Paul Personne
L'émission "blues" de radio RDL Colmar animée par Jean-Luc et David BAERST


C’est toujours un plaisir de rencontrer Paul Personne. Une fois de plus il s’est prêté avec gentillesse au jeu de l’interview pour Route66. Un long entretien commencé dans sa loge et qui s’est terminé, tard dans la nuit, à son hôtel.
Toujours aussi enthousiaste, le chanteur-guitariste lève le voile sur ses projets et nous offre, au passage, une superbe citation « J’ai rêvé ma vie et j’ai vécu un rêve ». Qu’il nous le fasse partager encore longtemps…


Paul, de 2003 à 2008, tu as passé une grande partie de ton temps sur les routes. Tant et si bien que tes admirateurs se sont un peu inquiétés de ne plus avoir de tes nouvelles depuis. Que peux-tu dire pour les «rassurer» ?

Qu’en fin de compte j’ai fait plein de trucs (rires) !
J’étais sur les routes avec mes musiciens puis il y a eu un projet avec Hubert-Félix Thiéfaine (album «Amicalement Blues» + tournée, nda)…
En 2003 j’ai fait deux albums la même année, «Demain, il f’ra beau» et «Coup d’blues», si j’avais sorti ces albums à deux ans d’intervalle tout aurait été normal.
Finalement, ces deux disques sont sortis à six mois d’écart puis j’ai effectué une tournée de près de 3 ans. Il y a aussi eu la promo, les radios etc…

Tant mieux si des personnes aiment ma musique et la passent, c’est cool !
Ce projet avec Hubert-Félix Thiéfaine était assez marrant… Nous avions reçu une proposition de Johnny Hallyday pour lui écrire des chansons. Finalement, ces dernières n’ont pas été retenues et Hubert m’a proposé de les exploiter afin de faire un disque ensemble.
Nous avons vite enregistré cela, sans se retourner, et voilà… Après il y a eu la promo, la tournée…
Cette expérience s’est achevée en 2008 et j’ai décidé de jouer un peu à l’ermite tu vois…
Je me suis mis en «stand by»…

J’avais plein de chansons mais je ne savais pas de quel côté aller. L’expérience avec Hubert avait un côté «pas facile» mais qui, en même temps, me plaisait. J’aimais bien cette idée de «partage de la scène» avec quelqu’un, ne pas être tout seul sous les projecteurs…
Par exemple, ce soir j’ai joué avec Beverly Jo Scott qui m’a invité et j’aime ce côté « guest ». J’aime jouer avec des gens et ne pas être le seul à porter la responsabilité de la soirée.
C’est bizarre, contradictoire et équivoque parce que le fait d’être libre (d’être le seul à décider quelque chose et avec qui, comment, dans quel studio, avec quels mots…) est un grand luxe, c’est vachement bien !
J’ai toujours cette nostalgie du groupe comme quand j’étais adolescent.
Mais dans un groupe tu as toujours plusieurs décideurs. Même chez les plus grands, regarde les Beatles avec le tandem Lennon-McCartney ou les Rolling Stones avec Mick Jagger et Keith Richards… Les mecs qui se bouffent le chou, il y a toujours un conflit d’ego à un moment ou a un autre…

Moi je n’ai des problèmes qu’avec moi-même, ce qui est déjà pas mal d’ailleurs parce qu’entre moi et moi ce n’est pas tous les jours faciles (rires), mais voila…
Les choses se sont faites comme ça et je ne savais plus vraiment dans quelle direction je voulais aller. Soit un truc sous le nom de Paul Personne, soit fonder un groupe, soit m’associer avec d’autres artistes…
Je n’avais pas envie de recommencer le même scénario qu’avec Hubert. Je n’allais pas dire à Jean-Louis Aubert ou Louis Bertignac «Hey les mecs ont fait un truc ensemble?», ça aurait fait un peu réchauffé comme truc (rires)… J’apprécie le fait de vivre, à chaque fois, des expériences différentes…
Je me suis donc mis au vert, je suis allé voir des concerts, acheter des disques, repeindre mes volets, couper du bois (rires)… Bref, faire des trucs qui te changent la tronche comme aller rendre visite à des potes un peu perdus à droite et à gauche…
Puis j’ai fait le bilan de ce que j’avais comme «matos musical» et je me suis rendu compte que j’avais emmagasiné plein de chansons. Il y en avait plein dans des registres différents comme le rock and roll, le blues, le folk-rock, le folk-country….

Comme j’aime plein de choses, à chaque fois que je prends une gratte et que j’ai une idée, je n’essaye pas de me créer des limites en me disant «ah ben non, ça c’est trop comme ci et pas assez comme ça».
J’ai pris l’habitude, depuis des années, d’enregistrer plein de choses même si l’idée de départ n’est pas bonne. J’écris des phrases, à droite et à gauche, sur des cahiers et j’ai un dictaphone dans la bagnole etc…
Au bout d’un moment je me suis dit «qu’est-ce que je vais faire de tout ça ?», c’est un peu le bordel, c’est un peu hétéroclite, il faudrait trouver une unité à l’histoire…
Je m’inspire aussi de ballades que j’écoute…

C’est drôle comme tout cela passe le temps… Dans le tas, il y a des choses que je peux avoir fait 2-3 jours avant et d’autres qui ont 6 mois, 1 an voire 3 ans.
J’écoute tout cela et ça passe ou ça casse…
Si une vieille chose me touche toujours, je me dis «tiens c’est marrant, pourquoi je ne l’avais pas mise sur un album, pourquoi elle s’est retrouvée à la poubelle cette chanson ?».
Après, l’idée est de se dire «est-ce que je vais chercher des mots là-dessus etc…?».
Le processus est assez long et je n’avais pas de pression. Je n’avais pas spécialement une maisons de disques au cul qui pouvait me dire «hey Paul, faudrait peut être t’y mettre», tu vois…
J’ai laissé le temps passer, j’ai joué mon J.J. Cale et j’ai attendu que ça passe (rires) !
Je voulais surtout que l’envie revienne…

