L'émission "blues"
de radio RDL Colmar animée par Jean-Luc et David BAERST
Jim, pour commencer, peux-tu me présenter les musiciens qui constituent The Jim Jones Revue ? Jim Jones : J’ai commencé seul en chantant et jouant de la guitare. Puis Rupert Orton m’a rejoint et il est devenu mon complément en tant que guitariste. Il est, aussi, à l’origine du son du groupe. Aux claviers c’est Elliot Mortimer qui se distingue des autres pianistes par son engagement total lorsqu’il joue. Nous devons le côté « heavy » du groupe à notre bassiste Gavin Jay. Enfin notre moteur est Nick Jones à la batterie.
Quand avez-vous commencé à jouer ensemble, peux-tu me dresser un historique du groupe ? Jim Jones : Tout a vraiment débuté il y a deux ans lorsque, pour la première fois, nous nous sommes retrouvés tous ensemble. Nous avons commencé, alors, à écrire et nous contentions de faire quelques concerts à l’échelle locale (Ce groupe anglais est originaire de l'est de Londres, Nda).
Au bout d’un an, notre travail a commencé à payer et nous avons décidé de prendre la route afin de nous produire dans le cadre de tournées plus importantes.
C'est lorsque j’ai décidé de mettre un terme à mon précédent groupe, Black Moses (Jim était déjà, précédemment, le leader de Thee Hypnoticks entre 1988 et 1994, Nda) que j’ai accentué mon travail aux côtés de Rupert Orton. Ensemble nous avons longuement discuté de l'industrie de la musique et de ce qui nous intéresse musicalement parlant. Nous nous sommes trouvés de nombreux points communs dont l’amour du Rock’n’roll des années 1950. Aussi nous avons rapidement estimé qu’il manquait un pianiste à notre projet. C’est un autre groupe qui m’a permis de rencontrer Elliot Mortimer. De par son style et son attitude scénique il nous apporte quelque chose d’unique. Il était vraiment fait pour intégrer notre projet…
Par la suite c’est Gavin qui nous a rejoints. Lui aussi se produisait dans un autre groupe. Après l’avoir entendu jouer une de nos chansons nous sommes, tout de suite, tombés d’accord pour l’engager.
A titre personnel, quand as-tu découvert le Rock’n’roll ? Jim Jones : A l’origine, je devais être très très jeune…
Je bénéficiais de la collection de disques de mes parents. Mon père et mon oncle possédaient beaucoup de vinyles en 45 tours. A leur époque, la seule chose d’intéressante pour les jeunes était le tourne disques. Aujourd’hui les adolescents ne jurent que par les I Podes, les Game Boy, les Playstations, les Xbox etc…
J’ai, ainsi, découvert tous les trésors de leurs discothèques respectives et je consacrais tout mon temps libre à passer et à repasser les mêmes disques. Je me suis, très vite, passionné pour ceux d’Elvis Presley, Little Richard et Jerry Lee Lewis… Depuis cette époque, je baigne dans cette musique ! Rupert Orton : Je me souviens que mes parents ne passaient pas beaucoup de Rock’n’roll à la maison… La première fois que j’en ai entendu je suis resté complètement « scotché » car je n’avais jamais rien entendu de tel auparavant. C’était chez un ami qui avait le 45 tours d’Elvis Presley « Jailhouse Rock ». J’ai fait comme Jim, je me suis passé le disque tout un après-midi durant… Je ne pouvais y croire et me demandais de quoi il pouvait bien s’agir… Je n’avais jamais ressenti de telles sensations de ma vie, cela a été une véritable révélation pour moi.
Est-ce que l’Angleterre est toujours un pays important pour le Rock’n’roll traditionnel ? Jim Jones : L’Angleterre est, de toute façon, un pays idéal pour se sentir bien. Il y a beaucoup de groupes qui arrivent à vivre de leur musique, à partir du moment où ils se décident à se consacrer complètement à leur art. Rupert Orton : Depuis un an nous avons probablement fait plus de concerts à l'étranger qu'en Angleterre. Nous sommes, peut être, un peu décalés par rapport à la réalité. De plus, nous sommes tous anglais, en dehors de notre batteur qui est d'origine écossaise. Londres est la ville où nous avons fait le plus de concerts et, de ce fait, elle tient une place un peu particulière dans nos coeurs.
