Nda : Doté d’un parcours pour le moins polymorphe, qui l’a conduit de la musique à la littérature ou encore de la production à l’animation d’émissions de télévision, le pianiste Laurent de Wilde se positionne définitivement comme un aventurier du jazz. Son parcours, placé sous le signe de l’intelligence, de l’éclectisme et de l’esthétisme, le conduit aujourd’hui (entre autres) à collaborer avec des musiciens venus d’horizons divers (le chanteur Sly Johnson, le batteur André « Dédé » Ceccarelli et le bassiste Fifi Chayeb) au sein du concept WEARE4 qui entremêle avec bonheur le jazz à la soul music et à l’human beatbox. Une occasion de découvrir l’artiste sous un nouveau jour et, surtout, de le rencontrer quelques heures avant qu’il ne rejoigne ses comparses sur scène, dans le cadre de l’édition 2019 du Colmar Jazz Festival. Un moment « gourmand », enregistré à l’heure du thé, durant lequel la passion du musicien ne s’est effacée qu’au profit d’une profonde gentillesse.
Laurent, aujourd’hui (et plus que jamais depuis la sortie de votre album « New Monk Trio » en 2017), votre nom est associé à celui de Thelonious Monk. A quand remonte votre admiration pour ce pianiste natif de Caroline du Nord ?
Je l’ai découvert alors que j’étais assez jeune, puisque je devais être âgé de 13 ou 14 ans. C’était dans le cadre d’un camp musical, dédié au registre classique, où il y avait une classe de jazz et une autre de synthèse de sons. Parmi les enseignants, se trouvait un pianiste de jazz qui portait une veste à carreaux, des lunettes et qui avait le crâne dégarni. C’était vraiment l’archétype du pianiste de jazz (rires) ! Il m’a demandé si j’aimais ce registre et je lui ai, bien sûr, répondu par l’affirmative. Il a alors voulu savoir si j’appréciais Monk et ma posé des questions du type : « Et Monk, c’est du poulet ? ». Je pensais qu’il racontait des craques et qu’il s’agissait là d’une pauvre vanne. Puis il a commencé à jouer du Monk et c’est ainsi que j’ai découvert Thelonious. Par cette blague un peu ambigüe que je ne savais pas comment prendre... D’ailleurs c’est ça Thelonious ! On ne sait jamais si c’est pour rire ou si c’est sérieux. Au final, je crois que c’est les deux en même temps. Par la suite, quand j’ai commencé à écrire mon livre sur lui, j’ai vraiment sorti le microscope.
Vous êtes trop jeune pour avoir connu les grandes heures de Saint-Germain-des-Prés ; vous avez découvert le « Paris Jazz » à l’aube des années 1980 dans le quartier des Halles. Ceci par l’intermédiaire du club Le Petit Opportun. Pouvez-vous revenir sur cette période ?
Mais oui ! J’étais étudiant jusqu’en 1981. A cette époque, Paris était un peu une « ville morte » en termes de jazz. Il n’y avait pas beaucoup d’endroits où il était possible d’en écouter en dehorsdu Dreher et du Petit Opportun. Le dernier endroit cité me faisait un peu peur avec son patron, Bernard Rabaud, qui avait une grosse moustache et une grosse voix. Il disait que le Miles Davis période électrique était synonyme de merde et des choses comme celles-ci. Du coup, je trouvais que l’ambiance générale du « Paris Jazz » de cette période n’était pas très « friendly ». Je suis parti aux Etats-Unis en 1983, afin d’y intégrer une école de musique. Quand je suis revenu 8 ans plus tard, en 1991, la scène avait entièrement changée.Le Duc des Lombards ou encore Le Sunset s’étaient développés de manière très appréciable. Il y avait une flopée de guitaristes qui ont poussé comme des champignons. Ils sonnaient tous comme Pat Metheny. C’était vraiment « monstrueux ». Ils utilisaient, par exemple, tous les mêmes effets… J’ai commencé à beaucoup jouer, notamment au Petit Opportun au sein de l’orchestre de Barney Wilen (jusqu’à la disparition de ce dernier). On trouvait aussi, à Saint-Germain-des-Prés, toute une petite communauté qui se fréquentait dans des clubs tels que La Villa, Le Latitude, Le Furstenberg, Le Bilboquet etc. Je trainais et jouais dans tous ces endroits… Aujourd’hui plus rien n’existe, tous ces lieux sont fermés… Puis, il y avait effectivement la Rue des Lombards (Sunside-Sunset…) ou le New Morning dans le Xème Arrondissement. Donc, dans les années 1990, Paris était devenue une capitale absolument géniale pour le jazz. C’était vraiment formidable !