Dans le passé j’ai souvent déclaré, dans des interviews, que lorsque je n’ai rien à dire ou que je ne sens pas de besoin pressant je préfère fermer ma gueule. Par contre dès que l’envie déboule, là je ressens le besoin de raconter 2 ou 3 histoires ou de remonter sur scène afin d’aller à la rencontre des gens pour essayer de partager un moment avec eux.
Le reste du temps je n’aime pas m’imposer. Des tas de gens me le font remarquer…
Hier soir encore on m’a dit «hey on te voit jamais à la télé» etc…

Ce n’est pas spécialement moi qui ai envie d’être rare mais je ne suis pas passionné par le fait d’aller sur les plateaux de télé pour raconter ma vie de long en large. Je ne suis pas très friand de ce genre de choses…
Maintenant tout est vachement formaté, même les radios qui, à l’époque, pouvaient être un peu rock…
C’est une époque très particulière mais je me dis qu’il faudra quand même faire fort pour fermer la gueule d’un musicien. A partir du moment où tu as des choses à dire, tu arriveras toujours à trouver un moyen pour t’exprimer, d’une manière ou d’une autre.

Lors de ma tournée qui s’étalait de 2003 à 2007 on ne m’entendait pas beaucoup à la radio et on ne me voyait jamais à la téloche. Pourtant, dans toutes les villes, les salles étaient pleines… c’était une très bonne sensation pour moi. C’est vachement encourageant de pouvoir se dire «ok, je continue ma vie comme j’ai toujours voulu la mener, peu importe les médias, les ci et les ça…les gens sont au rendez-vous, merci beaucoup». Tu vois, dans ces moments, tu te rends compte qu’au fil des ans tu es entré dans la vie de quelques personnes. Quand j’écoute certains de mes admirateurs qui me disent que tel ou tel album correspond à un moment précis de leurs vies, c’est très touchant. Quand on fait de la musique, on ne se rend pas compte de la place que l’on peut avoir…

A titre personnel, la musique a été un guide quand j’étais gosse…. De Johnny Hallyday jusqu’aux groupes anglais comme les Kinks, les Stones, les Beatles, les Animals etc…
C’était vachement important… puis découvrir Jimi Hendrix, Bob Dylan, Otis Redding et toute la musique black. Tous ces gens ont été des guides au moment de mon enfance et de mon adolescence. Comme le fait de lire Rimbaud, Kerouac etc…

Il y a des moments où on est paumé, durant lesquels on cherche à trouver sa personnalité, alors que les parents veulent encore nous retenir par le cordon ombilical. L’époque se prêtait aussi beaucoup à ça… J’ai vécu cette période géniale des années 1960. Il ne se passait pas une semaine sans que tu découvres un nouveau groupe génial qui venait de San Francisco, du Texas, de Londres ou de je ne sais où (rires) !
Ma tête, mon cœur et mes sentiments étaient comme une éponge, j’absorbais plein de musiques et de sensations. La vie était en pleine ébullition et c’était vachement bien !
J’ai connu cela mais, à titre personnel, je ne peux pas savoir ce que je peux représenter pour d’autres personnes. Je n’arrive pas à imaginer que je peux toucher des gens etc…
Quand on me dit «ouais je me suis acheté une guitare Les Paul car je veux avoir ton son» ça me rappelle la période où j’écoutais Eric Clapton, Peter Green, Jimi Hendrix avec sa Stratocaster ou Mick Taylor au sein du groupe de John Mayall (The Bluesbreakers).

Il y a plein de gens qui veulent avoir la même guitare que leur idole afin de se rapprocher de leur son même si, à la fin, on sait qu’on y arrive jamais. Tout simplement parce qu’on est pas cette personne là et qu’on ne possède ni ses sentiments, ni ses doigts, ni son mental, ni ses tripes…
Donc on fait ce que l’on peut avec ce que l’on a puis on essaye de tracer notre propre chemin. Ce n’est pas facile mais c’est le Graal de toute une vie donc…

Je suis toujours étonné de tous les messages que je peux recevoir.
D’un autre côté ça me rassure car en temps que musicien, un peu perdu dans sa campagne et un peu ermite, on peut avoir l’impression d’être seul au monde…
C’est parfois bon de savoir que l’on a une petite place dans la vie de certaines personnes.

A chaque fois que je te parle, je suis touché par ta fraîcheur et ton enthousiasme. Cela me fait penser une vieille interview, que je lisais dernièrement, de Sleepy Labeef (musicien de rockabilly américain né en 1935) qui disait à Peter Guralnick (journaliste et auteur américain, spécialisé dans les musiques roots) «Quand j’ai commencé dans le métier, je ne savais même pas que ça pouvait me rapporter un centime. Et je pense que je continuerai demain, même s’il n’y avait pas d’argent à se faire. C’est ma façon de vivre». Tu partages, un peu, cette insouciance. Pour toi c’est la musique avant tout et le reste vient après…
Je n’ai jamais pris ma carte au Parti Communiste quand j’étais môme car je n’ai jamais, spécialement, pu suivre un mouvement ou un autre. Le mot «fan» ou «fanatique» m’a toujours un peu effrayé (rires) !
Par rapport à ce que tu dis, même quand j’étais gosse et que mon père me demandait ce que je voulais faire, je lui répondais que c’était musicien. De ce fait il voulait que j’aille au Conservatoire mais je lui répondais que mes idoles n’y étaient jamais allées et qu’elles ne savaient pas lire la musique. J’ai donc suivi le mauvais exemple (rires).

