d
Pour commencer, Julien, peux-tu te présenter
?
Je viens du Sud-Ouest de la France plus précisément de Villeneuve-sur-Lot,
dans le Lot et Garonne, une commune située entre Bordeaux et Toulouse.
Il y avait, dans cette ville, un grand Festival de Jazz qui a existé
durant 15 ou 20 années.
A partir de mes 16-17 ans j'ai bougé vers Bordeaux puis je suis arrivé
à Paris il y a deux ans (Julien est aujourd'hui âgé
de 25 ans, Nda).
Dans quelles circonstances as-tu découvert
le Blues ?
Au départ j'étais plus amateur de Rock'n'Roll, écoutant
Chuck Berry et Jerry Lee Lewis. J'étais, avant d'en jouer, particulièrement
attiré par le son de piano de ce dernier.
Par la suite j'ai découvert le Blues à travers les disques
d'Otis Spann, de Roosevelt Sykes, de Jay Mc Shann etc
C'est donc le Blues qui t'a poussé à
faire du piano plutôt que l'inverse ?
Oui à travers les disques puis à travers la rencontre avec
des musiciens. J'ai monté mon premier groupe à la fin du
Collège - début du Lycée. Nous étions quelques-uns
à déjà écouter du Blues comme BB King. Nous
avons donc décidé d'approfondir nos connaissances dans ce
domaine.
Par la suite j'ai rencontré Nicolas Toussaint (Nico Wayne
Toussaint, voir l'interview ICI,
Nda) qui, en vrai passionné, m'a fait découvrir énormément
de choses.
Peux-tu revenir sur ton apprentissage du piano
puisque tu es, au départ, un autodidacte ?
J'ai commencé juste pour passer du bon temps. Au lieu de me rendre
aux cours j'allais au piano plus facilement.
Comme il y avait un piano à la maison, je pouvais facilement y
jouer 2-3 heures tous les jours. N'ayant pas de professeur, je me suis
procuré des livres pour connaître les accords de base, à
savoir jouer la basse à la main gauche et un accord de 3 notes.
Puis j'ai commencé à lire le chiffrage américain.
Du coup j'ai commencé à interpréter des titres des
Beatles, des standards et d'autres petites conneries. Après j'ai
pris quelques cours particuliers, avec une prof, durant 1 ou 2 ans.
Depuis un an, je me suis inscrit à une école de Jazz à
Paris.
Est-ce que tu penses que le fait d'être
un autodidacte a été un avantage au départ par rapport
à la compréhension du Blues et surtout par rapport au feeling
que tu pourrais apporter à cette musique ?
Oui je pense que c'est un avantage dans le sens ou cela m'a forcé
à développer mon style. C'est à dire que cela m'a
donné une envie de jouer de façon énergique sans
avoir une partition, sans être freiné par quoique ce soit.
Cependant depuis quelques années je ressens un côté
négatif au fait d'être autodidacte. Par exemple pour découvrir
d'autres musiques, lire une partition et accompagner d'autres musiciens
c'est un handicap. De ce fait j'ai envie de bosser davantage
Le chant est-il venu naturellement par la suite
?
Oui c'est venu tout seul car il fallait un chanteur dans le groupe. J'avais
envie donc je ne me suis pas posé de questions.
Au départ ce n'était pas très juste mais je me suis
accroché et depuis je n'ai jamais arrêté. Là
encore je n'ai jamais travaillé ma voix, encore une fois c'est
venu en écoutant des disques
De quelle façon s'est passée ton
incursion dans le milieu du Blues professionnel français ?
Cela a commencé avec mon premier groupe de Lycée. Nous avons
fait la première partie du Chicago Blues Festival grâce
à Christian Boncourt qui organise les Blues Station
à Tournon.
Il nous a fait confiance alors que nous n'avions qu'entre 16 et 20 ans
chacun. Six mois plus tard j'ai rencontré Nico Wayne Toussaint
qui m'a immédiatement engagé dans son groupe.
C'était très excitant pour moi de partir comme cela. Nous
faisions au minimum cent dates par an.
Ceci m'a permis de côtoyer d'autres musiciens et de rentrer dans
les Festivals.
J'ai monté un autre groupe deux ans après et cela a bien
marché. Le bouche à oreille a fait en sorte que je ne manque
jamais de concerts.
Tu l'évoquais un peu à travers Nico
Wayne Toussaint mais pourrais-tu revenir sur tes nombreuses collaborations
?
Après Nico j'ai eu la chance de remplacer le pianiste de la chanteuse
anglaise Dana Gillespie. Je joue toujours avec elle et je me suis
notamment produit, à ses côtés, deux mois en Inde.
Elle adore le Blues et le Boogie, surtout Otis Spann. J'ai donc beaucoup
bossé les lignes de basse.
Par la suite j'ai rencontré Big Joe Turner, qui était
le bassiste de BB King et Albert King, qui vit en France du côté
de Tours. Nous avons fait quelques Festivals ensemble
J'ai aussi joué avec quelques groupes français comme les
Scratch My Back avec Kevin Doublé.
A Bordeaux j'ai rencontré Anthony Stelmaszack qui m'accompagne
ce soir. J'ai aussi accompagné Mister Tchang etc
Avec mon batteur actuel (l'excellent Guillaume Nouaux, Nda) nous
avons accompagné Chuck Berry l'an dernier.
J'ai aussi joué un peu avec Keith B. Brown ainsi qu'avec John Primer
pour quelques dates en Italie.