Quelle est, pour toi Jim, la chose la plus importante dans le Rock'n'roll ? Jim Jones : Je crois qu'il y a deux éléments primordiaux...
Le premier est l'énergie Punk-Rock, comme le disait le groupe MC5 “Kick out the jams or get off the stage”. Il faut y mettre tout son coeur, déployer une énergie Punk-Rock mais en y ajoutant un autre élément très important... le swing !
Il y a beaucoup de groupes qui savent mettre du swing dans leur musique mais qui restent trop doux. Ce sont, pour moi, des groupes de salon...
A mon avis le Rock'n'roll a besoin de ces deux éléments. Par exemple si le Punk-Rock et le Rockabilly font abstraction du swing, cela peut devenir de la musique pour skinheads. C'est au mélange de la culture noire et de la culture blanche que nous devons la musique que nous aimons. Les origines du Rock'n'roll remontent aux années 1950, voire avant, avec l'émergence de sons sortis de l'imagination de musiciens noirs.
Comment vous différenciez-vous des autres groupes de Rock'n'roll ? Jim Jones : Nous essayons de proposer quelque chose de différent au public.
Nous avons l'occasion de voir énormément de groupes en concert, particulièrement à Londres, et nous trouvons souvent qu'il leur manque quelque chose. Parfois leurs prestations sont très moyennes, on a l'impression qu'ils viennent sur scène en ouvrant une boite de Pandore et nous regardons cela avec une certaine satisfaction (rires).
C'est ainsi que nous essayons de nous différencier, en exploitant notre propre personnalité et en jouant pour de vrai, en nous engageant totalement dans ce que nous faisons.
Vous allez faire quelques concerts avec Chuck Berry en Angleterre (tournée reportée en mars 2010, NDA). Que cela représente-t-il pour vous ? Jim Jones : C'est simplement incroyable ! Rupert Orton : L'année dernière Chuck Berry s'est produit au 100 Club qui est une petite salle à Londres. Son passage dans ce lieu a été un grand évènement. Je connaissais bien le promoteur du concert qui nous a proposé de faire cette tournée en 2009. De plus il m'a dit que Chuck croit beaucoup en nous...
C'est un très grand honneur, d'autant plus que j'ai toujours été très inspiré par lui. Il dégage une réelle passion, c'est le plus grand guitariste de l'histoire du Rock'n'roll !
Il est, quelque part, le premier Punk-Rocker puisque c'est lui qui, dans les années 1950, a transformé le Jump-Swing de Louis Jordan en cette chose, alors nouvelle, qui est devenue une véritable révélation pour le monde entier. C'est incroyable de savoir, aujourd'hui, que nous allons jouer avec lui !
Pouvez-vous me parler de votre nouveau CD “Here to Save Your Soul” que vous distribuez sur cette tournée ? Rupert Orton : Il s'agit, en fait, d'une “collection” de tous nos singles à ce jour. Ce disque est disponible en vinyle 33 tours et en CD, il contient, également, deux nouvelles chansons. Nous travaillons, actuellement, sur un nouvel album qui est prévu pour l'année prochaine. Quoiqu'il en soit il s'agit d'un bon regroupement de titres très Rock'n'roll. Si tu as envie d'un peu d'ambiance dans ta maison, mets ce disque et tu verras...
De quoi parlent exactement vos chansons ? Jim Jones : Nos chansons parlent de la vie telle qu'elle est aujourd'hui. Les gens associent notre musique aux années 1950 mais nous évitons de parler de Cadillac, de Lycées, de milk-shakes, de hamburgers, de bière et de cigarettes...