Quand je parle de communisme c’est juste pour te dire que, pour moi, être musicien ce n’était pas devenir une superstar et posséder des villas à travers le monde ainsi que des Rolls-Royce.
Je ne voulais pas faire le métier que mon père souhaitait que je fasse ou être à l’usine, je voulais juste être musicien. C’était mon truc et mon but n’était pas de me mettre du fric plein les fouilles.
Quand j’emploie le terme «artisan de la musique» c’est parce que je trouve que c’est la meilleure manière de me qualifier. Je suis ni plus ni moins que ça…

Je n’ai jamais cherché à devenir un super grand professionnel même si, sur scène, je prends aussi des risques. On est un peu des jongleurs, je pourrais faire des shows hyper huilés et dire, tous les soirs, la même chose aux gens mais cela ne m’intéresse pas. L’état émotionnel n’est pas le même d’un soir à l’autre, les salles sont différentes etc…
Nous improvisons avec ce qui se passe, sur le tas tu vois…
Il y a des jours où c’est bien, d’autres où ça l’est moins et on sort moins contents de scène…
C’est la vie d’un musicien, essayer de faire des choses et de voir où cela nous mène. De toute façon il y a toujours un fort pourcentage d’insatisfaction… C’est comme quand on fait un disque, on essaye de s’approcher de ce que l’on a dans la tête… Certains jours on s’étonne d’aller encore plus loin que ce l’on souhaite, en se disant «ah je n’avais pas pensé à aller là, c’est cool» mais ça passe très vite.

C’est pour ça que sur scène on réarrange parfois les chansons, qu’on les modifie ou que, parfois, on en change même les mots parce qu’on se dit «putain c’est pas ça que j’aurais du écrire et merde c’est trop tard le disque est parti». En même temps c’est ce qui est génial, c’est une vie en perpétuel renouvellement. De concert en concert tu peux changer des choses….
Rien n’est figé et c’est ce qui est bien !

Tu entreprends, actuellement, une nouvelle tournée en compagnie de ton amie Beverly Jo Scott dans le cadre de son spectacle «Planet Janis». De quelle manière as-tu rencontré cette artiste ?

Je crois que nous nous sommes rencontrés, pour la première fois, à l’occasion d’un concert de Carlos Santana à la Maison de la Radio. Il y avait une sorte de «débat» avant le concert de Carlos et nous étions quelques invités. En plus de nous il y avait les mecs de Touré Kunda, qui sont des potes de Carlos Santana, des animateurs etc…
Nous revenions sur le parcours de ce fameux guitariste qui, après, donnait un concert au même endroit. C’était vachement bien…
A l’issue de celui-ci, on m’a présenté à Beverly qui avait interprété une chanson à la guitare acoustique. Juste après nous nous sommes retrouvés autour d’une bière et de quelques cacahuètes et nous sommes, depuis, restés en contact. J’avais eu un bon feeling avec cette femme et comme elle voulait «continuer l’aventure» nous avons commencé à collaborer ensemble.

Je suis allé à Bruxelles pour enregistrer un duo «franglais» avec elle («Sublime guérison» sur l‘album «Divine Rebel» de BJ Scott, nda). J’y suis retourné plusieurs fois, notamment lors de l’enregistrement de l’un de ses albums suivant.
Le truc a continué, je l’ai invitée pour mes deux concerts (un électrique et un acoustique) à La Cigale en 2007... Nous avons fait «Tennessee Tears» qu’elle chante divinement bien…
Comme elle vient du côté de l’Alabama et qu’elle connaît bien les groupes de southern rock que j‘apprécie (Allman Brothers etc…), je lui avait aussi demandé de faire «Midnight Rider». Un titre que j’apprécie particulièrement et sur lequel Greg Allman a une voix fantastique…
Elle m’avait déjà sollicité pour participer, de temps en temps, au concept «Planet Janis» en tant que guest afin de prendre part à quelques chansons. J’ai toujours accepté avec plaisir car elle a un talent énorme et j’estime qu’elle n’a vraiment pas le succès qu’elle mérite. Elle devrait être hyper connue cette nana et ne pas descendre dans le type d’hôtel où elle loge ce soir (rires) !

L’année dernière, ce show s’était «élargi» en raison du 40ème anniversaire du festival de Woodstock. Je trouvais ça vachement fun, ils avaient fait un beau truc !
Il était même étonnant qu’ils ne puissent pas jouer à Paris pour proposer ce spectacle qui était vachement bien !
Elle m’a proposé de venir ce soir, puis pour deux jours en Belgique et, enfin, pour une date au Cabaret Sauvage (à Paris) en novembre prochain.
J’ai tendance à répondre oui quand elle me sollicite. J’ai la tête complètement autre part en ce moment, je suis sur mon propre projet, mais je reste fidèle en amitié. Donc, soit on s’occupe de ses petites histoires, soit on se dit «attends, c’est quand même une belle personne, puis elle a un feeling d’enfer et c’est une super chanteuse».

Nous ne sommes pas payés cher mais nous passons d’excellents moments et nous nous marrons bien !
On a qu’une vie, ça passe vite, il y a des moments où on ne peut pas trop réfléchir et chercher à se ménager. Pour l’actuelle tournée, des tas de gens étaient pressentis et, en fin de compte, très peu sont présents. Au bout d’un moment il faut savoir comment on se situe humainement et éviter de se poser des questions afin de savoir si ça peut être intéressant financièrement ou médiatiquement parlant.
J’habite en Normandie et je suis venu tout spécialement en Alsace pour ce concert. J’estime que c’est ça la vie d’un musicien… «on the road» !

