The Reverend & The Saints
L'émission "blues" de radio RDL Colmar animée par Jean-Luc et David BAERST

 

Lionel, première question, pourquoi avoir décidé de dissoudre ton précédent groupe, The Reverend Blues Gang ?
The Reverend (Lionel Raynal
) : Ce n’est pas une décision que j’ai prise tout seul. Tous les musiciens sont partis vers des horizons différents, certains en Afrique et d’autres sur le continent.
Peut être que l’envie n’était plus là et il faut avouer que, moi-même, je me sentais au beau milieu d’un véritable «glissement» qui me ramenait vers mes racines, vers le blues…
On virait, de plus en plus, vers le heavy rock et nous pratiquions du blues à la Motörhead…
Je n’ai rien contre ce groupe mais cela ne correspondait plus à ce que j’avais envie de faire.
Pour l’album «I Have A Dream», j’ai pu compter sur l’appui de Mike Ravassat,, Anthony Delannoy (deux ex Reverend Blues Gang) et de la batteuse Aurélie Simenel qui joue habituellement avec Alexx & The Moonshiners. Ils m’ont donné un sérieux coup de main pour réaliser ce CD sur lequel j’ai également pu compter sur quelques invités comme Beverly Jo Scott, Paul Personne et Little Bob.
Après ça a été la descente aux enfers, j’ai rencontré le Diable et les démons…
Puis est arrivé Yan «Monsieur Blues» Laguide, mon grand ami et bassiste. C’est quelqu’un de fantastique qui a pris sur lui le fait d’aller me récupérer dans les champs. J’étais, en effet, devenu éducateur dans un centre d’insertion. Il prenait sa voiture pour me chercher, m’emmener aux répétitions puis me ramener chez moi. Il s’est vraiment occupé de ma personne et m’a chaperonné…
J’ai pu compter sur lui ainsi que sur ma femme et mes enfants, ça m’a fait énormément de bien…

Outre Yan, peux-tu mes présenter les autres membres de ton nouveau groupe The Saints ?
The Reverend
: Il y a Rudy Bousquet à la guitare. Je le connais depuis plus de 20 ans… Nous nous aimons profondément et nous nous sommes toujours dit que nous devrions jouer ensemble.
Les années passaient, les cheveux tombaient, les tempes grisonnaient et rien ne se passait…
Un jour Yan lui a demandé de nous rejoindre alors qu’il avait déjà enregistré 3 albums avec le groupe KOB dont il était membre. Il a mis tout son talent et toute sa gentillesse à notre disposition… nous constituons une furieuse équipe !
Notre «maitre des fûts, Bob the drummer» est Bruno Tsivatou. Nous avions commencé avec un batteur (Olivier Bertin) qui nous a rendu de nombreux services. Pour des raisons personnelles et familiales, il ne pouvait plus assurer les concerts. Comme Bruno venait de quitter les Shaggy Dogs, son intégration s’est faite rapidement. Il a un tel talent que nous avons l’impression que ça fait plusieurs années qu’il joue avec nous.

Tu faisais référence à une période sombre que tu as traversée. Ce mauvais passage t’a-t-il aidé afin de te remotiver ou de trouver de nouvelles sources d’inspiration pour ton travail actuel ?
The Reverend
: C’est dur tu sais…
Comme on dit «ce qui ne tue pas rend plus fort»…
Cela reste dans le domaine des citations car le tunnel est noir et on ne voit la lumière, qui se trouve au bout de celui-ci, que par intermittence. Heureusement que j’ai eu la main de Yan, mon épouse et mes gosses pour me guider vers la lumière. Pour être honnête, ce passage de ma vie ne m’a pas aidé pour composer. Je travaille plus facilement dans la joie de vivre, ce que j’ai retrouvé aujourd’hui, «The Reverend is still alive and blue & well» !

As-tu pensé à tout arrêter à un moment ou à un autre ?
The Reverend
: Oh oui…
Il y a des gens qui deviennent des légendes en étant dans le stress, la «picole» et la came (comme Jim Morrison)… Pour ma part c’était plus la «poivrasse» que le «legend hero», j’étais le Morrison de quartier quoi…
Lors d’un concert, où Yan était présent, j’ai senti que j’avais atteint certaines limites…
Le fait de me produire devant un public qui m’aime, ou m’a aimé, dans un tel état m’a fait prendre conscience du fait qu’il valait peut être mieux que je m’arrête ou que je fasse autre chose.
D’où le sauvetage du Titanic par Yan (rires)…

Peux-tu me parler, plus en détails, de votre ligne directrice en ce qui concerne votre musique ?
The Reverend
: La donne est différente dans le sens où il y a un apport musical venant de tous les membres des Saints. La musique devient plus mélodique et est mieux construite. Je suis obligé de suivre et de faire beaucoup d’efforts afin que ma voix soit en symbiose avec l’ensemble. Notre musique est moins martelée et plus subtile. Avant c’était plus binaire, 3-4 et boum !
J’ai gagné en maturité et je me vois mal, maintenant, revenir avec un pantalon «moule couilles», les cheveux colorés et chanter du Iron Maiden pendant 3 heures.
De toute façon, ça ne m’intéresserait pas de le faire…
Sur scène nous interprétons, actuellement, les chansons de notre futur album. La musique a été composée, à 99%, par les Saints.

