Mike Sanchez
L'émission "blues" de radio RDL Colmar animée par Jean-Luc et David BAERST


Pouvez-vous évoquer votre éducation musicale ?
Par où commencer ? Quand j'avais dix ans, je vivais à Londres avec mon père et ma mère. Un très vieux piano était déjà dans le living room quand nous avions déménagé. Comme la femme d'un ami de mon père était professeur de piano, j'ai bénéficié de ses leçons pendant un an environ. Je n'y ai pas pris particulièrement plaisir. Ce n'est venu que cinq années plus tard, quand je me suis plongé dans le revival rock'n roll et rockabilly.

A cette époque en Angleterre et dans une partie de l'Europe, on recommençait à coiffer ses cheveux en arrière à la gomina. Elvis Presley était mort quelques années auparavant. Des tas de groupes de rockabilly étaient en train de se former à Londres.

Je suis allé voir les Stray Cats en 1982. C'était énorme ! Tellement excitant ! Dans la même période, j'ai assisté à un concert des Fabulous Thunderbirds en 1980, en 1982 et en 1985. A chaque fois que je les voyais sur scène, je devenais de plus en plus fan.

Alors déjà, j'appréciais autant l'aspect blues de cette musique que le côté rockabilly.

J'ai saisis ma guitare pour la première fois à l'âge de 15 ans. Plus jeune, j'avais déjà reçu des leçons de piano. Dès que j'ai appris à jouer le E, A et B7 sur la guitare, " Well that's allright mama ! " (Mike entonne l'intro NDLR). J'étais lancé !

Je suis tombé amoureux de ce style de musique. Je n'ai jamais eu un vrai boulot. Je suis tellement reconnaissant d'avoir eu cette chance. Maintenant, j'ai 42 ans, c'est formidable d'être parvenu à ce niveau. Je gagne ma vie, les gens m'écoutent et ma réputation est grandissante. Pourtant, je joue dans un style de musique qui date des années 50 et 60. Bien entendu, j'écris mes propres chansons, mais il y a tant de reprises possibles qu'il suffit de choisir.

Par exemple, lors que je faisais partie du groupe de Bill Wyman durant quatre ans, nous reprenions les tubes de Jackie Wilson et de Tony Bennett, entre autres. Quel plaisir de sortir ces titres de l'ombre pour leur redonner vie à nouveau !

Donc, mon éducation musicale était très limitée. A l'âge de 10 ans, je n'étais pas encore entré dans une Ecole de Musique. D'ailleurs, ce n'est toujours pas fait !

Je touche ma bille dans tout ce qui est blues, roots, musique noire américaine, vieux rock'n roll. J'y trouve mon bonheur.

Comment avez-vous découvert la culture rock'n roll, au-delà de sa musique ?
Je m'y suis plongé naturellement à l'âge de quinze ans. Nous n'étions tous que des gosses allant à l'école. Certains avaient les cheveux peints en vert, mais ça ne me branchait pas d'être punk. Certains les portaient en permanente et se prenaient pour des néo-romantiques. Certains les avaient long et gras et donnaient dans le heavy metal.

J'accrochais bien sur le côté style et mode du rock'n roll. Maintenant, je suis devenu plus qu'un fan. Je suis à présent un professionnel du spectacle.

Vous êtes non seulement un pianiste et un chanteur très doué, mais également un guitariste. D'où viennent vos influences, en dehors de Jimmie Vaughan ?
Le piano et la guitare me servent d'outils dans mon métier d'homme de scène, de chanteur et de vedette. Je compte beaucoup sur mon charisme personnel pour faire passer du bon temps à mon public. Il se trouve par ailleurs que je suis meilleur au piano qu'à la guitare.

Je me suis toujours servi énormément de la guitare jusqu'à quelques années de là où j'ai été électrisé sur scène. Du coup, j'ai stoppé la guitare pendant quelques années.
Et je suis passé au piano, que je joue de façon correcte uniquement depuis que j'ai atteins la vingtaine d'années. Ce qui est assez tard. Ça date de vingt-deux ans à présent.

A partir du moment où j'ai pris plaisir à jouer du boogie woogie et à interpréter des shuffles de blues, je n'avais plus à m'inquiéter à chercher ailleurs où est ma musique. J'ai pris l'habitude de tout mélanger : le rock'n roll, le rockabilly, le blues, le jump blues, le boogie woogie et tout ce qui va ensemble.

Dans mes deux derniers albums, je me permets de faire un mélange à partir d'un tas d'ingrédients. Je ne limite plus à un seul élément. Il ne faut pas fermer son esprit alors qu'on peut choisir entre tant de musiques différentes. Je ne sais pas ce que Bill Wyman en aurait dit, mais il a pris la même option.

