Steve Verbeke
L'émission "blues" de radio RDL Colmar animée par Jean-Luc et David BAERST


La mode est plus vers les guitaristes de rock. Les musiciens tels que vous et (par exemple, Bo Weavil) plus ancrés dans la tradition, sont beaucoup moins médiatisés. Comment ressentez-vous cela ?

C'est vrai qu'ils ont besoin d'entendre des guitares fortes. Je ne sais pas : ça doit sans doute toucher les gens. Ou alors, on les entends mieux parce qu'ils jouent fort ! Ceci dit, les trois-quarts jouent très bien … Même si on aimerait entendre autre chose, aussi. Nous, on ne se plaint pas. Bo Weavil a l'air de jouer énormément. Quand les gens viennent nous voir, ils ont l'air contents, malgré tout.

Je joue avec Stan Noubard Pacha, qui joue très bien de la guitare. Sauf que quand il joue de l'harmo, tout à coup il vient m'accompagner. Quand il fait un chorus de guitare, c'est bien de la guitare. Quand je chante, il m'accompagne au chant. On essaye de faire au plus simple possible, en fait. Sans fioriture, en allant droit au but. On veut donner un truc véridique. A l'instant précis, et tant pis si c'est planté ! Le moment est passé …

C'est votre première venue en Alsace : l'occasion donc de vous présenter aux auditeurs qui ne vous connaissent pas forcément. Quel est votre style et quelles sont vos influences ?
Je joue de l'harmonica et je chante. J'essaye de faire mes chansons en français, ce qui forcément indique mes influences. Je ne peux pas éviter de citer mon père. C'est trop évident. Moi-même, j'ai du mal à savoir à quel point il m'a influencé. On est si proches …

Benoît Blue Boy m'a aussi énormément influencé par son jeu d'harmonica, sa manière de voir le blues et de plaquer des paroles dessus. Je suis personnellement très sensible à cet instrument. J'aime beaucoup les harmonicistes comme Sonny Boy, Little Walter, James Cotton. Il y en a beaucoup, même des plus récents comme James Harman, que j'adore ou Rod Piazza, qui possède un son énorme.

Petit à petit, on découvre tout le côté " orchestre ", qui fait que d'autres gens peuvent venir s'additionner. Les bassistes, les guitaristes, les batteurs viennent pour jouer. Ils sont indispensables. C'est moins flagrant à la première écoute, mais tout à coup c'est évident. Chacun a son rôle à jouer.

Je me situe en le Chicago blues et un truc plus rural : du côté des vieux du Mississippi qui essayent de jouer spontanément. C'est brut, à la limite proche de la transe et sans fioritures.

Quand on est tellement ancré dans le blues traditionnel, est-il envisageable d'évoluer ensuite sur de prochains albums ?
Je pense bien ! Actuellement, c'est dur à dire. Je suis en train d'enregistrer un disque avec Benoît Blue Boy et les musiciens de mon premier opus (Stan Noubard Pacha à la guitare, Fabrice Millerioux et Cédric Lesouquet à la basse). Nous travaillons à faire un disque " hyper roots ". Ce concept a tellement été répété qu'à la fin, personne ne sait plus ce qu'il veut dire.

En gros, tous les cinq jouent ensemble dans un petit studio. Tout a été réduit au plus simple. Chaque idée a été examinée et simplifiée. Les chansons que j'ai apportées avec moi ont été travaillées avec Benoît. On s'est retrouvé à retirer un paquet de choses. Du coup, on gagne en spontanéité. Malgré tout, étant entre connaisseurs de cette musique, on la joue spontanément.
Forcément, nos propres influences viennent s'y greffer. Mais on essaye de ne pas y réfléchir, comme les interprètes originaux devaient procéder. Quand Robert Johnson composait, il ne devait pas réfléchir à trente-six mille choses.

Sur scène, on construit un spectacle. Le public nous aide à tester nos compositions. Sinon, le mieux est d'y aller. A partir du moment où tu as écris une chanson, elle doit sortir telle quelle. On est partis pour faire un disque aussi brut que simple. Ensuite, on peut imaginer rencontrer plein de gens, faire une super production, mêler plein d'influences ou tenter des choses différentes. Je n'en suis pas encore là.

