Vicious Steel
L'émission "blues" de radio RDL Colmar animée par Jean-Luc et David BAERST

Nda : Vicious Steel n’est en rien une contrefaçon, qui donnerait l’appellation blues à la première chanson venue (du moment que celle-ci serait interprétée avec une pedal steel guitar ou qu’elle contiendrait, en son titre, ces 5 lettres magiques). En effet, la musique du duo (composé par le chanteur-guitariste Cyril Maguy et par le batteur Antoine Delavaud) en plus d’avoir la couleur, le goût et de sonner comme le blues, porte cet idiome au plus profond de son âme.Un sacerdoce résolument gagnant pour le groupe, puisque ce dernier a déjà réalisé la prouesse de séduire son petit monde des deux côtés de l’Atlantique. Un exploit d’autant plus remarquable, qu’il n’hésite pas à flirter (de temps en temps et avec talent) avec une certaine forme de chanson française. C’est dire si l’authenticité était de mise lors de notre premier rendez-vous, qui a donné vie à l’entretien qui suit.

Pouvez-vous revenir sur vos parcours musicaux respectifs, en amont de la fondation de votre duo ?
Cyril Maguy : Pour résumer, j’étais Professeur de guitare et Directeur d’une Ecole de Musique. Par la suite, je me suis retrouvé intermittent du spectacle en me lançant dans une carrière d’artiste. J’ai travaillé la guitare à Tous En Scène (Ecole de Musique Actuelles et Amplifiées), à Tours, pour me plonger dans le répertoire blues alors que je devais être âgé de 20 ans.
Antoine Delavaud : Pour ma part, j’ai commencé la musique assez jeune en faisant le Conservatoire (spécialité batterie). Ensuite, j’ai rencontré Cyril à la Faculté de Musicologie. J’appartenais déjà à des groupes mais notre tandem a bien fonctionné depuis le départ et les dates se sont enchainées. En 2008, j’ai pu bénéficier de ce statut magnifique qu’est celui de l’intermittence du spectacle…66

Comment passe-t-on du statut de Professeur à celui d’intermittent du spectacle qui, de prime abord, peut sembler « plus risqué » ?
Cyril Maguy : Je n’ai pas vu le risque car j’ai eu suffisamment de dates pour, immédiatement, devenir intermittent. J’ai donc arrêté mon travail de Professeur naturellement, sans connaitre une seule difficulté…

Votre musique est le reflet de plusieurs influences différentes. Pouvez-vous revenir sur celles-ci ?
Cyril Maguy : C’est, en effet, très varié. Nous partons du vieux blues du Mississippi (le hill country des collines), celui interprété par des Junior Kimbrough et des R.L. Burnside, pour aller jusqu’au rock des années 1990 (Rage Against The Machine, Pearl Jam…). Entre les deux, nous n’hésitons pas à revendiquer un profond respect pour une certaine forme de chanson française…celle qui va de Georges Brassens à Hubert-Félix Thiéfaine. J’écoute beaucoup de choses et c’est ce qui nourrit mes compositions…

De quelle manière est né le groupe Vicious Steel ?
Cyril Maguy : A la base, j’ai formé ce tandem avec un autre musicien, le contrebassiste Tim Coiffet. A ce moment-là, j’avais la batterie aux pieds… Nous avons envoyé deux morceaux au Festival Blues sur Seine et avons été sélectionnés pour le tremplin (en 2014, nda). Dès lors, nous avons enregistré plusieurs titres que j’ai composés puis avons gagné ce fameux tremplin de Blues sur Seine. Nous avons enchainé avec Les Rendez-vous de l’Erdre et pas mal d’autres choses. Pour des raisons professionnelles, Tim a été contraint d’abandonner le projet alors qu’Antoine devait nous rejoindre pour faire de nous un trio. Du coup, le groupe est resté un duo… Notre configuration actuelle existe depuis, bientôt, deux ans (formule guitare-batterie).

Vous véhiculez une certaine image, que ce soit sur scène (avec la présence d’un alligator empaillé par exemple) ou sur disque (avec un code graphique qui vous est propre). Est-ce une chose volontairement travaillée ?
Antoine Delavaud : Pas particulièrement…Pour ce qui est du décor et des illustrations, nous travaillons avec Bertrand Lanche qui est un ami dessinateur.
Cyril Maguy : En fait, notre image est tirée du milieu rural. Nous sommes issus de cet environnement, surtout moi (rires) ! Qu’il s’agisse de tracteurs, d’animaux empaillés ou de nos vêtements…tout vient de là !