Votre vie est faite d’allers et de retours entre les Etats-Unis et le Vieux Continent. Vous êtes né à Washington, avez grandi en France puis êtes retournée aux USA. Quel y a été votre cursus musical, notamment au sein de l’école que vous évoquiez précédemment ?
J’étais à la Long Island University sur le campus de Brooklyn. Cette école avait, plus ou moins, comme vocation de former des infirmières et des infirmiers ! On y trouvait aussi un petit département de jazz qui était assez révolutionnaire à l’époque. En effet, son principe allait être exploité par la suite par la New School. En effet, il y avait un petit noyau d’enseignants et des intervenants ponctuels. Comme New York est un réservoir « monstrueux » en termes de musiciens, nous étions particulièrement gâtés. Il y avait donc des cours d’arrangements, de piano ou d’histoire de la musique et, parallèlement à cela, on pouvait prendre des leçons spécifiques avec des intervenants choisis au préalable. Comme je voulais apprendre avec Mulgrew Miller, j’ai pu réaliser ce souhait (rires) ! L’Université m’a donc payé Mulgrew pour qu’il me donne des cours ! Chaque semaine, il y avait une session big band avec (à chaque fois) un nouvel arrangeur ou compositeur qui venait avec ses partitions. Il pouvait aussi bien s’agir de Joe Henderson, deTito Puente, que de Michael Brecker… Nous avions, chaque semaine, une chance incroyable puisque nous étions pris en mains par des artistes dont je voyais les noms sur des pochettes de disques. Des gens que je vénérais plus que tout ! Ces derniers venaient tranquillement, sortaient leurs partitions et nous faisaient jouer leurs compositions. C’était vraiment un bon programme…
C’est aux Etats-Unis que vous avez intégré le groupe du trompettiste Eddie Henderson. Pouvez-vous revenir sur cette période et, surtout, sur ce personnage un peu trop méconnu du grand public ?
Eddie faisait, justement, partie des musiciens qui étaient responsables des petits ensembles au sein de cette école. Il s’occupait de celui dont j’étais l’un des 5 ou 6 membres. Je connaissais les albums qu’il avait enregistrés avec Herbie Hancock ou ceux qu’il avait réalisés en solo par la suite. Je me suis véritablement frotté les yeux quand j’ai vu que c’était lui, le grand Eddie Henderson, qui était responsable de mon petit ensemble. Il m’en reste un souvenir merveilleux… Nous sommes devenus copains rapidement. A ce moment là il était en fin de carrière… Son parcours est étonnant car il était également psychiatre et il a eu d’importants problèmes avec la drogue comme de nombreux jazzmen. Quand il est venu enseigner à Brooklyn, il est allé vivre chez sa mère (il était, auparavant, installé à San Francisco où il a connu son immense ascension…puis sa descente vertigineuse) qui était danseuse et chanteuse. C’est, d’ailleurs, elle que l’on voit sur la vidéo de Fats Waller, « Ain’t misbehavin’ » (issue du film « Stormy Weather » réalisé par Andrew L. Stone en 1943, nda). C’est un type extrêmement drôle et intelligent. Son beau-père était le médecin soignant de Mile Davis. Il a vraiment grandi au milieu du jazz. Il a toujours 700 histoires drôles à raconter, il est vraiment désopilant. Il m’appelle encore tous les 3 mois d’où qu’il soit dans le monde. Il me surnomme toujours Ignatz car, sur le premier album que nous avions enregistré ensemble (« Off The Boat », 1988, nda) j’avais écrit un morceau titré « Ignatz’s brick ». Il s’agit d’une référence aux bandes dessinées « Krazy Kat » crées par George Herriman qui, dans son domaine, avait 50 ans d’avance sur les autres auteurs de BD. C’est toujours l’histoire d’une méchante souris qui lance une brique à la tête du chat (Krazy Kat) qui, lui, est absolument fou amoureux du petit rongeur. Il croit qu’il s’agit là de gages d’amour…Quand j’avais raconté cette histoire d’Ignatz à Eddie, ça l’avait beaucoup fait rire. Depuis, à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit il m’appelle tous les 3 mois et commence la conversation en me lançant : « Hey Ignatz, what’s up with you man ? » (rires) !