Quelles sont les principales sources d’influences du groupe ?
Yan Laguide
: Tout part du blues et du blues rock car il y a, quand même, des thèmes assez costauds…
On s’approche, parfois, du Chicago blues que j’adore et chacun amène sa propre expérience à notre projet. Si nous avons des âges différents, nos mentalités sont les mêmes. J’ai joué avec beaucoup de monde mais j’ai, rarement, été confronté à une telle cohésion humaine. C’est même la première fois que je me retrouve avec un groupe comme celui-ci… et c’est un vrai régal !
Je pense, sincèrement, que nous sommes partis pour une belle aventure…

Parmi les groupes actuels y’a-t-il des combos de rock (comme les Whites Stripes par exemple) qui vous touchent particulièrement ?
The Reverend : A la maison j’écoute Joe Bonamassa, Billie Holiday, Joe Cocker mais beaucoup moins les White Stripes que je respecte. Ces groupes marchent, actuellement, moins bien que les Black Eyed Peas ou Lady Gaga… et c’est bien dommage !
Les White Stripes sont de bons musiciens qui correspondent, cependant, aux valeurs marchandes du business donc, pour eux, c’est le jackpot !
Yan Laguide : Pour le moment notre démarche est, avant tout, de faire ensemble de la musique qui nous corresponde. Le public suit mais ce n’est pas encore notre priorité. Nous voulons, avant tout, faire la musique que nous aimons et travailler nos compositions ensemble.
The Reverend : Il y a même l’un de nos titres qui se nomme «No Concession Man», je suis un homme sans concession ! Sur notre album, que nous enregistrerons en décembre 2010, tu trouveras de la musique roots. Son originalité, qui hérissera les poils de certains intégristes de «l’hexagone blues», sera le son de Rudy qui joue sur une Gibson LesPaul Standard. Son son est énorme, à la Gary Moore…
Donc imaginez vous de la musique roots, avec une guitare surpuissante et ma grosse gueule par-dessus.
Le mélange va donc tirer vers le chili con carne et la purée-jambon, tu vois…
Merde mais on s’en fout, toi tu es un homme libre et moi je suis un rebelle…

 


Quels sont les thèmes qui seront abordés sur votre prochain album ?
The Reverend
: Il y aura un texte sur la maladie d’Alzheimer, un autre sur le fait d’être un homme libre qui dit ce qu’il pense. Le «débat» de cette chanson est la démocratie, toute critique est bonne à prendre… qu’elle soit bien formulée ou non. Etre un homme sur ses deux pieds, avec ses valeurs, qui sait dire merde ou non quand il le faut. J’ai aussi écrit un texte sur un bel évènement de ma vie, la naissance de mon petit-fils. Il y a, également, une chanson sur l’amitié entre deux hommes et une autre, plus politique, sur l’engagement. La vie est plus facile quand on se tend la main, cela fait plus avancer les choses que les fusils… Comme l’avait dit un célèbre président «on exporte pas la démocratie à coup de chars d’assaut». La guerre est une chose stérile dont on peut voir le résultat dans le monde entier. Les seuls qui se gavent sont les marchands d’armes…
Il y en a un qui est, actuellement, présent à la FIAC (Foire Internationale d’Art Contemporain). Avec l’argent du sang, il est devenu l’un des plus grands collectionneurs d’art au monde. Je ne pense pas qu’il va m’envoyer ses gorilles, pour me mettre une balle de 38 dans la tête, mais je tiens à le signaler !
Notre monde est «à cœur ouvert», saignant… il faut faire vite et l’opérer d’urgence…
Il n’y a que l’amour qui peut faire quelque chose…

Comment situerais-tu, actuellement, ta place sur la scène blues française ?
The Reverend
: Mon père était montreur d’ours, ma mère était trapéziste et nous vivions en Transylvanie… Ma jeunesse était difficile et nous ne mangions pas tous les jours. Mon père s’est fait mordre par son ours Youkouyou et après il a perdu son travail…
Je suis arrivé en France et je ne parlais, pratiquement pas, la langue de ce pays et (Lionel se met, subitement, à imiter Johnny Hallyday) alors j’ai découvert le blues avec mes potes de la Trinité : Claude Moine (Eddy Mitchell) et Jacques Dutronc…
(Lionel redevient sérieux) Je suis atypique, je suis moi-même…
C’est pour cela que nous participons à très peu de Festivals. Nous ne couchons pas avec l’un, on ne baise pas avec l’autre etc…
Bref, notre vie c’est pas «petits arrangements entre amis» pour citer un film célèbre…
Les gens savent que je suis un mec plutôt jovial mais je suis, aussi, un homme libre. Donc s’il faut faire des choses ou d’autres afin d’entrer dans des «chapelles» ou des clubs…
Je ne suis membre que d’un seul club, c’est mon PMU de quartier. C’est des potes, des vieux… d’ailleurs t’aurais pas le résultat du quinté ? Hallelujah !

