Sugaray RAYFORD
L'émission "blues" de radio RDL Colmar animée par Jean-Luc et David BAERST

Pour commencer cet entretien Ray, peux-tu me parler de tes origines ?
Mon nom de scène est Sugaray (son vrai patronyme est Caron Rayford mais il se fait appeler Ray, Nda), je suis originaire du Texas mais je vis aujourd’hui à Los Angeles, en Californie.sugarray

D’où te vient, justement, ce nom d’artiste ?
Je porte ce nom depuis très longtemps (rires) !
Comme tu peux le remarquer j’ai été assez accroc aux sucreries à une époque (rires).
Mes copains ont donc commencé à me donner divers surnoms comme « Sugar Daddy » etc…
Finalement c’est Sugaray qui a pris le dessus et qui, aujourd’hui, fait carrière.

Peux-tu me parler de la manière dont la musique s’est immiscée dans ta vie, lorsque tu étais enfant au Texas ?
J’ai vécu une enfance particulièrement difficile. Il ne m’était pas rare, à cette époque, de devoir passer cinq, six ou sept jours en ayant rien à manger. Ma maman est décédée, très jeune, des suites d’un cancer… Je préfère t’épargner certains détails…
Mes seuls souvenirs heureux, de cette période de ma vie, datent de certaines de mes vacances d’été. Je les passaient chez ma grand-mère à Taylor. Grâce à elle, la musique est entrée dans ma vie. Il s’agissait du gospel que j’ai découvert en l’accompagnant à l’église. En effet, c’était une femme particulièrement religieuse…
A la disparition de ma mère je suis resté vivre avec elle. Je l’ai quittée dans les années 1980. Je voulais partir à l’aventure et cela a commencé par mon service militaire…

C’est donc au gospel que nous devons tes débuts de chanteur…
Absolument, et non seulement c’est ainsi que j’ai débuté dans le chant mais j’ai, également, pratiqué la batterie à cette époque. Je n’étais qu’un gamin lorsque tout cela a commencé, j’avais 3 ou 4 ans…
C’était une bouffée d’oxygène pour moi. Par la suite j’ai donné énormément de shows dans ce registre.
Je dirais même que je jouais encore davantage de batterie que je ne chantais. J’étais très sollicité (rires)…

Est-ce qu’il t’arrive encore de jouer un peu de batterie, ne serait-ce que pour le « fun » ?
Une fois de temps en temps… Je me débrouillais bien mais j’ai beaucoup perdu. C’est comme avec tous les instrument, à partir du moment où tu t’arrêtes… il devient très difficile de retrouver ton meilleur niveau.

En dehors de la musique sacrée, quel a été ton premier frisson musical ?
Au risque de t’étonner, j’ai été très sensibilisé par le break dance. Notamment via le programme de télévision « Stars Search ». Par la suite, je suis remonté aux origines de ce mouvement, ce qui m’a permis de découvrir Al Green et, de fil en aiguille, Marvin Gaye, Bobby Bland etc…
De plus j’avais un oncle qui était un grand fan de ZZ Hill. Il me faisait écouter des disques de ce dernier et fredonnait par-dessus (Ray se met alors à entonner « Down Home Blues », nda).
Souvent ma grand-mère se mettait à hurler après lui, lorsqu’il chantait, en disant « Tu ne peux pas interpréter des choses comme cela! » (rires).

Quels sont les premiers musiciens que tu as rencontrés ?
Oh mon Dieu, je ne vais pas m’en souvenir… il faudrait que je remonte le temps.
Il y a beaucoup de musiciens à côté desquels j’ai grandi.
Je pense que ma mère était, probablement, la meilleure chanteuse qu’il m’ait été donné d’entendre…
Je me souviens aussi du Révérend Devereux qui venait de la Nouvelle-Orléans. C’était un créole qui n’hésitait à donner l’autorisation, à certains guitaristes, de se produire dans l’église. Avant lui, cet instrument n’y était pas très répandu. En principe il y avait juste une batterie et un piano, ou un orgue Hammond B3.

Peux-tu me parler de ton premier groupe « Urban Gypsys », fondé en 1998 ?
(Ray éclate de rires, nda) Oui, bien sûr !
Nous nous sommes rencontrés dans un Club. Chaque membre du groupe jouait déjà dans un ou plusieurs autres combos. Le mercredi soir était le jour de la semaine où ce Club donnait une chance aux nouveaux groupes. C’est à cette occasion que j’ai rejoint certains d’entre eux sur scène. Les affinités se sont créées entre plusieurs d’entre nous et nous avons eu l’idée de fonder ce groupe. Notre répertoire s’est rapidement fixé du côté de la soul, du funk et du rhythm & blues.
Nous avons eu l’opportunité de faire les premières parties d’artistes confirmés. C’est par cet intermédiaire que j’ai « grandi » dans le métier de chanteur. C’était le premier groupe que je rejoignais depuis ma période gospel. Entre-temps j’avais passé de nombreuses années loin de la musique, pas loin de 20 ans…