Je ne me souviens que de cela mais c'est déjà pas mal

Je me souviens de t'avoir vu aux côtés
de Little Victor pour accompagner Louisiana Red en Belgique
Oui exact !
As-tu des anecdotes liées à toutes
ces collaborations. Pour Chuck Berry, par exemple ?
Avec Chuck Berry nous n'avions pas de liste ni de morceaux à répéter.
Nous n'étions en contact avec personne en dehors du promoteur de
ce concert. Ce dernier ne nous a rien indiqué sur le répertoire
sachant que même les accompagnateurs habituels de Chuck ne savent
pas à l'avance ce qu'il va jouer.
Du coup nous avons travaillé sur ses disques, comme j'avais pas
mal de vieux 33 tours. Nous avons, ainsi, bossé les classiques
et regardé quelques DVD.
Notre première rencontre avec lui a eu lieu sur scène.
Nous avions commencé le concert puis il est arrivé. C'est
son bassiste qui nous a aidé sur scène en faisant certains
signes qui correspondent à un " langage " pour le groupe.
C'était sympa, ça s'est bien passé et Chuck Berry
avait l'air plutôt content du résultat.
Au niveau du travail cela s'est vraiment fait à l' " arrache
" (rires).
Depuis quelques temps tu accumules de nombreux
prix. Peux-tu revenir plus spécifiquement sur l' " International
Challenge " de Memphis ?
C'est Jean Guillermot de " Blues sur Seine " qui
m'a proposé de partir pour ce concours. J'ai accepté sans
vraiment savoir de quoi il s'agissait, j'étais déjà
allé à Memphis comme touriste et j'adore ce coin là
des USA. Je n'ai donc pas eu à réfléchir trop longtemps
J'étais accompagné par mon batteur, Guillaume. En arrivant,
dans le hall, il devait y avoir 200 ou 300 groupes, principalement des
américains plus quelques belges et quelques suédois. C'est
une vraie compétition où il y a des règles précises
à respecter, des morceaux chronométrés etc
Nous avions un peu la pression mais nous nous sommes retrouvés
en demi-finale. Il ne restait alors que 4 groupes sur 50 dans la catégorie
" duos ". C'était vraiment chouette avec un excellent
public qui était très réceptif.
C'était marrant car il ne fallait pas dépasser d'une minute
le temps imparti sinon le jury, composé de 4 ou 5 personnes qui
ne sourient pas beaucoup, te sort un panneau sur lequel il y a inscrit
" 10 secondes " puis " 5 secondes "
Si tu dépasses, tu es éliminé, c'est marrant
Nous y avons fait de belles rencontres et passé de bons moments
avec Jean.
Aujourd'hui est-ce que tu accompagnes encore régulièrement
d'autres artistes comme ce fut le cas dernièrement pour Nina Van
Horn ?
Je n'avais jamais joué avec Nina
Elle m'a contacté et l'enregistrement s'est fait très rapidement.
Je l'avais rencontrée sur un Festival il y a 3 ou 4 ans et ça
avait été très sympa.
Je n'ai pas le temps de beaucoup l'accompagner sur scène et elle
a déjà un pianiste qui est sympa. Cependant ça a
été une grande rencontre et une belle expérience
en studio.
J'avais enregistré ces 5 ou 6 morceaux seul, sans le groupe, en
écoutant les bandes et en enregistrant par dessus.
Dans quelles configurations te produits-tu sous
ton propre nom ?
Il arrive que l'on forme un sextet avec un trompettiste en plus du saxophoniste.
Sinon je tourne, le plus régulièrement, en trio contrebasse
- batterie - piano ou en quartette avec un guitariste. Cela change en
fonction des endroits
As-tu beaucoup enregistré sous ton propre
nom ?
J'ai enregistré un premier disque en 2002, un live dans un club
de Bordeaux " Le Comptoir du Jazz ". Nous nous y produisions
tous les dimanches à l'époque sous le nom de JB Boogie.
L'année suivante nous avons enregistré, sous le même
nom, en trio avec Thibaut Chopin à la contrebasse et Anthony
Stelmaszack à la guitare.
Enfin l'année dernière j'étais à La Nouvelle-Orléans
avec un groupe de Jazz traditionnel français où nous avons
rencontré un gars qui a voulu nous enregistrer pour faire un album
de Blues. C'est là que j'ai rencontré Sébastien
Girardot (contrebasse) et Guillaume Nouaux (batterie), la rythmique
qui m'accompagne ce soir.
Nous repartons dans cette même ville en avril 2007 afin d'enregistrer
un nouveau cd.
Peux-tu me parler plus en détails de ces
projets, de la composition du groupe et des éventuels invités
par exemple ?
J'avais rencontré l'an dernier, en Louisiane, le clarinettiste
de jazz local Evan Christopher. Je joue beaucoup avec lui actuellement
et nous avons enregistré sous son nom.
Il m'apporte beaucoup dans un style un peu plus " jazz-swing ".
Nous enregistrerons ensemble mon prochain cd sur lequel figurera aussi
son guitariste anglais.
Il y aura peut être quelques invités de New-Orleans comme
Leroy Jones, un trompettiste avec lequel nous jouons de temps en
temps, on verra
Les projets sont donc de toujours voyager et faire un maximum de rencontres
tout en me concentrant au maximum sur ce que je fait avec Evan et avec
mon groupe.
As-tu une conclusion à ajouter ?
Non, sinon de vous souhaiter de passer un bon moment avec mon groupe et
moi-même ce soir au Jazz-Club Lionel Hampton.
|