L'émission "blues" de radio RDL Colmar animée par Jean-Luc et David BAERST | ||
Nda : A l’inverse d’artistes auxquels il est régulièrement comparé (Charles Bradley, Sharon Jones…), Lee Fields a débuté sa carrière très tôt (en 1969, alors qu’il était âgé de 18 ans). Ce n’est pourtant qu’à compter du début du XXIème siècle que sa notoriété a commencé à franchir les frontières du sud des USA lorsque, lui aussi, a débuté une fructueuse collaboration avec Gabriel Roth et Philippe Lehman…initiateurs du label Desco, puis de Daptone Records. Dès lors, le chanteur est devenu une figure incontournable de la scène soul internationale, accumulant les disques et les tournées. Fatigué mais loquace, « Little JB » (surnom donné à Lee Fields en raison de sa ressemblance avec James Brown) m’a reçu dans sa loge au lendemain d’un concert particulièrement marquant pour lui, à l’Olympia de Paris. Peu avant de retrouver son groupe (The Expressions), pour de nouvelles balances, il est revenu sur son parcours basé sur la foi et l’amour. Lee, tu t’es produit hier soir sur une scène qui a vue défiler les plus grands noms du rhythm & blues et de la soul music, à savoir l’Olympia de Paris. Que ressens après ta prestation dans cette salle mythique ? Peux-tu revenir sur la manière dont s’est déroulée ton enfance en Caroline du Nord et, plus particulièrement, sur ce qu’était l’environnement musical au sein duquel tu évoluais alors ? Elle couvrait non seulement la région locale de Nashville mais elle était, aussi, très écoutée dans tout le sud-est des États-Unis. Grâce à lui et à tous ces sons émis depuis le Tennessee, mes journées étaient vraiment amusantes ! Ressens-tu un feeling identique entre ce que dégagent la country music et la soul music ? Quels sont les premiers artistes de soul qui ont eu un impact sur toi ? J’ai, aussi, beaucoup écouté Nat King Cole, Brook Benton puis Otis Redding, James Brown, Wilson Pickett etc. Ceci dit, j’ai également été touché par The Beatles. Un groupe qui m’a donné l’envie de devenir un artiste moi-même. J’ai vu ce quartet à la télévision, dans l’Ed Sullivan Show, avant de découvrir James Brown. C’était en 1964 et, sur le coup, j’ai pensé que ces gars venaient d’une autre planète. Tout était différent chez eux. Cela allait de leurs coupes de cheveux jusqu’à leur musique. Je conserve, aussi, de cette prestation un véritable choc visuel car si John Lennon, Paul McCartney et Georges Harrison se produisaient sur le sol, la batterie de Ringo Starr était, quant à elle, surélevée. Puis, à la même période, j’ai découvert James Brown & The Famous Flame à travers un film, « The T.A.M.I Show » (réalisé par Steve Binder en 1964, nda). C’était un concert filmé réunissant de nombreux grands noms du rock’n’roll et du rhythm & blues. Cette vision m’a conforté dans mon idée de devenir artiste ! Considères-tu, qu’avant d’être conçue pour les disques, la soul music est une musique de scène ? La première chose que je fais le matin, en me levant, n’est pas une action conduite par moi-même mais bien par l’esprit de Dieu. C’est aussi l’essence du gospel et beaucoup de gens me demandent pourquoi je ne m’aventure pas dans ce registre. En fait, je pense qu’il y a déjà beaucoup de chanteurs de gospel actuellement sur la planète…et beaucoup de « preachers ». Le monde a donc, davantage, besoin de soulmen car Dieu est présent à travers toutes les formes d’amour. C’est pour cela que je vis, car j’estime que l’amour est ce qui structure l’humain. Aujourd’hui, nous devenons trop égoïstes et nous ne pensons qu’à nous-mêmes. L’amour reste la fondation principale pour que ce monde puisse continuer à tourner. Tous pour un et un pour tous… Te souviens-tu des circonstances qui t’ont permis d’enregistrer ta première chanson en 1969 ? Tu sais, plus tard, dans les années 1980, j’ai connu une période plus calme dans ma carrière. Je pense que Dieu veillait sur moi et qu’il m’a aidé à me retrouver. Ainsi, je suis me suis plongé dans le savoir. J’ai souhaité apprendre un maximum de choses et cela est passé par la lecture. Je me suis même immergé dans un immense dictionnaire en deux volumes. Le premier couvrait les lettre A à L et le second les lettres M à Z. C’était très plaisant et j’ai considéré ces ouvrages comme une vraie mine d’or. Je me suis intéressé à l’étymologie puis j’ai découvert la Bible du