En plus je trouve ça cool, j’aime prendre ma bagnole et conduire, il me reste encore quelques points donc profitons en (rires) !
Quand j’étais même, c’est ce que je rêvais de faire… une valise, une guitare et «quand est-ce qu’on part, où allons nous?»…
La route c’était ce grand point d’interrogation qui était planté en plein milieu et on ne savait pas ce qui nous attendait. Qu’il s’agisse de bonnes ou de mauvaises surprises, il n’y avait que la vie qui pouvait nous le dire. Si tu restes chez toi, planté à ce que ça vienne tout seul… tu peux toujours attendre longtemps. Vivre dans le rêve c’est vachement bien, d’ailleurs j’ai beaucoup rêvé… J’ai rêvé ma vie et j’ai vécu un rêve….
Je n’aurais jamais pu être un businessman…

Chacun sa vie et chacun sa merde mais le côté très carré c’est pas trop mon truc. Quand je vois les mecs arriver avec leurs costards un peu «cheap» et leurs mallettes puis un parfum bon marché… je me dis «wouah, j’espère qu’il est bien le mec!». Je n’aurais jamais pu imaginer vivre, ne serait-ce, qu’un peu de cette vie là. J’ai toujours été un mec très cool mais déjà tout gosse j’étais en «rébellion» face à certaines manières de vivre et certaines injustices. J’avais envie d’autres choses et je ne pouvais pas tomber mieux que d’être adolescent dans les années 1960. Tu avais un espèce de rêve complètement utopique qui se mettait devant toi et, tout le monde, pensait que tout était permis…

Lors de ce concert, à La maison de la Radio, as-tu rencontré Carlos Santana ? Tu en as toujours été un grand admirateur...

Non mais j’ai eu l’occasion de le rencontrer au Zénith. J’avais des «backstages» et on m’a dit qu’il n’y avait aucun problème pour le rencontrer. Ce mec était vraiment adorable, très cool. Les deux frangins de Touré Kunda étaient très cools aussi mais ils lui prenaient vachement le chou dans les loges, ils n’arrêtaient pas de lui parler (rires). A la Maison de la Radio, je n’ai pas osé l’approcher. J’avais peur de le faire chier, je le sentais un peu dans sa bulle et j’avais pas envie de la jouer «salut, on s’est déjà rencontrés, je suis Paul Personne et je suis guitariste, gnagnagna….».

J’avais entendu son premier album, celui avec la tête de lion (Santana, 1969), dans un Club à l’époque. D’ailleurs j’avais découvert beaucoup de choses dans les Clubs. Le premier Doors avec «Light My Fire», à l’époque il y avait plein de Clubs de rock qui passaient de la bonne musique. Ce n’était pas de la boite pour minets et minettes d’aujourd’hui avec du «atsoung, atsoung, atsoung». A l’époque les boites pour minets et minettes passaient du rythm and blues, du vrai… pas du r&b (rires) !

On y entendait Otis Redding, James Brown, Sam Cooke, Joe Tex, Aretha Franklin et que de la putain de musique !
C’était ça, à l’époque, la musique pour les minets ! Les mecs venaient avec leurs petits frocs serrés et, même si j’étais décalé par rapport à ça, j’aimais ces endroits à cause de la musique.
Donc la première fois que j’ai écouté le premier album de Santana je me suis vraiment demandé ce qu’était ce mélange que j’adorais. Maintenant ça parait vachement normal, plein de choses ont été mixées depuis…
A l’époque ce mec qui débarquait et qui mélangeait le blues, le son de San Francisco avec de la musique latino, c’était un truc hyper original !

Cette guitare lyrique qui déboulait… on avait jamais entendu ça !
Il y avait déjà Clapton et Hendrix, donc à l’époque quand tu étais musicien tu te prenais claque sur claque (rires) !
Ou tu arrêtais tout de suite parce que tu savais que tu n’aurais jamais le talent de ces gens là ou ça te mettait un bon coup de pied au cul et tu te disais «j’ai pas le choix, c’est ce qui me botte et il faut que j’arrive à leur hauteur». A l’époque on pouvait vraiment avoir de grands professeurs sur vinyle, chez soi, sur son Teppaz (rires).

Tu intègres le spectacle «Planet Janis» en rendant un hommage à Jimi Hendrix que tu admires particulièrement. Comment abordes-tu son répertoire, toi qui tiens à éviter toute forme de mimétisme ?
Et bien je l’aborde mal (rires) !
Il n’est pas possible de jouer dans la même cour… Il y a eu tellement de clones et d’imitateurs, des bons et des moins bons…
J’aimais beaucoup Robin Trower qui avait réussi à prendre tout ce son planant de Jimi…
Il faisait partie des gens que j’écoutais comme Frank Marino et Mahogany Rush qui, lui aussi, reprenait des trucs d’Hendrix.