Enormément de morceaux géniaux sont en passe d'être oubliés parce qu'ils appartiennent au passé. Certains parmi les plus jeunes actuellement ignorent qui sont Elvis Presley et les Beatles.
J'adore quand des gosses viennent me voir sur scène à la fin du spectacle pour me dire : " je ne pensais pas que j'allais aimer ça, mais en fait j'ai adoré ! ".

Qu'est-ce qui vous motive dans le choix de vos partenaires musicaux ?
Avant tout, ce sont eux qui viennent vers moi. Je n'ai pas pour habitude d'aborder ou de courir après qui que se soit. Mais j'ai eu énormément de chance depuis que j'ai constitué un groupe avec un des mes amis, Andy Silvester. Il ne doit pas avoir plus de 18 ans que moi.

Je l'ai rencontré par le biais du premier d'entre tous nos " fans très connus ". En 1982, nous avions alors notre premier groupe de rock'n roll. Robert Plant, la rockstar de Led Zeppelin, était devenu fan et venait nous voir en spectacle dès que possible. C'est lui qui m'a présenté à Andy Silvester (dans les années soixante, il assurait la basse de Chicken Shack - I'd rather go blind- Tears in the wind …). Nous avons formé ensemble un groupe en 1984: " the Big Town Playboys ". J'étais le leader de ce groupe pendant quinze ans, puis je l'ai quitté il y a six ans de ça à la fin de l'année 1999.

Dès les débuts du groupe, en 1984, cela ne faisait pas un an que nous étions ensemble quand des gens, tels que Gary Brooker (chanteur de Procol Harum), venaient nous voir dans le Sud de l'Angleterre. Ensuite, il nous a invité à venir jouer dans ses soirées privées. En tant que Big Town Playboys, nous ouvrions pour un super-groupe animé par Eric Clapton, Albert Lee, Andy Fairweatherlow, Dave Gilmore… Tous ces grands musiciens sont également devenus fans de notre groupe. Eric nous a adoré dès qu'il nous a vus en 1996. Et la semaine suivante, son manager nous invitait à le rejoindre en studio pour enregistrer la bande-son pour le film " the Color of Money ".

Gary Brooker a aussi beaucoup contribué à aider notre cause, au point de nous manager à un certain moment. Andy Sylvester était lié à Peter Green, de Fleetwood Mac, car tous les deux appartenaient au label Blue Horizon dans les années soixante. Je me suis retrouvé avec Peter Green et Mick Fleetwood dans ma propre maison en train de fouiller dans mes disques.
Une fois encore, ils sont devenus autant des amis que des fans. Mick est à présent un ami de longue date. Il m'invite régulièrement à participer à ses projets. Je l'ai même accompagné en tournée en Amérique, il y a quelques années de ça.

J'ai choisi de vivre de ma musique parce que j'adore ça. Je n'imagine même pas faire fortune ainsi. L'argent de fait pas le bonheur. Il faut profiter de cette vie tant qu'elle dure. C'est valable pour tout le monde.
C'est bien entendu un honneur et une joie de se confronter à des gens tels que Mick ou Eric Clapton. Par exemple, Bill Wyman m'a contacté après que j'ai quitté the Big Town Playboys. Huit mois plus tard, je rejoignais les Rythm Kings. Tout le monde se connaît dans le milieu.

Jools Holland voulait m'inviter dans son émission de télévision. Quoique c'était peut-être pour la radio, étant donné que je suis plus beau que lui (Rires).

Pouvez-vous évoquer comment s'est déroulée votre collaboration avec Bill Wyman ?
Je connais Bill Wyman depuis 1997. Il avait entendu parler de moi et de mon groupe de l'époque, the Big Town Playboys. Quelques mois après avoir quitté ce groupe, Bill m'a appelé pour que je fasse partie des Rythm Kings.

Nous sommes restés ensemble durant quatre ans. Bill est quelqu'un de génial. C'était un plaisir et un honneur à la fois d'être membre des Rythm Kings.
Georgie Fame et surtout Albert Lee sont devenus ainsi des amis très proches. C'est allé jusqu'à l'enregistrement d'un album en compagnie d'Albert Lee. Il doit sortir l'année prochaine car la plupart des titres sont déjà en boîte.

C'est tellement excitant d'avoir Albert Lee à ses côtés. Il a reçu un Grammy Award, c'est une légende de la guitare ! Qui d'autre pourrais-ton espérer collaborer ? Albert Lee est actuellement en tournée en Europe en ce moment-même.

En plus d'être membre d'un groupe, vous dirigez également une revue, the Mike Sanchez Rythm'n Blues Revue. Comment pouvez-vous manier toutes ces formules ?

