Devon Allman
L'émission "blues" de radio RDL Colmar animée par Jean-Luc et David BAERST


Nda : S’il porte l’un des noms les plus célèbres de la scène rock américaine, Devon Allman (fils, faut-il le rappeler, de Greg Allman des Allman Brothers) ne doit rien à personne en ce qui concerne son ascension sur la scène musicale. C’est, en effet, loin du show-business que ce musicien surdoué a commencé son apprentissage.Connu pour être le fondateur du groupe Honeytribe et pour sa participation au projet The Royal Southern Brotherhood, le chanteur-guitariste (et claviériste) s’est aussi lancé dans une remarquable carrière sous son propre nom. D’ailleurs, l’automne 2014 est marqué par la sortie de son deuxième opus en solo « Ragged & Dirty » (Ruf Records). Un disque qui propulse le quarantenaire dans le peloton de tête du blues-rock actuel. C’est donc à un artiste on ne peut plus épanoui, que m’a été offerte la possibilité de poser les questions qui suivent…

Devon, est-il facile de grandir au milieu d’une dynastie comme la famille Allman. As-tu connu l’ambiance des coulisses dès ton plus jeune âge ?66
Non, pas du tout en fait, puisque je n’ai pas eu l’occasion de rencontrer mon père avant d’avoir 17 ans. J’ai donc grandi d’une manière on ne peut plus classique et j’ai vécu une adolescence, à l’américaine, qui était tout ce qu’il y a de plus normal. Avec le recul, je crois que c’est une bonne chose car cela m’a permis d’acquérir un certain sens des valeurs et d’avoir une approche plus basique de la musique. Je suis, ainsi, tombé amoureux de cet art par moi-même et j’en ai commencé la pratique de mon propre chef. Ceci, sans avoir à subir les influences de mon père. J’ai donc pu me forger ma propre identité, avec cette adolescence très normale…

Quelles étaient alors tes influences musicales ?
Ma première grande influence a été la musique des Rolling Stones. J’ai aussi beaucoup écouté The Doors, Jimi Hendrix et Santana. Je m’inspirais, en grande partie, de ce qui passait à la radio quand j’étais jeune… dont ces groupes que je continue d’aimer aujourd’hui.

Comment t’es-tu lancé dans l’apprentissage de la guitare ?
J’avais un professeur durant quelques mois, mais je le trouvais beaucoup trop « basique » dans sa manière de m’enseigner les rudiments de cet instrument. Il n’abordait jamais ce que je voulais apprendre, c’est-à-dire le rock’n’roll. J’ai donc mis un terme à ce soutien et je me suis mis à apprendre par moi-même, en essayant de reproduire ce que j’entendais sur les disques que je possédais.

Dans quelles circonstances as-tu fondé ton premier groupe Honeytribe ?
C’était en 1999 à Saint Louis dans le Missouri, une ville où je vis toujours actuellement. J’avais alors à mon actif une expérience de 5 ans passés au sein d’un groupe de hard rock. Je voulais m’orienter vers quelque chose qui se rapproche davantage des racines du blues et qui offre davantage d’ouverture aux improvisations. J’ai pu compter, pour cela, sur l’appui de quelques-uns des meilleurs musiciens de Saint Louis et nous avons fondé Honeytribe ensemble. Ces gens sont mes amis, en plus d’être d’excellents instrumentistes (en plus de Devon, le groupe est actuellement constitué de George Potsos à la basse et de Gabriel Strangeà la batterie, nda) avec lesquels il est toujours très agréable de partir en tournée.

Lorsque tu as commencé à enregistrer sous ton propre nom, le guitariste Luther Dickinson a prêté son talent à un morceau de ton album « Turquoise ». Musicalement, te sens-tu proche des sons que produit son groupe, The North Mississippi Allstars ?
Je crois qu’il n’y a, en effet, qu’une chanson sur laquelle Luther Dickinson est présent au sein de cet album. Il y joue une partie de guitare slide. Nous avons grandi dans la même région du sud des USA (Devon est né à Corpus Christi au Texas, nda). C’est, peut-être, pour cette raison que nos styles peuvent parfois être similaires.