Après des collaborations et des séries d’albums avec Ira Coleman, Jack DeJohnette, le niçois Barney Wilen que vous évoquiez précédemment et le succès de votre propre trio dès la fin des années 1990, vous vous êtes lancé dans un jazz résolument ancré dans le XXIème siècle en utilisant des instruments électroniques. Cela représentait-il, pour vous, une continuation musicale logique…craigniez-vous de prendre des risques et de heurter certains amateurs de jazz ?
En tant que jazzman acoustique, je suis conscient que c’est la génération d’Eddie Henderson qui a connu les riches heures du jazz. Un musicien de ma génération est davantage à considérer comme « l’homme qui a vu l’homme qui a vu l’homme etc. ». J’ai l’âge de Wynton Marsalis, un musicien extraordinaire qui a revitalisé le jazz…tout en l’embourgeoisant et en le faisant entrer dans des institutions telles que le Lincoln Center (ou en devenant directeur artistique pour la firme Columbia). Je dois dire qu’il me manquait l’urgence que je pouvais ressentir dans les orchestres de Monk ou de Mingus, qui étaient de la génération d’avant. Par contre, ce qu’il se passait dans l’électronique (drum and bass, la techno allemande minimaliste…) s’appuyait sur des bases qui me parlaient vraiment.
D’ailleurs, la manière de concevoir le rythme en drum and bass est vraiment très jazz (avec les permutations, la vitesse, les idées, les breaks…). C’était une façon de penser jazz par des gens qui n’étaient pas des jazzmen. Je trouvais cela très attirant et intéressant…surtout en le développant en temps réel. En tant que musicien, il était très important à mes yeux de pouvoir vivre quelque chose en temps réel et de ne pas me contenter de jouer de vieux standards. Ceci, malgré tout l’amour que je porte à cette musique. Je voulais, alors, vivre avec la musique de mon temps. Le fait de triturer ces instruments me semblait normal car je suis né dans les années 1960 et j’étais teenager quand la révolution musicale électrique a défilé (Herbie Hancock, Chick Corea, Weather Report, Joe Zawinul, Wayne Shorter…). Tous ces musiciens que je connaissais dans leurs formules acoustiques à travers les disques, je pouvais les voir en France lors de concerts qui utilisaient des sonorisations énormes. Pour moi, il était tout à fait naturel de passer à l’électrique ou à l’électronique parce que j’avais vu ces « grands-frères » faire pareil. Il s’agit, pour moi, d’une procédure normale de maturation chez un musicien de jazz.
Vous parliez de «popularité du jazz ». Regrettez-vous la période durant laquelle ce registre était essentiellement joué dans des « bastringues ». Aimeriez-vous, aujourd’hui, vous produire dans des endroits un peu plus « rough » et sauvages ?
Au début de ma période électro, c’était assez « rough » (rires) ! On passait à 4 heures du matin et tout le monde était chaud bouillant…ça jouait très fort et très vite ! C’était vraiment drôle et sympa… C’est donc une chose que j’ai expérimentée et j’en ai retiré la philosophie suivante. Celle que, même en acoustique, ma musique doit pouvoir un minimum faire bouger les gens.
Puisque nous parlions de musique électronique… Vous êtes allé encore plus loin dans cette démarche en vous adjoignant les services d’un ordinateur (Otisto 23). Que vous a, exactement, apporté cette expérience ?
C’était génial ! Otisto (alias Dominique « Dume » Poutet) est un ingénieur du son extraordinaire (aussi bien en cabine qu’en live). Il est, surtout, un « ordiniste olympique » ! Il doit exister une demi-douzaine de gens sur la planète qui sont aussi compétents, sur l’instrument ordinateur, en temps réel sur scène. C’est vraiment extraordinaire… Nous somme partis dans ce projet après avoir déjà fait pas mal de route ensemble… Au bout d’un moment nous en avons eu marre de la musique vraiment forte. Nous avions pris notre dose de cette scène...
