Marc Bozonnet
L'émission "blues" de radio RDL Colmar animée par Jean-Luc et David BAERST

Dans un premier temps, Marc, pourrais-tu me dire comment t'est venu l'amour des guitares et plus particulièrement de la pedal steel guitar qui est un instrument particulier, souvent appelé " instrument de torture "?

(rires) La pratique de la pedal steel m'est venue avec l'amour de la musique Country. Lorsque l'on entend cet instrument dans ce genre musical, on se demande ce que c'est. Lorsqu'on est musicien, on se demande aussi ce que c'est car il ne s'agit pas vraiment d'une guitare.
Puis on découvre que cet instrument est issu, dans ses origines les plus lointaines, de la guitare hawaïenne. Puis on s'intéresse aux musiciens qui la pratiquent en se rendant compte qu'elle est omniprésente dans le monde de la Country Music, au même titre que le violon ou le banjo.

A titre personnel, j'ai commencé à jouer de la pedal steel guitar à la fin des années 60 ou au début des années 70 alors que j'accompagnais Hugues Aufray. Il aimait cet instrument.

Comme à l'époque j'étais son guitariste et que j'aimais aussi ces sons, je m'en suis procurée une à Paris. Ceci est très rare car on n'en trouve pas dans les magasins de musique en France. J'en ai cependant trouvé une, un modèle Fender, puis je me suis mis à travailler dessus, passant par le parcours " de la torture ", de l'apprentissage de cet instrument. Je me suis alors aperçu qu'il fallait une bonne dizaine d'années pour savoir correctement le contrôler.

Avais-tu des modèles parmi les spécialistes du genre ?
Oui il y en avait plein, d'autant plus que j'étais très fan de groupes de Country-Rock, par exemple Gram Parsons, Jerry Garcia au sein des Grateful Dead, Al Perkins qui jouait avec Manassas, bref, tous les groupes à tendance californienne. D'ailleurs Al Perkins est le premier joueur de pedal steel que j'ai rencontré alors qu'il se produisait avec son groupe à la Gare de la Bastille, avant qu'elle ne devienne l'Opéra. Il m'avait donné des directives et les façons d'accorder l'instrument.

La rencontre était d'autant plus facile qu'il était avec Stephen Stills et Manassas chez WEA, la même maison de disques que Hugues Aufray. C'est comme cela que j'ai appris mes premiers plans.

Après je suis parti aux USA, à Nashville et en Californie où j'ai rencontré plein de musiciens et en deux mois j'ai appris plus que l'on peut apprendre en France en dix ans (rires).

As-tu eu l'occasion de te produire en tant que professionnel aux USA, d'y accompagner des artistes ?
Oui, j'ai même remporté un Ammy Award à Nashville en 1989 avec un groupe qui s'appelait Virginia Truckee. Je connaissais bien aussi un groupe nommé Commander Cody au sein duquel Bobby Black, qui y jouait de la pedal steel, m'a appris pas mal de choses.

J'ai eu l'occasion de jouer avec eux à Los Angeles en tant qu'invité dans un Club Country qui s'appelle le Palonimo, j'ai aussi " jammé " avec quelques autres groupes.

Connais-tu et que penses-tu de la scène Gospel que l'on nomme la Sacred Steel où le groupe est accompagné par un joueur de lap steel guitar ?
Oui et j'adore ça, même si ce n'est pas mon style musical à la base.

De toute façon tout vient du Blues, toutes les musiques que l'on trouve dans le Mississippi et en Louisiane proviennent du Blues.

Même dans la musique Country aujourd'hui on y trouve des sons venant du Blues, du Rock'n'Roll et même du Jazz.

En France vous êtes peu nombreux à être des spécialistes de cet instrument. On peut citer, en dehors de toi, Claude Langlois, Jean Yves Lozach' et Lionel Wendling. Etes-vous une petite " confrérie ", vous fréquentez-vous et échangez-vous des plans ?
On se connaît très très bien mais n'échangeons pas des plans. Il n'y a pas de concurrence entre nous.
J'ai joué très longtemps de la pedal steel avec Johnny Hallyday et aujourd'hui je ne joue plus de pedal steel sur scène car c'est un instrument difficile à transporter.

Avec mon propre groupe, je me contente de jouer de la guitare. Je ne joue de la pedal steel, actuellement, que dans le cadre de sessions d'enregistrement pour d'autres artistes.

Je sais que tu fréquentes beaucoup les salons de musique, es-tu endorsé par une marque ou as-tu une marque de prédilection ?
Non absolument pas, bien qu'à une époque j'étais sponsorisé par les amplis Peavey. Ils me faisaient des amplis sur mesure quand j'accompagnais Hallyday.