Comment maniez-vous le français, lors de la composition de vos textes ?
Je n'ai réellement aucune recette. J'essaye juste de m'exprimer simplement. De manière à ce que les mots collent à leur propre sonorité. Tout en racontant une petite histoire … Mettre des phrases bout à bout n'offre aucun charme. Ce qui est drôle, c'est quand cette histoire soit importante pour moi, même si elle n'a pas pour autant un poids gigantesque.
C'est un jeu : on démarre sur une idée, une phrase marrante et on s'amuse avec. On ajoute une rime, une métaphore, un petit quelque chose de rigollot. Parfois, l'idée de départ va complètement changer en cours de route. La phrase initiale change de place, le sens est totalement bouleversé et une toute nouvelle chanson apparaît. Je prends vraiment ça pour un jeu.

Comment as-tu fait le choix de l'harmonica ? Comment le chant est-il venu ?
J'ai commencé par l'harmonica. Le chant n'est venu qu'ensuite. J'ai vraiment été séduit par la sonorité de l'instrument. Par tous les sons que ce petit instrument pouvait donner. Egalement par les harmonicistes eux-mêmes, humainement parlant. J'ai eu la chance, grâce à mon père, de les côtoyer assez jeune, sans même m'intéresser à la musique.
Des gens tels de Vincent Bucher, Pascal Michaelian, Benoît Blue Boy. J'avais envie de leur ressembler, sans parler d'harmonica ou de jouer d'un instrument. Ils ont un truc en commun. Un côté " humain hyper sympathique ". En plus, je me suis retrouvé à apprécier énormément l'harmonica. Le tout mélangé a fait que je me suis retrouvé orienté sur ça.

J'ai commencé à chanter pour pouvoir jouer les morceaux qui me faisaient envie. Au départ, quand j'ai commencé à monter mon premier groupe, il fallait trouver un chanteur qui accepterait de chanter ce qu'on aimerait. Au bout d'un moment, je me suis dit que je pourrais aussi chanter. Au début, c'était n'importe quoi.

Petit à petit, je me suis mis à aimer ça et à le prendre plus sérieusement qu'au départ. Maintenant, c'est à égalité avec l'harmo …

Tu n'as pas parlé de ta rencontre avec Junior Well (intervient Patrick V.) !
C'est vrai que c'était énorme ! Je l'ai rencontré deux fois. Une fois au Méridien, lorsqu'il jouait encore avec Buddy Guy. Je crois que c'était d'ailleurs Kenny Neal qui assurait la basse. Je devais jouer de l'harmonica depuis six mois, à tout casser. En gros, je ne savais rien faire. Quand je l'ai vu jouer, ça m'a scotché. Tout était là : physiquement et musicalement, tout me plaisait. Sa présence scénique m'a impressionné. Après, je suis allé lui serrer la main avec un de ses disques.

Un peu plus tard, je l'ai vu au Cirque d'Hiver avec mon père. En deux secondes, il m'a montré comment jouer de l'harmonica ! Le cours était instantané, sans harmonica - juste avec les mains.
C'est très visuel, évidement. Tu veux jouer en acoustique ? Ca se passe comme ça. Electrique ? Comme ça. Et il est parti avec un grand sourire. Voilà, t'as tout compris et sinon, démerdes-toi ! Ok, c'est pourquoi j'ai envie de jouer de l'harmonica. C'est hyper simple.

Avec ton groupe, quel est ton rythme de représentation ?
Pas assez, mais le plus possible ! On aimerait bien pouvoir jouer plus, surtout en ce moment. Sortir du circuit parisien, par exemple. On commence par jouer dans les petits endroits autour de chez soi. Petit à petit, l'envie vient de jouer ailleurs, de rencontrer plus de gens. Ça prends son temps, mais j'espère continuer dans cette direction.

 

 
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Les liens :

Interview réalisée au
Festival Country à
Lingolsheim le 23 mars 2001

Propos recueillis par
David BAERST et Jean-Luc

En exclusivité !

Interview de Steve Verbeke

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