Avec l’un de mes premiers groupes, Bracos Band, nous avions fait la première partie du groupe Scorpions quand Uli Jon Roth en était encore un membre. Ce mec blond avec sa moustache, sa Stratocaster blanche et son mur d’ampli Marshall était également complètement imprégné par le répertoire d’Hendrix… il jouait vraiment bien !
Nous célébrons, actuellement, les 40 ans de la disparition d’Hendrix et je suis souvent invité dans des trucs à Paris, des expositions, des cocktails etc…

Je suis, à chaque fois, subjugué de voir les photos d’Alain Dister et de Claude Gassian… J’ai beau revoir des extraits de concerts que je possède, par ailleurs, en intégralité. Même si je les connais par cœur, je me prends toujours une claque, c’est incroyable ce que dégageait ce mec.
Hendrix n’était pas trop bien dans ses pompes, il était complexé par des tas de choses, était timide et doutait beaucoup. Pourtant, autant il était introverti dans la vie, autant il était extraverti sur scène. Il connaissait le métier par cœur puisqu’à la base il s’est, aussi, produit dans des petits Clubs. Ce n’était pas un «virtuose gratuit» ni un «essuyeur de manche» comme on en voit maintenant lorsque les mecs essayent d’aller plus vite que leurs ombres. C’était de l’expression comme on peut en retrouver chez un peintre tu vois…
Michael «Mike» Bloomfield disait qu’il devait faire plein de notes sur sa guitare pour essayer d’avoir une contenance alors que Jimi n’en faisait que 2 ou 3.

C’était comme une peinture, il peignait carrément des univers sonores. Il avait tout, ce putain de look avec cette sauvagerie tout en possédant une grande sensibilité.
Il a été à l’initiative d’une «libération» du son, personne n’était jamais allé aussi loin que lui… il avait des années d’avance.
Des groupes comme les Beatles avaient déjà fait des expérimentations musicales mais lui partait d’une musique simple, à base de blues, pour faire exploser les barrières. Il n’aimait pas sa voix, alors que je trouve qu’il chante vachement bien. Son écriture avait aussi beaucoup de charme.

Ce n’est pas pour rien qu’il était un grand fan de Bob Dylan, comme tant d’autres, d’ailleurs on pourrait aussi faire un grand chapitre sur Dylan…
Il écrivait des choses surréalistes avec des phrases qui voulaient vraiment dire quelque chose.
Il a fait une putain de belle musique…
On me demande maintenant de lui rendre hommage alors que j’y suis toujours allé sur la pointe des pieds. Bien sûr, lors de bœufs, j’avais fait le con avec des copains (comme Louis Bertignac) sur «Foxy Lady», «Red House» ou ce genre de choses…

Ceci dit, j’ai toujours évité de piquer des plans. J’écoute beaucoup de gens mais j’évite toujours de piquer des trucs comme cela peut se passer sur les canards de musique où les mecs décryptent une musique, CD à l’appui, et te filent le plan d’untel ou d’untel…
A une époque j’écoutais beaucoup Eric Clapton, Peter Green, Rory Gallagher ou Albert King, avec lequel j’ai eu le grand plaisir de jouer. Quand tu mets leur musique et que tu prends ta gratte par-dessus, tu as l’impression de jouer comme eux, mais en fait tu n’as pas les vrais plans. J’ai toujours préféré ça car tu as l’impression de garder ton autonomie vis-à-vis de tes influences… car il n’y a rien de pire qu’une grosse influence!

Je me souviens d’une époque (au moment de la grande vogue de Stevie Ray Vaughan) où lorsque j’allais boire une bière dans un bar, je tombais toujours sur des mecs avec une Stratocaster, un ampli Fender. On sentait qu’ils avaient passé des heures et des heures à piquer des plans. En buvant ma bière je me disais «ouais c’est cool, c’est vachement agréable mais le mec c’est pas Stevie Ray… donc il joue comment quand il joue vraiment lui ?» (rires).
C’est un peu comme un imitateur, tu te dis «mais c’est quoi sa vraie voix au mec ?»…
Il faut faire attention…

Beverly Jo Scott, quand elle chante des trucs de Janis Joplin, elle chante avec sa voix, son truc à elle. Elle est complètement allumée de l’intérieur, elle a des cicatrices partout et elle n’a pas besoin de chercher le blues de Janis pour trouver son blues à elle. On est tous un peu comme ça avec nos sacs à dos «bluesy»…
On parlait de Carlos Santana tout à l’heure. Avec lui c’est pareil, si tu veux commencer à déchiffrer sa musique, tu va réussir à t’en approcher mais tu ne joueras jamais comme lui. Tu n’auras jamais son inspiration ou sa manière de décrocher les étoiles avec ses notes. Tu auras bonne mine et tu pourras esbroufer 2 ou 3 mecs dans un bar. Ils diront «wouah t’as vu, le mec il joue comme Carlos Santana»… et alors (rires). Cela ne sert pas à grand-chose, c’est juste une étape de la vie.

Après Beverly Jo Scott, j’aimerais parler d’un autre de tes amis, Benoît Blue Boy. Il va sortir son nouvel album («Funky Allo», Tempo Records) dans quelques jours. Avec lui, tu reprends le titre «Voodoo Twist» d’un vieux groupe du début des années 1960, Les Pingouins. La première fois que j’en ai entendu votre version, je me suis dit qu’il n’y a vraiment que Benoît Blue Boy et Paul Personne pour nous sortir un vieux morceau des Pingouins. Comment vous est venue l’idée d’interpréter cette chanson ?
C’est un truc qui vient de Benoît ça, t’imagines bien (rires) !
Je l’avais appelé, il y a quelques temps, pour que l’on s’amuse sur des textes. Il m’avait fait «Vue hier soir» et «C’est la vie qui m’a fait comme ça»…
Nous déconnions à faire ce genre de choses…

Puis je l’aime bien Benoît, c’est vraiment un mec drôle, philosophe et c’est l’un des premiers qui a vraiment adapté le blues en français. A l’instar d’un John Mayall en Angleterre, il a initié plein de gens. Il a formé les musiciens de son groupe (Les Tortilleurs, nda). Il a une collection de disques monstrueuse, donc il formait les mec genre «tiens écoute comment ce type tape le shuffle, écoute comment Otis Rush fait vibrer sa guitare etc…». C’est une sorte de professeur, il est drôle…
On se connaît depuis des années et, s’il nous arrive de nous perdre de vue, dès que le téléphone sonne et qu’on se reparle, on rigole. Il y a des gens pour lesquels le temps ne compte pas…