Peux-tu me présenter ton nouvel album « Ragged & Dirty », paru en octobre 2014 ?
Il vient, en effet, juste de sortir. J’en suis très satisfait et le trouve très bon bien qu’il soit différent de mon précédent opus. Il marque une étape pour moi puisque j’y ai travaillé avec l’aide d’un nouveau producteur, Tom Hambridge (connu pour avoir collaboré, entre autres, avec Buddy Guy, nda). Nous tenions à l’enregistrer à Chicago et, de ce fait, il est moins ancré dans la tradition du blues du sud. Il reflète davantage du son du chicago-blues et d’une ambiance très « nocturne ». Je suis très content de ce disque…

En tant qu’auteur-compositeur, quels sont les sujets que tu aimes aborder dans tes chansons ?
Je ne sais pas vraiment. Je m’inspire principalement de la vie et de l’amour. Tu sais, je suis inspiré par ce que je ressens et par ce que je vois à un moment précis. Je peux aussi bien me baser sur ma propre vie que sur l’actualité du moment. C’est toujours très différent…

Tu es actuellement en tournée avec The Royal Southern Brotherhood. Que représente ce groupe pour toi ?
Je crois qu’il représente, avant tout, la rencontre entre deux familles. La famille Allman et la famille Neville (Cyril Neville, voir interview ICI, est en effet l’un des autres membres de ce groupe, nda). C’est un très intéressant mélange de styles parce qu’on peut retrouver du rock’n’roll, du blues, du funk, de la soul music dans ce que nous faisons. Tout y est mélangé et je crois que c’est vraiment une très bonne collaboration…

As-tu appris des choses au contact de Cyril Neville ?
Oh oui ! Tu sais, c’estune bénédiction d’être dans un groupe en compagnie de Cyril. Cela est, pour moi, le cas depuis ces dernières années. Je pense qu’il est l’un des meilleurs 66chanteursde la planète. Le fait de pouvoir l’entendre oeuvrer chaque nuit est une immense leçon en soit…

En dehors de lui, de quels musiciens actuels te sens-tu proche. Es-tu, par exemple, un ami de Derek Trucks ?
Je connais Derek depuis qu’il est très jeune. Sinon, je suis ami avec les membres des North Mississippi Allstars, Robert Randolph, John Popper etc…Nous avons souvent l’occasion de nous croiser sur des festivals et nous nous produisons régulièrement dans les mêmes clubs. Il y en a, bien sûr, d’autres avec lesquels j’ai pu tisser des liens amicaux.

De quelle manière t’es-tu retrouvé sur le label européen Ruf Records ?
Cette compagnie voulait me signer et, de mon côté, je cherchais un contrat avec une maison de disques. C’est aussi simple que ça (rires) !

Quels sont tes prochains projets ?
Je garde un œil rivé sur plusieurs choses à venir. Disons que, dans les grandes lignes, mon souhait est de poursuivre cette aventure avec The Royal Southern Brotherhood et de continuer à enregistrer des disques et à faire des tournées sous mon propre nom. Je crois que, pour le moment, cette perspective constitue une masse de travail suffisante. Mais il y aura, cependant, peut-être quelques autres projets qui se concrétiseront dans le futur…

A ton sens, existe-t-il une perception différente du blues d’un côté et de l’autre de l’Atlantique ?
Je pense qu’en Europe (même si c’est une forme américaine d’art et que l’Europe l’a importée) cette musique est devenue très importante. Aux USA, on peut en entendre tous les jours et partout. Sur le « vieux continent », c’est une chose un peu plus rare et qui est donc considérée avec égard. De ce côté-ci de l’Atlantique, on sent aussi que les enregistrements ont une grande importance. Il y a deux communautés de fans importantes d’un côté comme de l’autre. C’est simplement leur histoire qui est différente.

Sur cette tournée, Crossing Roads, The Royal Southern Brotherhood partage la scène avec le groupe français Jesus Volt. Que penses-tu de sa musique ?
Oh, je la trouve formidable ! Elle est très entrainante. De plus ce groupe est vraiment cool et sait interpréter une musique qui respecte fidèlement ses influences américaines, qu’il s’agisse de rock’n’roll ou de blues. C’est agréable de découvrir des ensembles, issus de pays différents, qui savent jouer cette musique.

Quel serait ton rêve en ce qui concerne la poursuite de ta carrière ?
Oh, mon Dieu ! Je ne sais pas vraiment… Je crois que The Royal Southern Brotherhood constitue déjà un projet de rêve pour n’importe quel musicien. Chaque membre de ce groupe est vraiment solide et très talentueux. De plus, c’est humainement une expérience incroyable. Personne ne tire la couverture à soi alors que nous sommes tous à la tête de nos propres projets. Sinon, pour répondre à ta question, je ne sais pas vraiment. Le futur m’ouvre grand les bras !

Que souhaites-tu ajouter, à l’attention de ton public français, en conclusion ?
Depuis les débuts de The Royal Southern Brotherhood, nous avons joué à Paris chaque année. Cette fois-ci, pour la première fois, nous avons donné des concerts dans d’autres villes françaises. Nous avons pu faire découvrir notre musique à Marseille, Perpignan etc… C’était une formidable expérience qui nous a permis de rencontrer des gens formidables et de très bons publics !

Remerciements : Aurélie Roquet (On The RoaD Again), Marina et Marie (BMK team)

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Interview réalisée à
La Rodia - Besançon
le 25 octobre 2014

Propos recueillis par
David BAERST

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