Je fonctionne à différents niveaux d'implication. Je peux mettre en place toutes sortes de spectacles en fonction de la configuration requise. De même que je peux aussi bien jouer en solo et dégager un volume sonore conséquent, s'il le faut, et sans être accompagné.

J'aime bien ma petite formule quatre-pièces : Mark Morgan à la batterie, Oliver Darling à la guitare et le bassiste Al Gare. On s'appelle " Mike Sanchez and the Potions ". C'est un groupe de rock'n roll et rockabilly qui balance bien. Pas de sax ni d'autres instruments, uniquement du piano, de la guitare et du rythme bien rodé pour emballer le tout.

Pour continuer, se trouve après la formation que j'ai nommé " Mike Sanchez & Band ". S'y trouvent : Al Nicholls au saxophone ténor et Pete Cook au baryton. La merveilleuse Imelda May de Dublin, au chant. C'est une fille fabuleuse qui va se transformer en star en moins de cinq ans. Son propre groupe s'appelle les Blue Harlem qui l'occupe bien assez quand elle ne fait pas partie du mien.

Enfin pour couronner le tout : the Mike Sanchez Rythm'n Blues Revue. Nous étions en concert la semaine dernière dans ma ville natale. Le septième partenaire, qui vient s'ajouter à tous les autres, n'est autre que le trio " Les Extraordinaires ". D'excellents chanteurs et danseurs originaires de Londres dont j'ai croisé le chemin de nombreuses années auparavant.

Ce n'est qu'il y a cinq ans que j'ai eu cette idée. Cette revue est une formule modifiable à volonté. Parfois viens participer ce fabuleux Little George Sueref. Sa voix est terrifiante : on croirai entendre Sam Cook. On peut donner dans le blues down home, dans le doo-wop, dans le rythm'n blues, dans le rockabilly, dans le boogie-woogie, dans le rock'n roll style nouvelle Orléans …

Une mixture de tous les trucs qui m'ont plu. Rien que du bon !

N'est-ce pas parfois trop difficile d'être à la fois un musicien de session et un chef de groupe ?
C'est vrai que je suis impliqué dans tant de projets différents à la fois ! Je les adore tous. Je n'aime rien mieux qu'être celui qui contrôle le tout.

Je ne fais plus partie des Rythmn Kings de Bill Wyman, même si je peux encore les rejoindre su scène à l'occasion. Bill me l'a demandé mais j'ai tant de plaisir à mener ma barque. J'ai trois projets discographiques en cours. Je dois aussi planifier un nouveau DVD pour l'an prochain.

Pouvez-vous parler de votre dernier album " Women & Cadillacs " ?
Cet album est sorti il y a deux ans et demi. Je l'ai enregistré avec un groupe de Stockholm qui tend plus vers le blues que vers le rock'n roll : Knock-Out Greg & Blue Weather. Greger Andersson mène ce groupe en compagnie de son frère Marcus. Ce sont des types formidables, très puristes. Ils s'habillent comme personne, sonnent comme personne et tout ça de manière très authentique. Anders Lewén, le guitariste est également à tomber.

Ecoutez ce qu'ils produisent : cela va de la soul, en passant par le Chicago Blues de l'ancienne école, le jump blues, le rythm'n blues des débuts des années soixante, même le son de Memphis. Ils adorent cette musique et ils la jouent à la perfection.

Nous avons eu l'opportunité d'occuper ce petit studio à Stockholm. Cet album fabuleux a été enregistré en condition live. La musique qui nous rassemble nous inspire tellement. Par exemple, en écoutant de vieux titres de Richard Barry, Little Richard, Little Willie Littlefield, Little Willie John. Tous ce qu'il restait à faire était de laisser tourner le magnéto, appuyer sur enregistrement et c'est parti ! C'est tellement excitant de faire un album de cette manière. Actuellement, il est si facile de réparer une erreur qu'on ne sait plus à quoi correspond ce qu'on entend.

Nous allons remettre ça l'an prochain, avec Greger et ses gars. J'ignore encore comment nous allons l'appeler. " Babes & Pontiacs ", peut-être ! Avec de nouvelles filles pour poser sur la pochette.

Par ailleurs il faut mentionner que j'ai un magasin en ligne : " Doopin Music ". On pourra y commander tous mes albums. En commençant par mon dernier album studio " Blue Boy ", ainsi que le DVD 'RED HOT..LIVE!' et " Women & Cadillacs ". Également des disques plus anciens avec les Big Town Playboys.

 
Interviews:
Les photos
Les vidéos
Les reportages
 

Les liens :

Le site de :
Mike Sanchez

Doopin Music : son échope en ligne

Interview réalisée au Tanzmatten de Sélestat le 18 mars 2006

Propos recueillis par Jean-Luc et David BAERST

En exclusivité !

 

Le
Blog
de
David
BAERST
radio RDL