Quand il m’a contacté en me disant qu’il voulait faire ce truc des Pingouins, qui datait de la période où il y avait plein de groupes de twist en France, il m’a précisé que c’était juste une petite contribution puisque Freddie Roulette avait déjà un grande place à la pedal steel guitar. J’ai, tout de suite, dit oui. Je suis arrivé au studio avec une gratte et j’ai pris l’un de ses vieux amplis Fender, qui n’a plus d’âge et sur lequel il joue habituellement de l’harmonica. Je me suis branché là-dedans, j’ai essayé de trouver un son et voilà !

J’ai fait le truc puis on est allé bouffer dans un restaurant et on a bien rigolé.
J’ai reçu son disque il y a peu, c’est rigolo que tu m’en parles car je l’avais encore en ligne il y a deux jours. Je lui ai dit que je trouvais son CD très bien et qu’il me faisait penser à ses deux premiers albums. C’est dans le même esprit…
Lui, il est très content… pour le moment il a d’excellents retours !

Est-ce que tu es attentif à tout ce qui se passe sur la scène blues française actuellement ? On y trouve beaucoup de talents émergents, notamment parmi les guitaristes…
Je ne suis pas super attentif tu sais…
Je vis, un peu, retiré de tout. Quand je vivais à Paname, je sortais souvent le soir afin de boire un verre et de regarder des mecs jouer. Je parlais avec eux et, souvent, je prenais des numéros de téléphone. C’est ainsi qu’il m’arrivait de constituer des groupes avant de partir en tournée. C’était des périodes de recherches, je faisais un peu mon «chasseur». Je pouvais tomber sur un bassiste et me dire «putain il a un super son le mec, il n’a même pas d’ampli, il est branché direct sur la sono, il a un super son avec ses doigts… ».

Depuis pas mal de temps, je suis un «country boy» et dans ma région, en Normandie, il y avait un endroit (Le Caribou) qui se situait à 20 minutes de chez moi. J’y allais souvent, le mec faisait venir plein de groupes. La programmation était éclectique mais il y avait pas mal de rock-blues.
Ainsi, j’ai pu parler avec pas mal de musiciens et j’écoutais plein de jeunes guitaristes qui avaient du talent. Je sentais que le flambeau était repris, il y avait une belle effervescence.

Ce qui était gênant c’est que quand les mecs me demandaient mon avis je répondais «c’est vachement bien mais il faut sortir des clichés et éviter de toujours reprendre les mêmes vieux standards». Moi aussi je suis passé par là et je jouais «Little red rooster», «Hoochie coochie man», «Get my mojo working» etc…
Au bout d’un moment il faut trouver sa propre identité sinon tu vas rester à jouer du blues traditionnel dans les bars. Tu peux y prendre beaucoup de plaisir et ça peut te permettre de payer ton loyer quand ça se passe bien mais tu végètes…
J’ai vu plein de groupes de blues et de rythm and blues qui avaient vraiment un truc, c’était de très bons musiciens mais ça en est resté là…

Tant que les mecs ne font pas leurs propres «songs», qu’ils n’ont pas leur propre son et leur propre style, ils en resteront à jouer dans les bars ou à faire des premières parties dans des festivals de blues à droite et à gauche.
Je ne sais pas trop ce qui se passe, des fois je lis des trucs, on m’envoie des journaux et je vois que le fils de Patrick Verbeke sort un album etc… Ils ont d’ailleurs fait un disque ensemble (Patrick & Steve Verbeke «Verbeke & Fils», Frémeaux)…
Je suis aussi content de revoir la gueule de Bill Deraime qui repart sur les routes et qui sort un nouvel album !
Je sais qu’il y a une vraie fourmilière, un peu partout en France… Ces gens peuvent jouer dans des bars, dans leurs caves pour trois copains et être talentueux !

Parmi les gens de ma génération, il y avait Bill Deraime, Benoit Blue Boy, Patrick Verbeke et Jean-Jacques Milteau. Nous avons eu la chance de sortir du lot mais pour les autre ça a été, malheureusement, très difficile. Il n’est pas évident de faire parler de soi dans les médias, surtout quand tu es un peu discret et que tu ne veux pas aller te faire chier sur les plateaux de télévision en te demandant ce que tu fous là.
Quand, en même temps, tu as envie de jouer devant du public, ce n’est pas facile…

Cette musique a toujours été, même aux Etats-Unis, un peu «underground» malgré des artistes comme Johnny Winter qui ont fait le maximum pour la populariser.
En France le blues ça a fait rigoler les gens quand Henri Salvador a chanté «Le blues du dentiste» écrit par Boris Vian (rires)…
C’est comme la musique country. Il y a plein de festivals dédiés à cette musique mais on en entend peu parler ici. Il n’y a qu’Eddy Mitchell qui a réussi à avoir du succès en faisant des trucs un peu «countrysants» avec une pedal steel et Charlie Mc Coy à l’harmonica…
Pour les français, ces musiques restent trop typées… elle ne font pas partie du truc…
D’ailleurs je ne me considère pas comme un vrai bluesman, un puriste…
A une époque j’avais dit «les puristes me font chier» après que certaines personnes m’aient dit que ma musique n’est pas du blues. Ben non, ma musique n’est pas du blues et je ne me suis jamais revendiqué comme étant un bluesman «pur et dur».