Lorsque tu étais accompagnateur de ces grandes vedettes, menais-tu déjà en parallèle une carrière sous ton propre nom ?
Non, c'est venu par la suite. J'ai arrêté à l'âge de 33 ans le " show biz " car je commençais à accompagner un peu tout le monde dans des genres très différents. Je faisais un peu tout et n'importe quoi…

J'ai eu besoin de retrouver des racines et mes origines musicales. Je n'ai plus accompagné des vedettes sur scène mais j'ai continué mon activité de session man. Je sentais que le moment était venu de créer quelque chose si je voulais continuer à faire ce métier à plus long terme. Etre musicien d'Hallyday, ça devient difficile à partir d'un certain âge (rires).

Par contre je me suis occupé de Jeane Manson lorsqu'elle a fait son double album Country qui était produit par Disneyland et enregistré à Nashville. Sur ce disque il y avait des chansons de Michel Mallory que je connais très bien, qui est un ami et qui est le meilleur en France pour écrire ce type de chansons. Je travaille toujours actuellement avec Jeane Manson car je prépare son retour scénique au Cirque d'Hiver durant lequel je viendrai faire un peu de musique Country.

As-tu un grand souvenir d'une de tes collaborations, tourner avec Hallyday a dû te procurer bien des aventures ?
Oh il y en a tellement que je ne saurais pas par quoi commencer (rires) !

Pour en revenir à ta carrière solo, peux-tu me parler de ta configuration de groupe ?
Dans les années 80 j'ai produit le groupe Virginia Truckee qui était un groupe de Country-Rock français constitué de très bons musiciens (Danny Vriet, Jacques Mercier, Doudou Weiss, Jean-Louis Mongin en plus de Marc, Nda).

Pour des raisons de gestion, je me suis autoproduit par la suite avec un spectacle qui s'appelait le " MB Show " durant lequel je me produisais avec 5 ou 6 musiciens.

Aujourd'hui je tourne avec deux musiciens, le batteur Doudou Weiss que j'ai rencontré lors de la série de concerts d'Hallyday au Palais des Sports en 1976 et le fantastique bassiste Christian Mélies. Sur scène je fais plein de choses à la guitare, imitant aussi bien les sons de pedal steel que de banjo que de piano etc….

Pour cette formule, j'ai repris le nom " MB Show "….

Tu as enregistré sous cette formule ?
Oui j'ai eu l'occasion d'enregistrer, mais le problème c'est de trouver une distribution (rires) !

Aujourd'hui il faut s'auto-distribuer et j'ai du mal à gérer cela car c'est un vrai métier.

J'ai un disque instrumental qui vient d'être édité et j'ai un autre album avec des chansons qui est en court de production. En tout, à ce jour, j'ai sorti 7 albums.

Après une telle carrière, y'a-t-il quelque chose que tu souhaiterais encore concrétiser ?
Continuer ce que je fais en ce moment, c'est-à-dire mon spectacle, c'est le plus grand plaisir que je puisse avoir.
Il y a des chansons, des compositions, des reprises et des instrumentaux à la guitare assez spectaculaires. Je m'épanouis totalement dans cette formule. J'espère continuer longtemps !

Ressens-tu un nouvel engouement de la part des jeunes pour la guitare et aurais-tu un conseil à leur donner ?
Il y a eu un trou énorme avec l'apparition des ordinateurs…

Le problème c'est qu'apprendre la guitare ça ne prend pas deux mois - au contraire d'un ordinateur où il suffit de pianoter dessus. Ceci est une raison pour laquelle les jeunes ont décroché de la musique.
Il faut aussi prendre en compte le manque d'endroits pour jouer et le manque de production.

Il y a des jeunes qui jouent de la musique partout, je le constate quand je vais en province. Le problème c'est qu'on ne les connaît pas et qu'on ne les entend pas. Ils ont donc du mal à s'exprimer et souvent changent d'orientation professionnelle.

Pour être performant en tant que musicien, c'est un travail à plein temps, c'est six heures de travail par jour, de ce fait il est difficile de cumuler les deux activités.

Cela devient très difficile de faire de la musique en France. Heureusement les goûts commencent à changer et je m'aperçois que les jeunes tendent désormais d'avantage vers la guitare plutôt que vers l'ordinateur.


 
Interviews:
Les photos
Les vidéos
Les reportages
 

Les liens :

Interview réalisée au Club Drouot à Paris le 28 Avril 2006

Propos recueillis par David BAERST

En exclusivité

 

Le
Blog
de
David
BAERST
radio RDL