Vous mélangez les styles et chantez, aussi bien, en anglais qu’en français. En tant que jeunes artistes, estimez-vous que l’avenir du blues doit passer par une certaine forme de métissage musical ?
Cyril Maguy : Oui, d’autant plus que le blues est constitué de mélanges depuis le début de son existence. Cette musique s’est toujours adaptée à son époque et a flirté à avec tous les courants musicaux. Le fait de mettre une étiquette précise (comme chicago blues…) est très français. Il faut varier et ne pas se poser de questions. Je me plais à composer dans ce registre qu’est le hill country blues et c’est pour cela qu’il est devenu la base de notre musique. De plus, c’est quelque chose d’assez dansant ! Cependant, il nous arrive d’être plus calmes et de mettre en avant la mélodie, comme sur « La fille au bord du lac ». Vicious Steel est le fruit d’un travail autour de la mélodie auquel nous adjoignons les rythmes que nous apprécions, car nous aimons faire bouger les gens. D’où notre intérêt pour le hill country blues…

Au final, qu’est-ce qui vous correspond le plus dans le blues… l’intérêt musical bien sûr mais, peut-être, également un certain état d’esprit que vous continuez de véhiculer ?
Cyril Maguy : Il y a tout ce qu’il y a autour mais son histoire, en elle-même, est déjà très forte. Nous avons eu la chance d’aller à Memphis en janvier 2017 et j’ai fait pas mal de voyages aux Etats-Unis. C’est un pays que j’adore et je trouve que les instruments du blues (guitares etc.) sont magiques. Les phrases que l’on répète, les mélodies…tout cela me plait !66
Antoine Delavaud : A titre personnel, ce qui m’a frappé là-bas est la pauvreté et le racisme qui y est toujours présent…même s’il n’est pas visible de prime abord. Il était intéressant de revenir là où tout est né, c’est-à-dire dans le delta du Mississippi. Depuis la France, on en a une vision « maquillée » et « touristique »…voir ce qu’il s’y passe en réalité fait réfléchir et nous a complètement imprégnés…

Vous êtes, comme nous l’avons déjà dit, un groupe bilingue. Véhiculez-vous les mêmes messages d’une langue à l’autre. Par rapport à l’anglais, le français est-il plus utile pour faire passer certaines idées et vice versa ?
Cyril Maguy : Le français est notre langue maternelle donc, pour moi, il est plus facile d’écrire un texte qui soit davantage « abouti » dans ce langage. Je suis beaucoup plus sûr de moi… Puis, en français, il y a la magie des mots. On peut plus facilement jouer sur les consonances et les mots qu’en anglais. Pour le moment, nos textes ne sont pas spécialement engagés. Ils parlent principalement de tracteurs, d’amours et de trahisons (rires) !

Vous évoquiez Brassens et Thiéfaine en ce qui concerne les inspirations d’écriture en français. Au même titre, y’a-t-il des songwriters américains qui vous touchent particulièrement ?
Cyril Maguy : En ce qui me concerne, il s’agit de gens qui ne sont pas spécialement connus. Des artistes que j’ai rencontrés au fil des festivals. Je peux, ainsi, citer C.W. Ayon, Dan Sheffield et Carl Nathan Nelson. Il y a aussi des grandes vedettes telles que Bob Dylan, Leonard Cohen et j’adore la manière d’écrire d’Eddie Vedder du groupe Pearl Jam.

Votre dernier album en date, « When The Sky Is Falling Down », est paru en 2017. Pouvez-vous me le présenter en détails ?
Cyril Maguy : Notre premier album est sorti en 2015. Le dernier en date est plus électrique et nous l’avons enregistré en live. De ce fait, il représente vraiment ce que nous proposons sur scène. Il est constitué de 11 titres dont quelques reprises (de Robert Johnson, Calvin Russell et R.L. Burnside). Les compositions originales ont été écrites à la dobro, à la 12 cordes… Il est le reflet fidèle de l’identité Vicious Steel. Comme nous le disions précédemment, l’illustration de la pochette est signée Bertrand Lanche qui est le dessinateur de Virgule Prod, la compagnie avec laquelle nous travaillons. De ce fait, nous travaillons sur d’autres projets en sa compagnie.

