Todd Sharpville
L'émission "blues" de radio RDL Colmar animée par Jean-Luc et David BAERST

Quels sont les membres de votre groupe ?
Le Todd Sharpville Band ? Sylvio Galasso à la basse et les West Coast Horns : Chas Osborn (rompette) et Dominique Nocross (saxophone). Un nouveau venu à la batterie (c'est son premier concert avec le groupe) : Dave Ollis. Mon bras droit au sein du groupe, qui est avec moi depuis longtemps : Paddy Miller à l'orgue Hammond.

D'où êtes-vous originaire et quand avez-vous débuté dans la musique ?
Je pense que j'ai dû commencer à jouer à l'âge de douze ans. Je suis né à Londres et j'y ai vécu une grande partie de ma vie en Angleterre. J'ai aussi vécu un certain temps à Santiago du Chili et également à Austin, Texas.

Avez-vous de bons souvenirs du club Antones d'Austin ?
Je faisais partie du groupe maison de ce club. Ces temps-là, Austin manquait réellement de groupes. Un petit nombre de musiciens se produisait partout. L'atmosphère était merveilleuse car les gens faisant du blues allaient voir ceux qui donnaient dans le punk et inversement. Tout cela dans un esprit très ouvert. Un peu comme San Francisco avait pu l'être dans les années 60, j'imagine.

Tout a changé quand Stevie Ray Vaughan a explosé. Maintenant, quand on arrive à Austin ; soit les clubs ont fermé, soit ils ont changé. On trouve un type avec un chapeau prétendant être SRV à chaque coin de rue. Comme pour Elvis à Memphis.

Quelles ont été tes influences dans la musique ?
A l'origine et avant que je me mette à la guitare, je n'écoutais que du rock'n roll des années 50 lorsque j'étais gamin. Eddie Cochran, Buddy Holly, etc… En écoutant Elvis à ses débuts, quand il chantait Big Bill Bronzy et Arthur Big Boy Crudup, j'ai commencé à m'intéresser au blues vers douze ans. Le premier album de blues que j'ai acheté était un disque de Freddie King. Dès que j'entendis le premier titre de l'album, je décidais de faire pareil à la guitare. Voilà pour mon initiation. J'adore aussi Lighting Hopkings et Magic Sam.

Depuis, j'ai reçu bien d'autres influences venant du Texas et d'endroits différents mais ces trois-là ont été déterminantes.
J'accorde beaucoup d'importance à la notion d'écriture dans le blues. Depuis vingt ans, les choses n'ont pas toujours avancé. Dans les années 50 et 60, Willie Dixon ne s'intéressait pas uniquement aux bons musiciens, mais aussi à ceux qui étaient capables d'interpréter des chansons correctes. Ces dernières années, le blues se trouve dans une situation où les gens écrivent n'importe quoi. Histoire de pouvoir chanter rapidement ces vers pour se précipiter sur le solo de guitare. Tout pour la musicalité des chansons.

Je voudrais tenter de changer cela modestement. Pour revenir à la bonne vieille théorie selon laquelle on peut tout pardonner si la chanson est valable. Nombreux sont ceux qui vont dans cette direction tels Larry Garner et Joe Louis Walker.

Vous composez donc la majeure partie de vos chansons ?
Oui, j'élabore toujours mon propre matériel. J'ai toujours eu l'habitude de composer mes propres chansons. Dès que j'aperçoit quelque chose, je suis attentif à tout ce qui m'entoure. Personne ne traverse la vie sans rien noter de particulier. Avec l'âge, l'œil devient plus acéré. Plus on porte d'attention aux choses et plus elles vous affectent. Ce qui me touche devient automatiquement un sujet pour une chanson. Si je n'écrivais pas, je me serait probablement retrouvé en prison. J'écris quand je suis sur la route. C'est plus facile ainsi. Lors des tournées en bus, en avion. Quand, j'en ai marre d'être assis au fond d'un avion à m'ennuyer, je sort une feuille de papier. La totalité de mon dernier album a été écrit ainsi.