Nous essayons simplement de rendre compte de ce qui se passe aujourd'hui. Nos textes sont le reflet de ce que peut être la vie à Londres actuellement. Nous pouvons y raconter une journée habituelle, du lever à nos promenades en ville et même évoquer ce qui nous rend heureux. Nous ne cherchons pas à perpétuer un trip nostalgique et ne sommes pas un groupe de “revival” ...
Êtes-vous un groupe “engagé” ? Jim Jones : non... Rupert Orton : Je pense que pour être engagé, il faut bénéficier d'une certaine expérience qui peut vous permettre de prendre position sur tel ou tel sujet. En ce qui nous concerne, nous n'avons pas cette prétention. C'est pour cela que nous préférons, à la manière d'un groupe de Blues, parler de ce que nous connaissons, c'est à dire de notre quotidien. De même, pourquoi évoquer les Cadillac alors que, depuis que je suis né, je n'ai jamais vu de Cadillac dans les rues de Londres. Notre priorité est de faire la part belle aux aspects réels de la vie.
Quelle est votre propre définition de la musique que vous produisez ? Jim Jones : C'est du Rock'n'roll, mais je ne connais personne qui fasse du Rock'n'roll de la même façon que nous à l'heure actuelle. Nous sommes très fiers d'avoir un pianiste et organiste tel que le notre. Je trouve que c'est un manque dans beaucoup de groupes, il suffit de regarder autour de soi. C'est un honneur d'apporter ce son complètement inédit dans un groupe de Rock'n'roll. Sinon je ne peux pas vraiment décrire notre musique... Rupert Orton : C'est quelque chose de différent qui est véhiculé par un puissant feeling...
Que pensez-vous du Rock britannique actuel ? Jim Jones : Je dois avouer que nous avons un emploi du temps tellement chargé qu'il nous est devenu difficile d'écouter ce qui se fait actuellement autour de nous. Nous avons, cependant, eu l'occasion de partager la scène avec des personnes intéressantes comme Honkeyfinger qui produit un mélange éclectique à base de Blues. Il y a des artistes, comme lui, qui savent produire de nouvelles choses en s'inspirant de nombreuses musiques différentes (Blues, Rock'n'roll, Hard Rock etc...). C'est une chose que nous apprécions beaucoup. Avec qui avons nous encore joué ces derniers temps ? Rupert Orton : The Fabulous Penetrators ! Jim Jones : Oui, The Fabulous Penetrators qui est un très bon groupe de Garage-Punk ... Rupert Orton : Il y a de plus en plus de groupes, y compris des jeunes, qui revendiquent les mêmes influences que nous. C'est une très bonne chose et nous nous réjouissons de voir cette forme de musique devenir de moins en moins marginale.
Que pensez-vous d'un artiste comme le pianiste et chanteur Mike Sanchez qui se produit dans un registre beaucoup plus traditionnel ? Rupert Orton : Il est vraiment brillant ! Jim Jones : Nous l'avons découvert “par surprise” alors que nous jouions dans le même Festival que lui en Belgique. Rupert Orton : Nous l'avons entendu alors que nous marchions vers le bus afin de rejoindre notre hôtel. Nous nous sommes dit “mais quel est ce putain de pianiste!” Jim Jones : Oui il jouait un truc genre “Rocket 88” de façon incroyable ! Rupert Orton (redoublant d'enthousiasme) : Nous avons appris, alors, qu'il est également anglais. Ce mec est incroyable, il nous a littéralement transpercés ! Jim Jones : De plus il est authentique, vraiment authentique ...
C'est incroyable d'entendre un mec jouer avec autant d'engagement cette musique, de plus c'est un véritable showman... Rupert Orton : Et il a un charisme incroyable ! Jim Jones : Oui, il est très charismatique... Rupert Orton : Dans un style différent, il m'a même fait penser à Johnny Thunders. Comme lui, Mike Sanchez possède une personnalité à part.