Je n’ai jamais cherché à mettre mon petit costard, mon chapeau mou afin d’avoir le look de Robert Johnson…
Je fais ce qui me passe par la tête. Cela peut être des ballades californiennes, car j’ai beaucoup aimé Crosby, Stills, Nash & Young ainsi que James Taylor ou encore Carole King etc…
J’écoute aussi du jazz (Oscar Peterson, Charlie Parker, John Coltrane…), de la musique africaine, amérindienne, il y a plein de choses qui me touchent…
Je sais aussi faire la différence entre ce qu’il m’arrive d’écouter et ce que je fais. Il y a des trucs qui sont vachement bien fait dans le hip-hop, dans la techno, la house music même si il a aussi, dans ces genres, beaucoup de trucs très chiants…

Dans le rap il y a de vraies fulgurances et il y a des choses qui ne sont qu’un amoncellement de clichés qui sont recyclés et re-re-rabâchés et là ça me fait chier. Ou je ressens ou je ne ressens pas, je ne me force pas à aimer un genre de musique en particulier ou a prétendre être un «porte-étendard».
Je ne renie pas mon étiquette «blues» mais ce n’est qu’une étiquette. A une époque, lorsque j’ai sorti un album qui se nommait «24/24» (1985), je côtoyais pas mal de gens comme Luther Allison. A ce moment là, il y avait un bon retour du blues en France, porté par des artistes comme Stevie Ray Vaughan ou Jeff Healey.

Sur mon disque il y avait des ballades, des titres de rythm and blues et, pendant les concerts, des gens me disaient «hey Paulo fais nous un blues!». Ils étaient venu me voir pour écouter du blues et étaient déconcertés par mon évolution. Comme je le disais alors dans des interviews, un mec comme Charlélie Couture aime le blues mais a pu mettre sa griffe sur sa musique. Pareil pour Alain Bashung qui écoutait aussi bien Bob Dylan que Willie Dixon tout en pouvant s’affirmer dans sa musique. Moi j’étais encore porteur de cette image très typée «blues» ce qui, à un moment donné, m’a un peu pesé. Je voulais juste dire au gens «ce que je fais c’est ça, j’espère que ça va vous brancher sinon tant pis», tu vois…
Je sentais qu’on attendait de moi que je sois comme Luther Allison mais je ne pouvais pas. Déjà lui était vraiment génial, c’était un mec super… quel showman !

J’ai fait quelques dates avec lui, en tournée, et c’était vraiment une belle école. Je faisais la première partie et, tous les soirs, je me mettais sur le côté de la scène pour en prendre plein les mirettes.
A un moment il avait eu les boules car je marchais bien en première partie. Je l’entendais gueuler depuis les loges «moi quand je faisais les premières parties de Muddy Waters ou de BB King, je jouais un quart d’heure».
Personnellement je jouais 40 minutes et comme ça plaisait aux gens, j’avais un rappel…
Je suis allé le voir, on s’est tapé dans la main et ça a été cool. Je lui ai dit «de toute manière, meilleur je suis, meilleur tu seras parce que toi tu va mettre la surenchère et la barre encore plus haut». J’aimais beaucoup Luther, c’était un mec super…

Le fait de revoir actuellement au premier plan, dans les bacs des disquaires, des gens tels que Eric Clapton, Calos Santana, Neil Young et même Ronnie Wood doit particulièrement te réjouir…
Oui et, en même temps, tous ces gens n’ont jamais disparus. C’est ça qui est marrant !
On a l’impression que toutes ces modes là sont dépassées et que ces mecs sont des vieux schnocks qui ont fait leur temps. En même temps, quand tu les entends, jouer ils assurent encore !
La musique est, quand même, un truc vachement bien… Autant chez les sportifs ou les danseuses il peut y avoir une limité d’âge, autant (si t’es pas une midinette dans la musique, que tu n’a pas tout basé sur ton look d’ange et qu’arrivé à 70 piges tu ne fais plus qu’ange déchu) en musique tu peux t‘éclater longtemps (rires).

J’ai vu jouer Muddy Waters jusqu’à peu de temps avant qu’il ne parte, BB King possède toujours sa fameuse «blue note». Il est légitime que tous ces mecs continuent de faire des albums par rapport au talent qu’ils ont. Le tout est qu’il y ait encore un public pour acheter leurs disques. Quand je vois, aujourd’hui, des jeunes avec des cheveux longs, des jeans déchirés et qui écoutent Led Zeppelin, Jimi Hendrix, ou Bob Dylan je me dit que le flambeau n’a pas fini de se transmettre. La musique tourne sans arrêt, ce n’est que les médias qui préfèrent mettre en exergue telle ou telle vague.
Maintenant faut être comme ça, écouter tel type de musique et être sapé comme ça sinon t’es un ringard. En fin de compte tu te rends toujours compte, qu’au bout de 3 ans, le perfecto et le jean reviennent. Alors qu’avant si t’étais avec ton perfect’ et ton strauss t’étais un nul «bah non c’était un baggy qu’il fallait porter avec des Nike etc…». Si tu te fais baiser la gueule par ça, style «fashion victim», t’es foutu…

C’est normal que les mômes se fassent avoir, certains sont complètement intoxiqués et pris dans un espèce de grand tourbillon…
Quand j’étais ado on était révoltés contre tout et surtout contre la société de consommation.
On ne voulait surtout pas porter des marques, on allait aux puces pour être en dehors de tout cela.
Quand t’entends les jeunes à l’école c’est impressionnant «ah ouais si j’ai pas un sac comme ça je passe pour une ringarde», «ben oui, si moi j’ai pas un futal comme ça je vais avoir l’air d’un con»… Ils sont complètement prisonniers du système. On ne peut pas comparer les années actuelles aux années 60/70 pour lesquelles il y a de la nostalgie valable ou non. Moi je m’en fous, je les ai vécues. La contre culture, alors, était vachement intéressante. Même si c’était naïf, la jeunesse était révoltée…