Vous aviez joué l'an dernier au Luxembourg avec Mick Taylor : comment s'est passée cette collaboration ?
Après mon album précédent " the Mining of Life ", j'ai laissé de côté le blues pour faire des sessions avec différentes personnes. J'ai travaillé avec Van Morrisson et d'autres trucs assez pop. Pour mon retour à la chanson blues, j'ai voulu affirmer ma relation avec tous les musiciens du blues et ceux qui s'en sont inspirés. Histoire aussi d'attirer l'attention sur ces excellents musiciens anglais qui ont été négligés depuis un certain temps. Peter Green a recommencé à jouer en live. Snowy White est un des meilleurs guitaristes du British Blues. Mick Taylor appartient à cette mouvance. D'une certaine manière, c'était réunir de vieux amis pour collaborer sur cet album.

Comment pourriez-vous définir votre propre style ?
A la guitare ou pour la musique en général ? J'en sais absolument rien ! Je veux simplement être moi-même. Comme n'importe quel musicien affilié au blues. En grandissant, je n'ai jamais essayé de reproduire exactement ce que j'entendais. J'ai toujours été trop flemmard pour ça. D'un côté, ça vaut mieux. Quand on a trop écouté les mêmes trucs, ils ressortent dans votre son. J'imagine qu'on entends beaucoup de B.B. King dans mon jeu de guitare, un peu d'Albert King, du T-Bone Walker. Parce qu'à force de reproduire le style des autres, on n'a plus rien de personnel. Etant jeune, cela m'a souvent frustré. En prenant de l'âge, je préfère jouer à ma façon.

Dans quelle situation se trouvent les musiques " roots " en Angleterre ?
Ce n'est pas terrible. Les musiciens américains traversent une dure période dans leur propre pays en ce moment. Il y a deux jours, j'était à Chicago après une tournée américaine. Dans le même temps, les musiciens anglais ne sont pas mieux lotis en Angleterre. Au maximum, j'ai pu trouver une quinzaine de dates. Pour les grandes formations, il est également difficile de trouver à se produire. Tant les américains que les anglais ont produit tant de bonne musique ces dernières années que cela paraissait devoir durer encore longtemps. Pourtant le niveau musical s'est dégradé.

Je déplore la qualité des groupes de bars qui se produisent en Angleterre. Que se soit dans les bars ou dans le rues, le niveau est très faible. A cause justement de cette complaisance. Je compte cinq ou six groupes à sortir du lot, capable de tourner en Europe et en Amérique. Tels les Big Time Play Boys, Nine Below Zero, Paul Lamb & the Kings Snakes, Dannie Gilespie et Ansley Lister.

J'ai toujours adoré venir sur le continent : en Allemagne, en France, en Scandinavie, en Espagne, au Portugal … La culture musicale est encore très abondante par ici. Alors qu'en Angleterre, les jeunes préfèrent acheter des jeux vidéo et écouter de la dance. En comparaison, les gens sont moins compartimentés ici. Un gosse peut très bien se rendre à un concert de blues un soir et le suivant aller dans une rave. Moins de divisions et de catégories, ce qui est beaucoup mieux.

Dans le futur, quelle direction voulez-vous donner à votre musique ?
J'ai plusieurs idées, mais je vais me concentrer sur le chant. Quand on est jeune, on joue pour impressionner et l'âge venant, on joue pour s'exprimer. Avec l'expérience, il n'est plus nécessaire de jouer aussi vite pour faire passer ses émotions. J'ai tendance à tenir avec une note ou deux plutôt qu'une tripotée. Voilà la direction que je prends. Le chant prend aussi plus d'importance. J'ai passé beaucoup de temps de ma jeunesse à apprendre la guitare. Nombreux sont ceux qui ignorent totalement la valeur d'une bonne chanson. Il fait autant de temps pour maîtriser cet art difficile. Maintenant, c'est vraiment l'écriture qui m'accapare le plus. On verra bien où cela va me mener.

 
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Les liens :

Todd Sharpville

Le 7 juin 2003 à la Nuit du Blues de Sarreguemines

Jingle "Route 66"

Propos receuillis en exclusivité par Jean-Luc et David BAERST

 

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