Une expérience qui a rapidement été suivie par une autre puisque tu as, peu de temps après, rejoint les Aunt Kizzy’s Boys…
J’ai décidé de quitter les Gypsys car je voulais revenir à un blues plus pur et a une musique qui soit davantage chargée en feeling. J’étais un peu fatigué par ce milieu. D’autant plus que je travaillais la semaine et chantais souvent le soir ainsi que les week-ends. Heureusement pour moi, ma femme m’a épaulé durant cette période et m’a aidé à chercher les ressources nécessaires pour ne pas flancher. Elle me répétait que j’avais besoin de chanter et disait « non, reste là! » quand je me levais en soupirant « je dois aller travailler… ».sugarray
Un jour elle s’est installée devant l’ordinateur afin de voir quelles étaient les jams les plus réputées dans notre secteur géographique. Elle en a remarqué une à Temecula, qui se déroulait dans un Club répondant au doux nom de « Rythm & Blues ». Elle m’a, littéralement, traîné à l’une de ces jams…
Comme sont nom l’indiquait, la programmation était très orienté rythm & blues et le niveau était excellent. J’y ai discuté avec le batteur qui animait la jam session. Quand il a appris mon cursus et que je voulais chanter dans un registre blues il m’a, immédiatement, parlé d’un groupe du coin (Urban Sweet) qui était là. Ainsi, il m’a permis de rencontrer celui qui allait devenir mon guitariste au sein des Aunt Kizzy’s Boyz (Ray doit probablement faire référence à Jim King, nda). Nous avons, rapidement, commencé à faire quelques concerts et c’est ainsi que l’aventure a commencé (une aventure qui mènera le groupe à la deuxième place de l’International Blues Challenge de Memphis en 2006 et qui lui a permis d’être primé au Los Angeles Music Network Jam, nda).

Cela se passait donc du côté de San Diego…
Oui, au nord de cette ville, davantage à la campagne…

Es-tu revenu au Texas dans ton habit de chanteur de blues ?
Figure toi que je n’ai jamais chanté au Texas…
J’ai fait ce métier un peu partout dans le monde sauf dans ma propre ville, ni même dans l’état d’où je suis originaire.

En tout cas, ce doit être un grand plaisir d’avoir intégré la scène blues californienne…
Oui c’est extraordinaire, cette scène est vraiment énorme…

Avant de reprendre la musique, pourquoi avoir décidé de déménager en Californie ?
Ma femme possède un ranch à San Diego, elle a dirigé sa propre entreprise pendant une quinzaine d’années mais elle était en concurrence avec un hôpital de Los Angeles. Au bout d’un moment, elle a décidé de s’installer dans cette ville.

Quels sont les grands souvenirs, liés à la musique, que tu as pu vivre en Californie ?
Wouah…
Je garde un grand souvenir de ma jam en compagnie du guitariste Slash (du groupe Guns N’ Roses, nda), c’était très cool ! Le fait d’avoir remporté un trophée (Meilleur nouveau chanteur) me tient aussi, particulièrement, à cœur. Après avoir donné énormément de concerts au sein de groupes, je conserve un immense souvenir de la première fois où j’ai vu mon nom sur une affiche.
J’ai aussi eu la chance de chanter aux côtés d’Etta James et de bien d’autres musiciens, à partir du moment où je me suis installé à Los Angeles. Je m’estime très chanceux car je suis un chanteur de blues qui ne s’est pas contenté de partager la scène avec des artistes issus du même idiome. J’ai rencontré des guitaristes, pianistes et chanteurs venus d’horizons très variés (Al Kooper, Steve Lukather, Mike Finnigan etc…).
Il est aussi souvent plus difficile de s’imposer lorsque l’on est qu’un chanteur et pas un chanteur et musicien. J’ai eu cette chance, comme avant moi des grands noms tels que Otis Redding ou Bobby « Blue » Bland.

Justement, dans quelle catégorie de chanteur te positionnerais-tu ?
J’aime le blues sous toutes ses formes. Je ne sais pas si je pourrais me positionner dans une catégorie bien précise. Je chante et j’écris des chansons du mieux que je peux. Certains disent que mon style est très proche du gospel, une musique avec laquelle j’ai grandi…
Mais je préfère dire que je suis moi, tout simplement.

As-tu déjà eu l’occasion d’enregistrer quelques disques sous ton propre nom ?
Je suis actuellement en Europe afin de promouvoir mon disque « Blind Alley » dont je suis très fier. Il est programmé sur de nombreuses radios et a déjà eu l’honneur de quelques télévisions.
Cet album se nomme « Blind Alley » et il faut l’acheter (rires) !

Je crois qu’il ne s’agit pas de ta première tournée en France…
En effet, je suis déjà venu avec le groupe Aunt Kizzy’z Boyz en 2007. Nous avions participé au Festival Blues sur Seine et y avions pris beaucoup de plaisir, cela reste un très bon souvenir. Ceci dit, le fait d’être de retour ici, pour y présenter mon travail personnel, est encore plus touchant.