Justement, pouvez-vous me parler de Virgule Prod dont la conception de l’art semble assez large ?
Cyril Maguy : Virgule Prod est une petite autoproduction. C’est une association en entreprise du spectacle qui propose tous les types de spectacles vivants. C’est le cas pour les enfants avecKarabal (bal rock’n’roll pour les enfants), Karakonte (conte musical dessiné) et Le Noël de Karabal (Rock n’Christmas) et même le catch mexicain avec Psicodelico. Depuis peu, il y a une nouvelle création qui va s’appeler Les Bedaines de Coton. Elle va se monter en partenariat avec des salles des Deux-Sèvres. Ce spectacle destiné à la jeunesse évoque, à la fois, l’histoire du blues et celle de Charley Patton. Il y a donc beaucoup de choses qui se font. Nous travaillons, également, avec le public handicapé et les enfants qui sont en crèches. Nous avons un lieu pour nos résidences. Ce dernier est situé à Thouars au coeur des anciens abattoirs.

Pouvez-vous revenir sur votre participation à l’International Blues Challenge (Memphis, Tennessee). Qu’est-ce qui vous a le plus touchés au contact des américains ?
Cyril Maguy : En premier lieu, c’est leur côté « friendly ». Ils sont adorables…Ce qui m’a le plus touché, c’est que les gens « reconnaissaient » notre musique. C’était très impressionnant de les voir évoquer avec nous le hill country blues et, même, les entendre reprendre en cœur nos chansons en français. L’accueil du public était donc très sympathique. Pour nous, c’était un véritable voyage initiatique…
Antoine Delavaud : Le public n’avait pas peur de dire ce qu’il pensait, que ce soit bon ou non. Il participait beaucoup aux concerts… Nous y avons, aussi, fait de belles rencontres avec des artistes qui étaient également présents sur le challenge (qu’ils soient français, américains ou canadiens). En ce qui nous concerne, des débuts d’amitiés sont nées dans le Mississippi…

Concernant Vicious Steel, tout est allé très vite. Cela vous pousse-t-il à, encore, accélérer la cadence en termes de projets. Envisagez-vous déjà des nouveaux enregistrements pour 2018, voire 2019 ?
Cyril Maguy : Oui, il va même falloir que nous ralentissions la cadence car les projets se bousculent. Un nouvel album devrait voir le jour fin 2018 ou début 2019. En attendant, nous allons prendre le temps de « digérer » tout ce qu’il s’est passé ces dernières années. Notre but est toujours de nous construire et de jouer de plus en plus, de mieux en mieux et dans des salles de plus en plus grandes. Il faut prendre le temps, mais pas de trop. D’ici la sortie du futur album, il y aura peut-être des vidéos qui seront enregistrées, voire des EP. Tout dépendra de nos activités annexes à Vicious Steel, car dans notre compagnie les musiciens participent à tous les spectacles. C’est un choix qui nous permet de vivre de notre passion de la musique.

Vos influences vont du pre-war blues à la scène grunge, vous nourrissez-vous également de sons propres au XXIème siècle. Si oui, seriez-vous prêts à vous en inspirer dans l’avenir ?
Cyril Maguy : Il est possible que je m’inspire de ce qui se fait actuellement sur un autre projet. Pour le moment, je garde secret ce dernier… L’environnement dans lequel nous évoluons m’inspire en ce qui concerne l’écriture. En dehors de cela, la musique de Vicious Steel continuera d’explorer le terroir américain. Le fait de s’inspirer d’époques que nous n’avons pas vécues est, d’ailleurs,une forme de nostalgie. Notre but est de jouer avec de vrais instruments, en utilisant un minimum d’effets. Le résultat est, à la fois rude, rustre et rugueux…c’est ce qui nous ressemble le plus.

En finalité, à quoi ressemble votre public. Vous êtes jeunes et votre musique, bien qu’ancrée dans la tradition, est attirante pour les personnes de votre âge. Quelles générations viennent assister à vos concerts ?
Antoine Delavaud : Cela va de 7 à 97 ans, puisque même ma grand-mère vient nous voir (rires) ! Il n’y a aucune limite d’âge même si, dans les festivals de blues pur, les gens ont souvent bien plus de 18 ans. D’un autre côté, beaucoup de jeunes nous suivent avec beaucoup d’intérêt…
Cyril Maguy : Tout dépend, en effet, des endroits dans lesquels nous nous produisons. Nous allons, prochainement, faire des premières-parties d’artistes américains issus des musiques actuelles. Dans ce cas de figure, nous allons toucher un public âgé de 20 à 40 ans. Tout dépend principalement du lieu qui nous programme. En règle générale, nous sommes appréciés par toutes les générations…

Souhaiteriez-vous ajouter une conclusion à cet entretien ?
Cyril Maguy : Non, sinon te remercier d’être venu à notre rencontre afin d’évoquer Vicious Steel.
Antoine Delavaud : En effet, merci beaucoup !

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Interview réalisée
Festival Blues en Loire -
La Charité-sur-Loire
le 17 août 2017

Propos recueillis par
David BAERST

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