Theodis Ealey
L'émission "blues" de radio RDL Colmar animée par Jean-Luc et David BAERST


Theodis, peux-tu nous parler de ton environnement familial qui était très musical et, plus spécialement, de ton frère ?
Je suis né dans une petite ville du Mississippi. Celle-ci se situe à une cinquantaine de miles de la première grande ville qui est Natchez. C'est là-bas que j'étais à l'école et je suppose que c'est également à Natchez que j'ai commencé à jouer de la musique.

Avec mon frère, Bubba, nous appartenons à une fratrie de 11 enfants, soit 5 garçons et 6 filles. Je suis le dixième enfant et le cinquième garçon, le « baby boy »...
Bubba est le deuxième garçon, avant lui il y a eu George, puis YZ, Melwin qui est batteur et moi...
Bubba est guitariste, il a cédé son instrument à YZ au moment où il a quitté le Mississippi avant que j'en hérite à mon tour.

Au départ j'étais bassiste et nous avions un groupe avec YZ et Melwin. Nous jouions sur des scènes locales tout autour du Mississippi et nous nommions YZ Ealey and the Merrymakers. C'est lorsque Melwin est parti en Californie et que, de ce fait, le groupe se soit séparé que j'ai commencé à jouer de la guitare. J'ai alors intégré, en tant que guitariste, un autre groupe local qui se nommait Eugene Butler & the Rocking Royals. C'était la première fois que je me retrouvais à un tel poste au sein d'un orchestre. Puis j'ai commencé à accompagner une multitude d'artistes. Si je n'étais pas un accompagnateur régulier de tous ces gens, j'avais l'occasion de partager la scène avec eux et mes musiciens. Cela a, par exemple, été le cas en Californie pour BB King ainsi que pour Johnny Clyde Copeland, Little Milton, Charles Brown, The Blues Brothers...
J'avais mon groupe et je pouvais produire ma propre musique qui puisait dans le Blues traditionnel, le Funk, la Soul Music ainsi que dans le Jazz.

Je suis, en effet, influencé par le Jazz et j'adore la musique Country & Western qui me berçait lorsque j'ai grandi dans le Mississippi.
J'espère avoir créé mon propre son, un style qui soit représentatif de mes origines...
Lorsque je me suis produit au festival de Blues de Chicago, j'ai rencontré des membres de l'équipe de la revue ABS magazine. Il ont aimé ce que je faisais et en ont parlé au Cognac Blues Passions qui m'a contacté. C'est ainsi que je me retrouve ici aujourd'hui et j'en suis très heureux...

Bubba était le premier à jouer d'un instrument, est-ce que tes parents étaient aussi musiciens ?
Mon père et mon oncle étaient musiciens. Le frère de ma mère jouait un peu de guitare et mon père jouait de la slide. Cependant on ne peut pas les considérer comme de vrais guitaristes. Bubba est réellement le premier que l'on peut nommer comme tel...

A mon sens il reste le meilleur, il possède un vrai feeling et le son originel du Blues traditionnel dans la lignée de Lightnin' Hopkins et Lil' Son Jackson...

Quelles professions exerçaient tes parents à l'époque ?
Mon père travaillait comme métayer dans une ferme ainsi que sur un bateau sur le Mississippi. Je ne sais pas exactement ce qu'il faisait alors, il faut dire que je l'ai perdu alors que j'avais 9 ans. Je sais juste que c'était un homme de valeur que mes frères appréciaient beaucoup. Ma mère nous a appris les rudiments d'une scolarité élémentaire...

Quand tu dis que c'est Bubba qui pouvait être considéré comme le premier guitariste de la famille, qu'est-ce qui le différenciait de ton père par exemple ?
Bubba jouait dans les bars et les night-clubs alors que mon père ne jouait qu'à la maison. Bubba et  YZ se produisaient dans le cadre des fameuses « Friday Night Fish Fry » dans les Juke Joints.

Ces endroits existent-ils encore de nos jours ou cela a-t-il beaucoup changé ?
Il y a des lieux qui persistent mais l'esprit a un peu changé. Bubba et YZ jouaient dans des « House Party » qui étaient organisées par des particuliers qui, à cette occasion, faisaient du poisson-chat frit. Ce plat était accompagné par une salade de pommes de terre et d'une liqueur locale « corn liquor » qui était très bonne... La « Mississippi Corn Liquor » (rires) !