Par quel biais as-tu rencontré le groupe Flyin’ Saucers qui t’accompagne sur cette tournée européenne ?
C’est Aurélie Rouquet (tour manager, société « On the road again », nda) qui m’a mis en contact avec ces musiciens. Elle a aimé mon disque et m’a envoyé un courriel afin de me proposer cette tournée européenne. J’ai été enchanté de prendre, alors, contact avec les Flyin’ Saucers et d’échanger avec eux jusqu’à mon arrivée.

T’attendais-tu à trouver un groupe d’une telle qualité ?
Oui, je dois t’avouer que je savais que les groupes de blues européens défendent aussi bien, sinon mieux, cette musique que leurs confrères américains. Aux Etats-Unis c’est le hip hop et le rock qui ont le vent en poupe. Je suis conscient, depuis un bon moment, qu’il y a d’excellents combos de blues en France, en Angleterre, en Espagne etc…
Ce sont ces pays qui permettent à cette musique de rester vivante. Ce sera intéressant de revenir aux USA après cette expérience. Je pourrai, un peu plus, faire prendre conscience aux gens que la vraie bonne musique est immortelle. Qu’elle se porte bien ici et qu’il n’y a pas de raison pour que les gros médias américains ne s’y intéressent pas plus qu’au hip hop par exemple.
Pour en revenir aux Flyin’ Saucers, je peux t’affirmer que je prends beaucoup de plaisir à écrire cette page de mon histoire musicale avec eux. Ils sont bourrés de talent et sont parfaits humainement parlant.

Connais-tu d’autres groupes de blues français ?
Je connais le groupe Awek que je trouve, également, excellent. En 2007 j’avais aussi rencontré Plan B, ce sont de très bons musiciens et des chouettes types. Il y a vraiment des musiciens d’exception en Europe et particulièrement en France. Lors de ma précédente venue, j’ai aussi fait une jam session avec un autre groupe de grand talent. Les membres étaient très jeunes, entre 19 et 21 ans peut être. Malheureusement je ne me souviens pas du nom de ce combo, c’était du côté de Lyon…sugarray

Le fait de jouer ta musique en France représente-t-il quelque chose de particulier pour toi ?
Oui, d’ailleurs lorsque tu fais un album et que tu as la possibilité de le défendre à travers le monde… tu fais en sorte de te comporter comme si tes chansons étaient tes enfants !
Tu prépares tout soigneusement, tu apprends bien tes textes, fais attention à tes vêtements etc…
Puis tu files tête baissée et tu te sens très fier (rires) !
Surtout lorsque les gens viennent te féliciter après un show. Tu as, alors, envie de les remercier d’apprécier autant tes enfants (rires) !

As-tu des attentes particulières concernant cette tournée ?
Non sinon de faire prendre conscience aux gens que le blues s’apprécie sur disque mais qu’il s’agit, avant tout, d’une musique qui se vit dans les salles de concerts. C’est dans cet environnement qu’on se rend vraiment compte de qui je suis. Ce n’est pas à travers un disque que tu apprends à connaitre un artiste. Face à une scène, tu peux vivre la musique avec tous tes sens…
Je considère les gens qui viennent me voir davantage comme des amis que comme des fans. C’est dans ma personnalité, j’aime les gens. J’aime prendre des numéros de téléphones, des adresses e-mail etc…
Je souhaite toujours rester en contact avec le plus grand nombre de personnes. Cela me permet de les tenir informés de mes faits et gestes et de pouvoir les retrouver au fil des tournées.
Les chansons prennent toute leur dimension et deviennent réelles sur scène. Je veux donner un peu de mon âme et de mon esprit aux publics qui viennent assister à mes shows.

Quels sont les « travaux » sur lesquels tu te pencheras après cette tournée ?
Trois ou, peut être, quatre jours avant de venir ici afin d’effectuer cette tournée, j’ai signé un contrat pour devenir chanteur au sein du groupe américain Mannish Boys (grand groupe de blues californien fondé, entre autres, par le guitariste Kirk Fletcher en 2004, nda). Ceci va me permettre d’intégrer le fameux label Delta Groove. De grands chanteurs ont déjà participé à cette aventure musicale, c’est une vraie référence !
Je ferai mon premier concert, avec les Mannish Boys, le 28 mai 2011. Nous participerons au plus grand Festival de blues espagnol. Quelle chance, c’est vraiment formidable !
J’ai, également, des chansons de prêtes pour mon futur album. Je vais travailler dessus très activement…

Toutes mes félicitations, c’est vraiment une aventure passionnante qui s’annonce pour toi… Sinon, as-tu une conclusion à ajouter ?
Merci beaucoup à toi !
Tout ce que j’aurais à dire, en conclusion, tient en ces quelques mots :
Longue vie au blues et longue vie à ceux qui aiment le blues !

Remerciements : Fabio et tous les autres membres des Flyin’ Saucers

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Interview réalisée
au Le Freppel
à Saint-Martin
le 29 avril 2011

Propos recueillis par
David BAERST

En exclusivité !

 

 

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