Knuckle Head
L'émission "blues" de radio RDL Colmar animée par Jean-Luc et David BAERST

Nda : Jack « le barbu » et « Jock « le barbouillé », selon les dires de leurs fans, apportent quelque chose de nouveau. Leur groupe, Knuckle Head, a quoi qu’il en soit déjà gagné un pari. Celui de proposer une musique qui plait à toutes les générations. Pourtant cette dark country (sorte de Mad Max sonore revu et corrigé à la sauce western) est encore loin d’avoir pignon sur rue dans l’hexagone. Gageons qu’avec ce duo, né pour le plaisir personnel de ses deux membres, cela ne soit que de courte durée et que la pureté de ce mélange (qui navigue entre traditions roots et déluges sonores) s’installe définitivement dans nos quotidiens. A l’heure de l’Auto-Tune utilisé à outrance, c’est tout le mal que nous pouvons nous souhaiter…

Quels sont vos cursus musicaux respectifs, en amont de la création de votre duo ? 66
Jack : J’ai commencé l’apprentissage de la guitare à l’âge de 7 ans. Mon professeur était Pierre Specker, qui est très connu dans le sud de l’Alsace. Ce dernier m’a familiarisé avec la country music mais, à ce moment-là, je n’aimais pas du tout ce registre. Il m’a cependant fait admettre que le simple fait de savoir en jouer permet d’aborder tous les styles à la guitare. Cela s’est avéré juste et m’a été utile lorsque je me suis plongé dans la musique métal. J’ai, également, été membre de quelques formations au sein de mon village. Nous donnions un concert par an et reprenions des titres du répertoire de Green Day par exemple…
Jock : A la base j’aimais la country parce que je ne voulais jamais ressembler aux autres. J’ai toujours voulu sortir du lot… Le fait d’aimer la country pouvait laisser penser que j’étais original, en décalage avec mon époque. Cependant, à force d’en écouter, c’est complètement devenu mon style musical préféré. Les gens qui me voient sont, souvent, surpris lorsqu’ils apprennent que je suis, avant tout, un fan de country. Assumant parfaitement la chose et mon côté « visuel », tout passe tout seul…

Je pense que tu as, aussi, été touché par le côté rebelle de cette musique. Aux Etats-Unis les fers de lance de ce registre, sous un aspect parfois conventionnel (ils pouvaient passer dans de grandes émissions de télévision en se présentant de la plus belle des manières), vivaient une vie pour le moins « décousue » (Hank Williams était alcoolique, George Jones se droguait…). Ce côté « outlaw » est-il aussi important que la musique à tes yeux ?
Jock : Si j’étais déjà fan de Johnny Cash avant, c’est le film qui lui a été consacré qui m’a renforcé dans ce choix (« Walk The Line », sorti en 2005 et réalisé par James Mangold, nda). J’ai tout repris à mon compte… Le fait qu’il en chie pour réussir dans la musique, le fait qu’il s’habille en noir et le fait que, lui aussi, prenait beaucoup de merdes. Quand quelqu’un vit une telle existence, on dit qu’il est rock’n’roll. Je pense qu’on pourrait très bien dire qu’il est country. Les musiciens qui s’expriment dansce style ont, en effet, souvent des modes de vie très extrêmes. C’est une chose qui m’a complètement « rendu fou ». De plus, la country est aimée par des gens dont l’âge varie entre 7 et 77 ans. J’aime cette particularité. C’est formidable de voir des personness de toutes les générations s’éclater au rythme de cette musique. Je trouve cela génial !

Jack, après un passage par la case métal, qu’est-ce qui t’a poussé à te replonger dans une registre très inspiré par le mouvement country ?
Jack : A un moment, j’avais un groupe qui reprenait du Metallica et du Scorpions. Au bout d’un certain temps, j’ai trouvé que cette musique était trop « propre », qu’elle manquait d’aspérités et de rugosité. Dans le métal, chaque solo de guitare est très « chirurgical ». Ce que j’aime le plus dans la musique, c’est quand rien n’est logique. Il faut que ça vienne du cœur et que ce soit le plus brut possible. C’est dans les vieux groupes de rock que j’ai trouvé cet aspect qui me manquait, qu’il s’agisse de stoner ou de country. Il y a deux ans, j’ai rencontré Jock. Il était bien davantage immergé dans la country que moi. C’est à ses côtés que j’ai réappris tout ce qui m’avait été enseigné à l’âge de 7 ans. Tout cela était resté dans un coin de ma tête. C’est revenu très naturellement et c’est ainsi qu’est né Knuckle Head…sur des bases beaucoup plus roots.