Le fait de vous produire en France représente-t-il quelque chose de particulier pour vous ? Jim Jones : J'estime que c'est de la France que le “Buzz” a démarré. Depuis que nous avons joué ici pour la première fois, notre carrière connaît une ascension fulgurante. Partout où nous passons il y a beaucoup de monde. Je trouve que les gens connaissent vraiment bien la musique dans ce pays, ils la comprennent immédiatement et en ont une idée exacte. Il y a une grande histoire entre ce pays et le Rock'n'roll. Ils n'en connaissent pas que les origines...
Être Rock'n'roll n'est pas chercher à avoir les mêmes attitudes que Joe Strummer ou boire le même whisky que Lemmy Kilmister du groupe Motörhead. Être Rock'n'roll c'est choisir ta propre voie et faire ce que ta personnalité te pousse à faire. La France a toujours conservé cet esprit de liberté, on le constate en lisant l'histoire du pays.
Le groupe a déjà vécu, très rapidement, de grandes expériences en France. Nous adorons venir ici, nous nous y sentons vraiment bien. Rupert Orton : Je venais déjà régulièrement en France auparavant, je prenais le ferry. De plus vous avez de formidables festivals ici en été !
Nous avons pu nous en rendre compte par nous-mêmes en faisant face à des publics très réactifs, c'est vraiment un plaisir !
Et connaissez-vous des groupes de Rock'n'roll français ? Jim Jones : Johnny Hallyday, sinon je ne connais pas beaucoup d'artistes français... Rupert Orton : Je crois qu'il y avait un groupe du nom de Téléphone que Johnny Thunders respectait. Jim Jones : Quand j'étais jeune, j'ai eu l'occasion de venir voir un guitariste qui s'était installé près de Paris et avec lequel j'étais devenu ami durant les dernières années de sa vie. En effet, il est mort peu après dans un accident...
Il y a aussi Serge Gainsbourg qui est assez présent dans les collections de disques. C'est un peu près tout ce que je connais...
J'espère pouvoir découvrir d'autres artistes très vite mais je n'en ai, malheureusement, pas beaucoup le temps actuellement. Nous jouons toutes les nuits...
Nous étions hier soir à Paris, avons roulé une bonne partie de la journée, nous jouons à Strasbourg cette nuit avant de reprendre la route demain matin pour Londres. Puis nous reviendrons en France...
Nous jouons toutes les nuits pour le moment et nous attendons impatiemment nos quatre prochaines journées de repos, juste avant de partir en tournée avec Chuck Berry...
C'est un travail formidable et passionnant mais nous sommes très occupés et n'avons guère le temps de pouvoir faire autre chose ou de se dire que telle ou telle chose est à la mode ou complètement folle. Il faut toujours donner le meilleur et être de plus en plus fort...
Nous avons la chance de Jouer avec The Dead Weather demain soir à Londres, c'est parce que nous avons été invités par Jack White que nous y retournons. Il nous a entendu, a aimé le groupe et a décidé de nous inviter afin de partager la scène avec lui. Son nouveau groupe est vraiment fantastique...
C'est un métier étrange qui nous prend tout notre temps, notre énergie et qui nous pousse à toujours être prêt pour le concert suivant...
Pouvez-vous revenir, plus en détails sur vos projets ? Rupert Orton : Nous jouons demain soir à Londres avec The Dead Weather. Immédiatement après cela nous reviendrons en France avant de repartir en Angleterre pour la tournée avec Chuck Berry. Puis nous ferons une tournée en Hollande...
Nous enregistrerons notre nouvel album cet hiver, il sortira l'an prochain...
C'est un projet très excitant !
Nous reviendrons en France afin de participer à des grands Festivals et y ferons, avant cela, une tournée plus conséquente dès le printemps.
Autre gros projet en vue, nous envisageons d'aller nous produire aux USA pour la première fois. Ce sera une expérience très intéressante pour nous, musiciens anglais, d'aller présenter notre vision de la musique américaine sur ses terres. Ce sera très excitant de nous rendre sur le lieu de naissance des musiques que nous aimons...
Souhaitez-vous ajouter une conclusion ?
Jim Jones : Pas vraiment sinon que c'était un réel plaisir de te rencontrer ...