J’avais commencé cette histoire de « piano-ordi » tout seul et je me suis rendu compte que j’étais tellement occupé à jouer de l’ordinateur que je ne jouais plus de piano…ou l’inverse. Bref, j’avais du mal à trouver un équilibre dans cet exercice solitaire et je me suis dit que, au final, le solo c’est mieux à deux ! J’en ai donc parlé à Dominique qui était très intéressé par la chose et qui commençait justement à faire de l’ordi en live. Nous sommes entrés dans cette expérience dont le principe était de faire des boucles et de les traiter en direct. Je jouais par-dessus, jusqu’à ce que je refasse d’autres boucles. Nous avons fait trois albums ainsi. Le premier (« PC Pieces », 2007) était assez instinctif et nous avions la trouille que le processeur se transforme en fumée dans l’ordi car nous « tirions » vraiment au maximum. Nous en avons fait un deuxième (« Fly ! », 2010) puis un troisième (Fly Superfly », 2014) sur lequel nous sommes allés jusqu’au bout. Puis nous avons été lassés de ce procédé qui consiste à faire des boucles. Sur les deux premiers disques, la musique se construisait vraiment en temps réel (je jouais quelque chose en boucle, puis Otisto 23 l’isolait avant que je ne traite la suivante et ainsi de suite). Au final, c’était toujours la même dramaturgie.
De ce fait, sur le troisième, nous nous sommes pris 3 jours pour enregistrer tous les sons de piano possibles. Nous les avons mis dans la « boite » afin de les sortir comme nous le voulions. J’ai l’impression que nous sommes allés au bout de notre démarche et nous en sommes restés là. Personnellement, je caresse un projet électrique mais sans ordinateur. Ceci pour sortir de la logique de ce dernier qui est, quand même, un drôle « d’ordonnateur ». Il met, parfois, un peu trop d’ordre… Du coup, je préfèrerais revenir à du live en étant 3 à 4 musiciens sur scène. Ceci avec des machines aux pieds ou aux mains…mais par d’ordinateur !
Après cette expérience, vous nous avez offert un retour à l’acoustique en collaborant avec un autre pianiste légendaire…Ray Lema (album « Riddles », 2016). En quels termes cette nouvelle aventure musicale vous a-t-elle enrichi ?
Ray…c’est une autre galaxie du piano ! Déjà, il joue de cet instrument sans bouger. Si je n’entendais pas ce qu’il joue, je ne me rendrais pas compte de ce qu’il fait. Il est absolumentimpassible. C’est un maître percussionniste et la manière dont il approche le piano est très percussive. Il joue aussi bien de la guitare que du piano, il chante, il est un excellent percussionniste…pour lui la musique est un « truc » très vaste. Il joue d’un piano qui est très différent du mien et, du coup, nous sommes très compatibles. J’adore me pencher derrière son épaule et voir ce qu’il fait. Dès que j’ai appris un petit truc de lui, il démoli tout en me montrant la deuxième ou troisième voie. Il me dit alors qu’il fait cela de temps en temps, qu’il s’agit d’une variation (rires) !
Ce soir, vous serez sur scène en tant que membre du quartet WEARE4 (aussi constitué du chanteur Sly Johnson, du bassiste Fifi Chayeb et du batteur André Ceccarelli). D’ailleurs, je crois que votre amitié avec André Ceccarelli ne date pas d’hier…
Je connais Dédé depuis que je suis rentré en France. Je me suis, rapidement, retrouvé à jouer avec lui et nous avons donné des concerts mémorables. C’est une personne tellement généreuse, affectueuse et musicale… Il a un respect absolu pour la musique qu’on lui propose. C’est un rêve de musicien Dédé… Qu’est-ce qu’on l’aime !
Quel est le but que vous vous donnez avec ce concept que l’on peut qualifier de « supergroupe » ?
De réussir à faire de la musique avec tout cela (rires) ! Moi avec mon Rhodes et mes petites pédales, Sly avec ses petites machines etc. C’est un groupe sans prétention où il n’y a pas une tête qui pense pour les autres. Nous avons établi notre répertoire comme cela…c’est un groupe de « feel good » (rires) ! C’est ça le principe !
