons Nick Curran qui est jeune et qui commence à prendre beaucoup de maturité.

Il a cependant d'autres goûts musicaux et je sais que les Fabulous Thunderbirds n'est, pour lui, qu'un groupe de passage. Il est temps pour lui de faire autre chose, j'adorerais le voir dans des grands Festivals faire son propre truc…

Nous avons aussi, depuis quelques temps, Johnny Moeller qui a beaucoup mûri à nos côtés. Avec son frère, Jay, à la batterie ça fonctionne très bien et j'ai vraiment hâte de tourner avec lui.
J'espère que cette nouvelle formation va durer…

Ma seule crainte est de me retrouver un jour en panne de guitariste, mais je ne le crois pas (rires) !
J'apprécie le fait que mon groupe ne soit pas fermé. Chacun peut mener sa carrière de son côté…
Nous venons de tourner un mois complet ensemble, ce qui est exceptionnel…

Vous êtes l'un des rares musiciens blancs à avoir été invité par BB King pour son disque " Blues Summit ", avez-vous une anecdote sur l'enregistrement ?
Oh oui j'en ai beaucoup dont une, en particulier, que je ne peux vraiment pas raconter (rires), John Lee Hooker était aussi impliqué dans cette histoire !
Il ne faut pas être impressionné par ce genre d'évènements. Il faut le vouloir et avoir des standards assez élevés pour jouer cette musique, quelque soit la couleur de votre peau.

J'ai eu l'occasion de jouer avec Muddy Waters, Eddie Taylor, Jimmy Reed, Albert Collins, Luther Tucker, Pee Wee Crayton, Jimmy Rogers etc…
Ce qui intéressait ces gens là, ce n'était pas la couleur de ma peau, c'était combien j'étais impliqué dans leur musique…

Eux-mêmes étaient très enthousiastes du fait que j'ai une telle envie de me donner à leur musique.
Si j'ai acquis de la confiance, en tant que musicien de Blues, c'est grâce à eux car ils ont reconnu en moi le talent de le faire.

C'est pour ça que les vieux Bluesmen sont toujours touchés lorsqu'ils s'aperçoivent que de jeunes enfants écoutent leur musique…
C'est exactement ce qui s'est passé dans les années 1960 quand tous ces mecs ont été redécouverts particulièrement, ici, en Europe. Pour eux, c'était époustouflant de voir que des gens, sur ce continent, connaissaient leur musique et voulaient les voir. Quand ils ont commencé, la popularité de leur musique était très locale. Soudain elle ne se contentait plus des gamins du voisinage…

La grande différence, pour moi, entre les américains et les européens est que les européens sont plus attachés aux traditions. Les américains doivent toujours vivre l'instant présent alors que les européens ont beaucoup plus les pieds sur terre.
Un américain est quelque un de fier dans son travail, un européen est fier de ce qu'il fera après…

Je suis aussi touché par cette culture de transmission des acquis de génération en génération…
En plus c'est très bon pour moi (rires) !


Que pensez-vous des musiciens qui amènent des technologies actuelles, comme les boucles électroniques, dans le Blues ?
Je ne pense pas que l'on puisse faire cela dans le Blues.
Ceux qui sont allés le plus loin dans cette démarche sans que cela nuise au Blues sont des gens comme Little Milton ou Albert King qui y ont ajouté un " beat " Soul…

Les artistes qui disent faire du Blues " progressif " ne prennent du Blues traditionnel que ce qu'ils en comprennent. Je ne pourrais jamais faire cela…
Ils essayent de vendre cela comme du Blues mais cela n'en est plus…

Si tu prends la tradition et que tu en retires ce qui en fait les origines pour y ajouter des petits machins rigolos ce n'est plus le même truc.
Des gens comme Muddy Waters ont " écrit le livre", aujourd'hui ont peut essayer d'y ajouter une page ou un chapitre mais on ne peut pas écrire un nouveau livre.
Quelqu'un qui refuse de connaître la tradition ne devrait même pas avoir le droit d'essayer de faire progresser cette musique.
C'est vrai pour n'importe quelle musique…

Ne pensez-vous pas, pourtant, que certains albums des Fabulous Thunderbirds peuvent paraître " progressifs " ?
Peut être mais si tu prends le Blues, la Soul, le Rock'n'roll, la Country, ces musiques vont bien ensemble car elle ont quelque chose en commun.
Nous avons parfois essayé d'aller un peu plus loin dans nos recherches mais nous l'avons fait avec d'excellents musiciens qui sont ancrés dans ces musiques. Donc ils peuvent se permettre de pousser, parfois, le bouchon un peu loin…

D'autant plus qu'ils le font toujours à partir des racines!
J'aime beaucoup ces enregistrements même s'ils n'ont pas été bien reçus par les amateurs.

Êtes-vous conscient d'avoir pris la place des grands maîtres de l'harmonica aux yeux des jeunes générations. Cela ne vous dérange-t-il pas de vous faire piquer vos plans par les nouveaux harmonicistes ?
Cela ne me pose aucun problème, j'en suis même fier!
Si des jeunes me voient, aujourd'hui, comme moi je voyais mes maîtres, à l'époque, cela veut dire que j'ai fait quelque chose de ma vie.

J'ai joué, il y a peu, avec James Cotton…
C'est moi qui ai joué avec lui et pas l'inverse… c'est lui le maître!

Si je peux transmettre quelque chose aux jeunes, tant mieux!
C'est ce que j'ai voulu faire toute ma vie…

Vous êtes l'un des rares harmonicistes contemporains à posséder votre propre son…
Oui mais c'est le résultat de beaucoup d'influences que j'ai assimilées…
Au bout d'un moment c'est ma propre improvisation qui est sortie.
Aujourd'hui, après de nombreuses années, j'en suis arrivé au point où je peux vraiment jouer.

Que pensez-vous de la série, de films sur le Blues, produite par Martin Scorcese ?
L'essentiel est que cela amène des gens vers le Blues…
Je ne suis pas toujours convaincu du résultat final, y compris pour le film dans lequel je figure, mais si cela permet aux gens de prendre conscience de l'historique du Blues ça me va !
Ce qui est bien c'est que ce soit Scorcese qui ait été impliqué dans ce projet.

Pouvez-vous nous parler de " Kim's mix " ?
Il s'agit de 117 morceaux enregistrés en analogique et en une prise directe, sans overdub.
Des musiciens fabuleux comme les frères Moeller, Junior Watson, Kid Ramos, Larry Taylor, Rusty Zinn y ont participé…
C'est le top des musiciens du genre. Quand ces gens là seront partis, ce sera difficile d'assurer une relève.

Je suis propriétaire de ces morceaux et je ne veux pas m'enquiquiner avec des maisons de disques.
Si vous en parlez à des gens, dites simplement www.bluebeatmusic.com
Concernant le son de ces bandes, je peux vous dire que ça plait à Larry Taylor qui est réputé pour ne pas aimer grand-chose, c'est donc un sacré critère (rires) !

Qu'écoutez-vous, comme musiques, au quotidien ?
James Cotton, B King, Telonious Monk, Miles Davis, Otis Redding, Little Richard, Muddy Waters, Little Walter, Sonny Boy Williamson…

Et dans les productions actuelles ?
Rien, je n'écoute que les morts (rires) !

www.fabulousthunderbirds.com

 
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fabulousthunderbirds.com

Interview réalisée au Cognac Blues Passions - le 27 Juillet 2007

Propos recueillis par David BAERST

 

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