Votre rencontre est encore toute fraiche, elle remonte à un peu plus de 2 ans. Quelles ont été les circonstances de cette dernière ?
Jack : Nous nous sommes rencontrés, par hasard, dans un bar. Jock avait un saucisson assez dur devant lui. Moi j’avais un couteau vraiment pas mal dans ma poche. C’était exactement l’ustensile qui lui été nécessaire pour être heureux (rires). Puis, il a regardé ma veste à patchs. L’un d’eux évoquait le groupe Black Label Society que j’aimais bien à l’époque. Il le voulait absolument et m’a proposé 200 balles pour l’obtenir. Je pensais qu’il était bourré et je le lui ai proposé pour 100 balles. Le lendemain, ce « con » me l’a acheté à ce prix. A la vue de son look, j’ai souhaité en savoir plus sur lui car je le trouvais un peu « spécial ». Du coup, nous avons pris un café et, à force de parler, nous nous sommes aperçu que nous avions plein de choses en commun. Je venais d’acheter ma moto et je voulais obtenir quelques conseils de sa part. Je voulais aussi savoir comment fonctionnent les clubs de bikers. Il m’a tout expliqué et déconseillé de rentrer dans un club. Sur le mur du bar, il y avait une guitare…il a commencé à en jouer. Je me suis dit « waouh », ce gars n’a jamais pris de cours (car sa technique est très particulière) mais il a quelque chose en lui. Il ne savait pas encore que j’étais guitariste mais, en faisant notre premier « bœuf », il s’est passé un truc de particulier. J’ai ressenti une chose que je n’avais jamais ressentie avec un autre musicien. Nous nous sommes mis à parler par la musique…66

Vous aviez, pourtant, des influences assez différentes. Sur lesquelles vous êtes-vous retrouvés ?
Jack : Je possédais toujours cette base country et blues. La base de notre musique est la gamme du blues. C’est ce que nous avions en commun dès le départ et c’est pour cette raison que nous nous comprenions musicalement. Il faisait la rythmique et j’ajoutais des solos par-dessus. A cette époque là, je ne chantais pas du tout. C’est à force de jouer dans les bars que les gens nous ont dit que nous devrions faire un groupe. C’est ainsi que l’aventure a débuté…

Le blues est une composante essentielle de votre musique. Quels sont les artistes, propres à cet idiome, que vous préférez ?
Jock : J’écoute de la musique toute la journée et lorsqu’on me pose cette question…je n’arrive jamais à répondre. Nous aimons Chuck Berry et ACDCqui, pour moi, est un vrai groupe de blues. ZZ Top est, aussi, très particulier à mes yeux…

Vous êtes un duo. Cependant, l’idée d’adjoindre d’autres instrumentistes à Knuckle Head a-t-elle effleurée votre esprit à un moment ou à un autre ?
Jack : Cette idée nous a, effectivement, effleurés mais elle est repartie tout aussi vite. Nous sommes bien à deux. L’entente musicale fonctionne de telle manière que je n’ai pas envie de revenir à des formules de 5 ou 6 musiciens comme j’ai pu en connaitre dans le passé. De plus, tout est beaucoup plus simple. Ne serait-ce qu’au niveau logistique… Ce n’est pas la peine de compliquer les choses, d’autant plus que cette configuration colle parfaitement à notre registre musical. Nous travaillons de telle manière que nous n’avons pas besoin de bassiste sur scène. En plus, le fait de sortir un son aussi massif à deux fait parler. Ce concept est original et nous nous devons de jouer là-dessus.

Knuckle Head est considéré comme un groupe de dark country. Quelle est la définition que vous donnez à ce registre ?
Jock : Jack possédait des bases country qu’il a perdues au fil que son âge avançait. Il s’est, alors, plongé dans le hard rock et le stoner. Cependant, cette base ineffaçable il l’a toujours eue en lui. Moi, je suis un inconditionnel de country et nous avons fait en sorte de mêler tout ce que nous aimions. A mon sens, cette dark country dont tout le monde parle est, avant tout, du stoner country. Bref, une country boostée avec boisson énergisante hyper concentrée. Il faut que les refrains « pètent à mort » et que les couplets soient teintés par ce fameux groove propre à la country. Avec le chant clair, parfois un peu éraillé, de Jack ça passe tout seul. Nous y ajoutons, bien sûr, cette petite touche blues…
Jack : Ce côté « bad boys » fait contraste avec l’image que l’on donne, actuellement, à la country music. Pour nous, cette musique ne se résume pas aux personnes qui pratiquent la danse en ligne. Elle est tellement plus riche et plus sombre, que ce soit dans les paroles ou dans les accords.