C’est aussi la rencontre de deux univers… Celui du jazz à la Blue Note et de la soul à la Motown…
Oui, il s’agit de deux univers que connaissent bien tous les membres du groupe. Cela nous permet de basculer vers l’un ou vers l’autre assez facilement. Cela nous donne un peu d’envergure. C’est agréable…
Vous êtes un artiste particulièrement prolifique et diversifié (musicien, producteur, écrivain, auteur et présentateur d’émissions de télévision…). Existe-t-il, malgré tout, une autre corde que vous souhaiteriez ajouter à votre arc ?
(rires) Il y a tellement de choses que j’aimerais faire… Ceci-dit, mes journées sont déjà très chargées et il m’est difficile d’en faire plus. J’en souffre un peu car je m’ennuie très vite et je suis toujours tenté de faire autre chose que ce que je suis en train de faire… Cela a un côté très agréable car je n’ai jamais deux journées qui se ressemblent et ma vie change sans arrêt. J’ai, toujours, tout un tas de trucs qui me passe devant les yeux, sous les mains, ou dans les oreilles… Je trouve la vie magnifique mais, en même temps, je regrette de ne pas me « poser » plus souvent (même si pour la rédaction de mon dernier livre, « Les Fous du Son » paru en 2016 aux Editions Grasset, je me suis octroyé une profonde immersion d’un an et demi…une période durant laquelle j’ai très peu joué).
Le fait d’être dans sa bulle est une chose merveilleuse…c’est une impression incroyable ! Malheureusement, je ne peux pas me permettre de m’offrir des bulles d’un an et demi de ci ou de ça à chaque fois. Il faut toujours ménager la chèvre et le chou et garder les fers au feu… De ce fait, je saute de l’un à l’autre. Pour l’instant cela se passe bien mais j’espère que je ne vais pas me casser la patte en sautant (rires) !
Etes-vous, justement, un obsessionnel du son ?
Je suis, de plus en plus, devenu conscient ! Quand j’ai commencé la musique, le son n’était pour moi que ce qui sortait de l’instrument et qu’on entendait dans la salle. Puis, je me suis rendu compte qu’il y avait beaucoup plus que cela dans le son. Il ne s’agit pas que de notes mais aussi de couleurs, de vibrations, de fréquences et de toutes sortes de choses… J’en ai pris conscience tardivement, au moment d’aborder mon virage électro…à l’aube des années 2000. C’est à ce moment-là que j’ai pris la position de l’ingénieur du son et que j’ai pu écouter la musique comme des notes qui bouges, des harmonies, des accords, des lignes de basse, des mélodies… J’ai écouté cela comme une pâte abstraite que l’on entend !
Depuis, je suis de plus en plus attentif au son et à la manière dont mes projets sont enregistrés. Par exemple, en tant que producteur, je vais sortir un nouveau disque du quartet de Géraldine Laurent (« Cooking », qui parait le 18 octobre 2019). Pour celui-ci, je suis particulièrement fier d’avoir réinstallé la place de la batterie. En effet, je ne supporte plus les disques sur lesquels la batterie prend toute la largeur du spectre, de droite à gauche (quand, par exemple, le batteur fait un roulement et que le son passe de l’oreille droite à la gauche ou inversement). C’est une invention « absurde » qui n’est pas naturelle. Pourtant, maintenant, tous les disques de jazz sont enregistrés comme cela. Donc, pour ce projet, j’ai mis la batterie à gauche, le piano à droite, la basse et le saxophone au milieu. J’ai laissé le son vivre, comme si c’était dans un club. Ainsi, je me suis rendu compte que la conversation musicale devenait beaucoup plus audible. Ceci, parce que ce sont des musiciens acoustiques qui ont l’habitude de jouer dans des clubs et qui ont l’habitude de ce genre de discours. Il faut toujours penser au son qui convient à la musique (car cette formule ne peut pas convenir à tous les projets, mais elle semblait la plus indiquée sur celui-ci). Bref, je deviens effectivement de plus en plus un obsessionnel du son…oui !
En attendant, avec impatience, votre retour à l’électricité puis-je vous demander si vous avez une conclusion à apporter à cet entretien ?
Je suis très content d’être à Colmar où je ne joue pas souvent. Ce soir, nous nous produirons dans une belle et grande salle (au Parc des Expositions, nda)…j’espère que tout va bien se passer !
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