Quels sont les artistes dont tu es le plus proche ?
The Reverend : On ne se voit pas souvent… Ceux que j’apprécie le plus sont : Little Bob, Nono Krief (tous deux sont des copains d’enfance, ils seront toujours là pour moi), Beverly Jo Scott (ma petite fée d’Alabama), Boney Fields (lui aussi a, toujours, répondu présent), Nina Van Horn (ma sorcière bien aimée), Philippe Grancher (l’homme aux belles chemises qui vient de sortir l’excellent album «Rock’n’roll»), Paul Personne…
Eux ils sont toujours là, même si c’est juste à travers un petit coup de téléphone pour prendre de mes nouvelles.
Je connais Nono Krief depuis l’âge de 17 ans. C’est quelqu’un qui n’a jamais faibli dans sa gentillesse avec moi, même à l’époque de Trust ou quand il accompagnait Johnny Hallyday. Il aurait pu «se la jouer» comme d’autres savent si bien le faire pour bien moins que ça…
Je tiens, aussi, à citer Fred Chapellier. Je dis bien Fred Chapellier et, non pas, Fred Chapellier LE guitariste de Jacques Dutronc. Il mène une formidable carrière sous son propre nom. C’est un très grand musicien de blues. Le fait qu’il ait accompagné Jacques Dutronc est une très bonne chose mais il ne faudrait pas que ça le suive toute sa vie. Il a énormément de talent en tant que «Fred Chapellier» point final !

 

Quels sont les objectifs que vous vous êtes fixés avec le groupe ?
Yann Laguide : Il n’y a pas de limites ! Sinon, pour Lionel, perdre 10 kilos… ce qui ne me ferait pas de mal à moi aussi !
Rudy Bousquet : Mon objectif est clair… C’est de virer The Reverend parce qu’il me casse les couilles, mais d’une force que tu ne peux pas imaginer. Lui c’est un homme libre mais alors qu’est-ce qu’il nous emmerde ! Bref, je souhaite donc le virer, apprendre à chanter et prendre sa place. Ce serait vraiment mon truc ! Après je pourrai dire «I’m a free man» comme il fait…
Plus sérieusement, je n’ai pas vraiment d’objectif. On y va et c’est tout, nous faisons cela car c’est une chose que nous aimons. Il se passe quelque chose quand on joue…
The Reverend : La musique que nous faisons est la seule que nous savons faire. Donc nous exerçons notre passion dans la joie, il n’y a aucune tension…
Si on se plante, on rigole puis on rattrape le coup. The Saints & The Reverend (Lionel a probablement inversé volontairement le nom du groupe dans sa phrase, nda) n’est pas une «machine huilée». Nous changeons notre setlist à chaque concert, on ne s’ennuie pas…
Les spectateurs viennent et sont considérés comme des convives, chez nous la table est toujours ouverte. Nous sommes de vrais cuisiniers : une entrecôte à droite, une choucroute à gauche… (Lionel prend une voix de commentateur sportif) Nous sommes d’ailleurs en ce moment en direct du Caf’ Conc’ d’Ensisheim où Madame Kopp nous a fait une choucroute «mes enfants»… Je ne sais même pas si je vais pouvoir jouer deux notes ce soir. Je suis «lesté comme un paquebot» !
Bruno Tsivatou : A titre personnel, mon objectif est de me faire plaisir. Après ça ira où ça voudra et où ça pourra…
The Reverend : Moi il faut que je change mon pommeau de douche… Yann son truc, c’est d’acheter des andouillettes AAAAA. Notre «asticot guitariste de génie», est un cas difficile (Lionel se met à parler très bas)… C’est un homme qui vit au bord du Loing, dans un Algeco et qui pêche le gardon pour se nourrir le soir.
Excuse moi d’autant déconner David mais on se connait bien. Nous avions passé un très agréable moment dans Route 66, en compagnie de Nina Van Horn (émission du 13 juin 2007, nda). Nous avions parlé de choses sérieuses mais nous avions, aussi, beaucoup rit. Tu sais que je t’aime bien David, et tu sais aussi que je n’aime pas les interviews «circonstanciées», façon Elise Ducet dans le journal télévisé, «Lionel Raynal, dit The Reverend, vous avez une longue carrière devant vous…». Chose à laquelle tu réponds (Lionel fait mine de s’endormir en répondant, nda) «Oui madaaaaaaame, bien sûr j’ai bien connu Elvis Presley, Mozart, Beethoven et tout…»… Donc on délire, on délire mais c’est comme ça que nous sommes !

Aurais-tu, malgré tout, une conclusion Lionel ?
The Reverend : Blues nothing but the blues !

http://www.myspace.com/thereverendlr

 
Interviews:
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Les vidéos
Les reportages
 

Les liens :

myspace.com/thereverendlr

Interview réalisée
Caf’ Conc’
d’Ensisheim
le 23 octobre 2010

Propos recueillis
par David BAERST

En exclusivité !


 

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