Etes-vous influencés par des groupes tels que 16 Horsepower qui se sont, eux aussi, plongés dans cet univers musical ?
Jack : Oui, complètement ! Il y a, aussi, un gars qui s’appelle Blues Saraceno…ce qu’il fait est énorme. Sa discographie, à elle seule, reflète parfaitement ce qu’est la dark country.
Jock : Il faut bien comprendre que la dark country se développe à peine. Cette musique grimpe aux Etats-Unis mais elle n’en est qu’à ses balbutiements en France. Il s’agit d’une branche du swamp rock ou du rock sudiste. A ce jour, en dehors de nous, nous ne connaissons aucun groupe français qui se soit impliqué dans cette musique. Au lendemain d’un concert, un journal avait qualifié notre prestation par le terme « indescriptible ». Cela démontre que de nombreuses personnes ne connaissent pas encore ce mélange qui fait que tu peux avoir un gros côté « bourrin »…tout en possédant du groove.

Il y a une véritable imagerie qui s’associe à votre musique. Le simple fait de vous voir est un régal, tant vos looks sortent des sentiers battus. Pouvez-vous me parler de l’univers qui vous entoure ?
Jack : Je l’imagine tel un western moderne. J’aime les chevaux mais nos chevaux à nous sont des bécanes.
Jock : Nous possédons ce côté dégueulasse à la Mad Max (avec ses motos rouillées) et ne crachons pas sur ce que dégage la série « Walking Dead » avec son aspect apocalyptique. C’est cet univers que nous pensons exploiter dans le cadre de nos futurs clips. Nous ne rentrerons jamais dans un cliché. Tout cela parce que nous sommes des français qui visent un style américain. Des gens qui sont « lookés » comme Jack et moi, aux Etats-Unis, il y en a la « race ». Nous, en tant que français, nous sortons du lot…

« First Ride » est votre premier EP. Pouvez-vous me le présenter ?
Jack : Tout évolue si rapidement que ce disque ne reflète plus ce que nous faisons actuellement. Lorsque le groupe a débuté, nous étions deux guitaristes qui faisaient la batterie au pied. Cela nous limitait au niveau des scènes et des compositions. Aujourd’hui Jock est totalement à la batterie et j’ai repensé les morceaux, afin de pouvoir les jouer seul à la guitare. Nos chansons se sont donc améliorées au fil du temps et à force de concerts. Nous avons enregistré l’EP nous-mêmes, dans une cave dégueulasse. Mon bureau était un seau renversé avec un sac de terreau qui me servait de fauteuil (rires) !

De quelle manière vos compositions sont-elles venues à vous ?
Jock : Comme j’étais guitariste avant d’être batteur, je pense que j’ai amené notre touche country alors que Jack est notre apport en termes de rock et de stoner. Maintenant, il n’y a plus que lui qui créé la mélodie…car il s’est, complètement, replongé dans la country. Je me charge simplement de l’aiguiller sur certains points. Nous composons chacun les parties de nos instruments respectifs. Pour cela, le fait d’être un duo simplifie les choses…c’est vraiment un avantage !
Jack : Pour la base de nos chansons, je m’inspire souvent de Jock. Je rajoute ma touche à certains riffs qu’il a élaborés. Il ajoute la batterie à mes parties, nous arrangeons le tout avant d’y mettre des paroles. Pour l’instant nous faisons absolument tout nous-mêmes…

Votre concept tend à s’étendre puisque vous avez lancé Knuckle Rocks Prod. Quel est l’objectif de cette structure ?
Jack : Nous enregistrions nos musiques dans une cave dégueulasse et, grâce au public et à notre travail, nous avons pu évoluer. Ainsi, nous avons pu investir dans du matériel de très bonne qualité. Nous avons, également conçu un studio de nos mains…avec le soutien de nos parents. Je suis développeur informatique de métier mais le son m’a toujours intéressé. Dans ma tête, tout est trop logique. J’ai besoin de faire quelque chose d’artistique…sinon je « pète des câbles ». Faire de la musique et m’occuper de son aspect technique est exactement ce qu’il me fallait. Je prends du plaisir à faire cela, j’essaye d’évoluer à mon rythme et sans prétention… Nous avançons et c’est ainsi qu’est né Knuckle Rocks Prod. Une structure qui nous permet d’aider des potes qui se lancent dans la musique. Ensemble, nous avons créé une véritable communauté…

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Interview réalisée au
Studio RDL - Colmar
le 24 janvier 2018

Propos recueillis par David BAERST

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