Actuellement, même si ça gueule un peu, j’ai l’impression que tout le monde marche dans le truc.
Tout le monde veut avoir son appart’, son jean au pressing etc… On est quand même assez loin de l’esprit de Kerouac (rires)…
Mais, bien sûr, je ne veux pas dire que ce que j’ai vécu est la vérité, loin de là…
Pour en revenir à ces vieux dinosaures que tu citais… tant que c’est bien, tu fais de la musique jusqu’au bout, jusqu’à la fin de ta vie !
Si t’as toujours quelques personnes pour acheter tes disques et venir te voir c’est génial !
C’est drôle, il y a des moments où plus personnes ne parle de toi et que tu as l’impression que tu vas devenir un vieux nase et, tout à coup, tu redeviens «tendance», c’est très bizarre…

Ce phénomène de masse est lié aux médias car je pense que les gens qui aiment vraiment un artiste lui resteront fidèles. Il se foutent du reste, quelque soit le domaine…
C’est vrai aussi dans la variété, quelqu’un qui aime Michèle Torr, Daniel Guichard ou Mireille Mathieu achètera toujours le nouveau disque de celui ou celle qu’il apprécie. C’est la vie quoi (rires) !

Tu me disais, en début d’entretien, que tu étais en pleine préparation d’un nouvel album. Peux-tu déjà m’en dire plus quant à sa ligne musicale et à l’équipe que tu as réunie auprès de toi ?
Le côté musical sera illustré par une sorte de «rock folk californien bluesy»…
Ce sera assez marrant avec beaucoup de voix et de chœurs, un peu à la Crosby, Stills, Nash & Young… bien, qu’en fait, ce sera un mélange de tas de trucs !
L’anecdote rigolote, comme je te le disais tout à l’heure, c’est que j’ai plein de titres. Je suis allé voir des copains, des jeunes mecs d’à peine 30 piges qui vivent pas loin de chez moi (l’excellent groupe A L’OUEST, nda) , et je leur ai dit «les mecs j’ai plein de titres et de démos, ça vous tenterait qu’on les essaye ensemble, comme si on faisait un boeuf?». Ils étaient contents, on a fait le truc et on s’est bien marré !

On a commencé à s’enregistrer, j’écoutais et je trouvais ça plutôt frais. Ce sont de bons musiciens qui avaient encore plein de choses à apprendre et à maîtriser. Leur groupe est très rock-blues, tous les trois chantent donc avec moi ça faisait 4 lascars. Bref une formation basse-guitares-batterie que j’aime bien, un truc assez basique.
On a continué nos répétitions puis j’ai trouvé un petit studio, pas trop loin, où on a commencé à enregistrer des trucs par séquences de 3 ou 4 jours. J’ai fait une sélection et on a enregistré 14 titres… j’en ai retenu 11 qui sont finis.
Ils ont la même couleur, je ne voulais pas d’un patchwork sans queue ni tête. Je tenais à un son global pour l’album et je pense avoir trouvé le truc…
J’ai, à peu près, une heure car je ne voulais pas d’un album trop long. Je me demande même si je ne vais pas réduire à 40 ou 45 minutes comme un vinyle d’antan…

J’en suis au stade des mises à plat et il y a déjà des gens de maisons de disques qui en ont entendu des bribes. Maintenant ils sont tous rentrés de vacances donc ça va être le moment des démarchages «si ça vous botte on en parle et si ça vous botte pas ciao les mecs». Je trouverai toujours le moyen de le faire écouter au public d’une manière ou d’une autre. Que ce soit par l’intermédiaire d’une major ou d’un label indépendant… sinon je mettrai ça sur le net (rires) !
J’aurais aimé sortir tout cela à l’automne 2010 mais je suis à la bourre donc je me base, maintenant, sur le début de l’année 2011 avec, probablement, une tournée dans la foulée.

Je pense que l’aventure, avec A L’OUEST, va se poursuivre pour cet album et pour la route…
J’aime toujours faire des trucs différents qui me stimulent…
C’est marrant l’échange qu’il y a entre nous. Ils m’apportent des trucs et j’essaye de leur faire bénéficier de mes années de pratique. A des époques, je me suis vraiment éclaté à jouer avec des musiciens américains qui avaient accompagnés Iggy Pop, John Mellencamp, Eagle-Eye Cherry etc..
La dernière tournée était encore différente, avec une pedal steel (Claude Langlois, nda) et c’était cool…
Celle avec Hubert était encore un autre trip tu vois…

Je pense que c’est cette diversité qui fait que tu puisses te renouveler et qui te procure toujours des envies. Je ne pense pas que je pourrais avoir un groupe «standard».
Par moments il faut de nouveaux « stimulis » afin d’éviter de tomber dans la routine ou de se démotiver. J’aime bien faire, à chaque fois, de «nouveaux films» et ça dure le temps que ça dure… C’est toujours bien d’avoir de nouveaux objectifs !

As-tu une conclusion à ajouter ?
J’en aurai une à dire un jour mais ce sera vraiment la dernière. Donc je préfère éviter d’en donner une maintenant (rires).
J’espère qu’on aura, très vite, l’occase de se revoir et de reparler…
Donc «no comment conclusion» (rires) !

Remerciements : Gloria, Jean-Yves et Paul !

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Interview réalisée au Théâtre Municipal
de Haguenau

le 30 septembre 2010

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Propos recueillis par
David BAERST

 

 

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