Est-ce que tu sais la fabriquer ?
Non mais j'aimerais beaucoup (rires)....

Peux-tu nous parler de ta collaboration avec le label Ichiban Records ?
Je suis rentré en contact avec le label alors que je jouais dans un Club très réputé d'Atlanta qui se nomme « Blind Willie's ». Je m'y produisais avec un groupe régulier dont le musicien qui était aux claviers, Frank « Buzz » Amato, était un ex accompagnateur de Curtis Mayfield. Il était également l'un des producteurs du label Ichiban. Il aimait mon style de Blues car il le jugeait différent des autres.

Bubba a-t-il également enregistré pour ce label ?
Non, les enregistrements de Bubba ont été réalisés sur mon propre label. Je l'ai enregistré ainsi que YZ. Le nom du label est Ifgam comme « I feel good about myself » que vous pouvez retrouver sur internet www.ifgamrecords.com

Quand et pourquoi as-tu décidé de lancer ton propre label ?
Cela remonte à de nombreuses années. Je l'ai créé car c'était la meilleure solution pour faire connaître ma musique ainsi que certains artistes qui n'intéressaient pas les autres labels. Ainsi j'ai enregistré un musicien de Blues qui se nomme Bob Geddings qui a été comme un père pour moi à Oakland. Il m'a tout appris du business... J'ai eu l'idée de créer ce label avant d'enregistrer pour Ichiban. Quand ce dernier a fermé, je n'avais plus de contrat et j'ai décidé de me produire et de m'enregistrer moi-même en lançant Ifgam.

Peux-tu revenir sur ton amitié avec Bob Geddings ?
Il est comme un père pour moi...

Comment l'as-tu rencontré ?
Je l'ai rencontré alors que j'effectuais mon service militaire, dans l'armée de l'air, à Hawaï.
Il m'arrivait de jouer dans des Clubs locaux et un jour il se produisait dans la même ville et avait besoin d'un guitariste. Je l'ai donc accompagné dès 1966 alors que j'effectuais mon service à Hawaï... 
Après cette période je l'ai revu alors que je me rendais en Californie. C'était dans les années 1970 et j'ai, à cette occasion, rencontré toute sa famille. J'ai si bien été accueilli que je considère que mon deuxième nom est Geddings (rires) !

En dehors de tes frères qui as-tu enregistré sur ton label ?
Doc Blakey qui est un jeune musicien (Theodis serait, en fait, son oncle, Nda)...
Il voulait jouer de la guitare et je lui ai appris les rudiments de l'instrument.
Il y a également Willie Hill qui est un vieil ami et qui a une incroyable carrière derrière lui. Il a, dans le passé, enregistré avec un duo nommé Willie & Anthony. C'est un artiste formidable...
Je suis, vraiment, très heureux de pouvoir travailler avec de telles personnalités sur mon propre label.

A ton sens, est-il très important de s'entraider entre musiciens ?
Oui, spécialement entre les musiciens noirs car la « grande » presse américaine a tendance à nous oublier. Ils évoquent des artistes tels que Jonny Lang ou Eric Clapton mais ne font pas le maximum pour nous assurer une grande promotion.

Tu ne penses pas que la situation a un peu changé aujourd'hui ?
Non, ça n'a pas vraiment changé...
Une légende telle que Fillmore Slim, qui a des années de carrière derrière elle, se fait souvent griller la politesse dans les journaux spécialisés par des jeunes artistes blancs comme Jonny Lang.

Donc tu t'occupes un peu de ce boulot...
Je fais ce que je peux !
Je peux aussi compter sur l'aide de mon jeune bassiste, Robert Peterson, qui n'a que 24 ans et qui s'occupe bien de mon business !

Remerciements : Denis Leblond (Tempo Concerts)

www.theoadisealey.com
www.myspace.com/theoadisealey
www.ifgamrecords.com

 

 

 

 

 
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Les liens :

theoadisealey.com
myspace.com/theoadisealey
ifgamrecords.com

Interview réalisée au
Cognac Blues Passions
le 24 juillet 2009

Propos recueillis par
Eric Doidy et
David BAERST



 

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