Roi Jacques (La « King James Version » est l'œuvre d'une équipe de traducteurs dont le travail s'est étendu sur plusieurs années. Elle a exercé une influence déterminante sur la littérature anglaise et la langue anglaise dans leur ensemble, nda). Ceci parce que je crois que ces temps sont toujours d’actualité. La langue a évolué et il est bon de découvrir ne serait-ce qu’un seul mot par jour. Il en résulte une sorte de cuisine qui est très enrichissante. Vraiment, cette période que certains pourraient qualifier de « creuse » m’a permis de procéder à un travail intérieur qui m’a déterminé dans mes choix pour la suite de ma carrière. A partir de ce moment-là, je savais exactement où je voulais aller avec ma musique. Je n’ai plus voulu chanter que des choses positives, en continuant d’interpréter des textes plus sombres que lorsque cela était vraiment nécessaire. J’ai voulu devenir l’interprète de ce que je voyais, en le faisant dans un état d’esprit qui soit le plus positif possible. De quelle manière l’idée de travailler avec le groupe The Expressions est-elle venue à toi ? A cette époque, le groupe qui m’accompagnait s’appelait The Soul Providers et nous avons, par la suite, donné quelques concerts ensemble en Angleterre ainsi qu’en France. Ces musiciens étaient membres de plusieurs groupes. Certains d’entre eux jouaient, par exemple, au sein de The Sugarman 3 qui était un ensemble plus réduit avec lequel je me suis également produit. Ainsi, je pouvais jouer dans tous les types d’endroits, y compris dans des lieux plus confidentiels tels que des clubs ou des bars. A cette époque, Sharon Jones était ma choriste…elle réalisait, également, des harmonies vocales sur mes disques. Par la suite, elle a débuté sa carrière solo en étant, également, accompagnée par The Soul Providers qui, petit à petit, a changé son nom pour devenir The Dap-Kings. Lehmann et Roth, en compagnie de Neal Sugarman (le saxophoniste et fondateur de Sugarman 3) ont décidé de lancer un nouveau label qui allait devenir très prestigieux…Daptone Records. J’ai enregistré quelques 45tours pour ce dernier, en étant accompagné par diverses formations telles que The Sugarman 3 ou The Dap-Kings. Certains membres du dernier groupe cité m’ont suivi sur le label Truth & Soul et ont fondé un ensemble qui allait devenir The Expressions. Nous avons enregistré un premier 45tours ensemble en 2004. Puis, aux alentours des années 2006 ou 2007 j’ai commencé à réunir des titres pour un nouvel album. Ce dernier est paru en 2009 et s’appelle « My World ». Depuis 2008, avec The Expressions, nous avons commencé à parcourir les routes et nous n’avons jamais cessé depuis. Je n’ai jamais été aussi occupé avec n’importe quel autre groupe. C’est vraiment une bonne chose, chacun sait ce qu’il a à faire ! Te considères-tu, aujourd’hui, comme un survivant de la soul music ? J’avais besoin de savoir ce que représente l’esprit avant de recommencer à chanter plus intensément. C’est donc au début des années 1990, avec l’album « Meet Me Tonight », que ma carrière a repris un rythme plus intensif et que je me suis montré très présent sur le « southern soul circuit » où je suis devenu très populaire. J’y croisais alors des artistes tels que Johnnie Taylor, Tyrone Davis, Bobby « Blue » Bland, B.B. King etc. B.B. King a eu la capacité de plaire à tout le monde mais beaucoup d’autres artistes n’étaient des vedettes que dans le sud des Etats-Unis. J’ai pu fréquenter B.B. King de manière proche et c’est lui qui m’a ouvert des portes dans ma carrière. J’ai essayé de m’inspirer de sa personnalité et de sa manière de faire afin de pouvoir élargir ma notoriété. C’est aussi, indirectement, un peu grâce à lui que j’ai pu me produire des scènes blues du sud des USA jusqu’à l’Olympia de Paris. Tu as été, pour cela, jusqu’à collaborer avec des DJs ou artistes de trip hop tels que Martin Solveig ou Wax Tailor. A ton avis, l’avenir de la soul music passe-t-il par de tels mariages ? Peux-tu me parler de tes projets les plus immédiats ? Souhaites-tu ajouter quelque chose à l’attention de ton public français ? www.leefieldsandtheexpressions.com
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leefieldsandtheexpressions.com Interview réalisée aux Propos recueillis par David BAERST En exclusivité !
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